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​Tapura et Amuitahira'a unis pour la survie


Tahiti, le 19 avril 2023 – Édouard Fritch et Gaston Flosse ont prononcé mercredi une allocution commune scellant leur “union autonomiste” en vue du second tour des élections territoriales. Affirmant avoir “mis de côté leurs différences” et jouant la carte de la “réconciliation” post-Tahoera'a, ils ont déroulé mercredi les arguments en faveur de leur union destinée à “faire barrage au retour des indépendantistes”.
 
Deux jours après l'improbable annonce du projet d'alliance entre Édouard Fritch et Gaston Flosse en vue du second tour des élections territoriales, les deux leaders politiques ont parachevé mercredi matin leur “réconciliation” lors d'une allocution commune dans le hall de l'assemblée de la Polynésie française. En présence de la quasi-totalité des colistiers de leur liste fusionnée et devant une centaine de supporters venus les écouter, les deux anciens président et président délégué du Tahoera'a huiraatira ont discouru chacun leur tour pour tenter de justifier leur (ré)union.
 
“On tourne la page”
 
Gaston Flosse, tout d'abord, a semblé particulièrement à son aise pour célébrer son retour dans la course aux territoriales après son élimination de dimanche, au soir du premier tour (14 773 voix – 11,88%). Mêlant petits trais d'humour, graves considérations sur “l'avenir du Pays” et trémolos émus sur le regroupement de “tous ceux qui étaient à la même école” du parti orange, l'ancien président a donné l'impression de peser un peu plus que ses 4 candidats sur les 73 de la liste du Tapura. “Ce n'est pas une simple réconciliation entre Gaston et Édouard”, a entamé le leader du Amuitahira'a, expliquant qu'il lui avait fallu “laisser de côté (ses) différences” avec Édouard Fritch. “J'ai oublié tout ce que j'ai dit sur ton compte… Tu n'en as pas beaucoup dit sur le mien”, s'est amusé Gaston Flosse. “Nous nous sommes téléphonés avec Édouard et nous nous sommes rencontrés. Nous n'avons pas parlé de tous les pe'ape'a. On tourne la page et tout ça c'est fini.”
 
Sur le fond, Gaston Flosse affirme s'être retrouvé avec Édouard Fritch pour éviter la “catastrophe pour notre pays” que représenterait la présidence de Moetai Brotherson. Reprenant l'argument d'une mystification du Tavini entre l'indépendance “immédiate, dure, rigoureuse” d'Oscar Temaru et celle “pas dans l'immédiat, (…) gentille, accueillante” de Moetai Brotherson, il a répété à l'envi vouloir agir “pour le Pays” en faisant barrage aux indépendantistes. Quid du projet statutaire du Amuitahira'a qui a transformé le Tahoera'a en parti prônant l'accession à la souveraineté de la Polynésie française ? “Oh, État souverain associé et autonomie, c'est presque pareil”, balaie d'un revers de main Gaston Flosse. Séquence émotion, enfin, pour clore son discours sur la réunion avec les “élèves d'aujourd'hui” et les “anciens élèves” du Tahoera'a. “Ça donne beaucoup d'émotions. Et je peux vous dire que j'aurais eu du mal à partir avec cette déchirure au cœur. Là aujourd'hui, le vieux pourra partir tranquille et en paix.”
 
“Pas une fusion de nos partis”
 
Beaucoup plus solennel, Édouard Fritch a embrayé pour dérouler à son tour un argumentaire électoral justifiant son ralliement au Amuitahira'a pour tenter de refaire son retard de 5 521 voix sur le Tavini. Transformant lui aussi en un claquement de doigt le Amuitahira'a en “parti autonomiste” et oubliant les scores –certes minimes– du Hau Maohi et de Heiura-Les Verts, le président du Tapura a affirmé que “le courant indépendantiste” restait “largement minoritaire” avec “environ 35% des suffrages exprimés”. Soit le seul score du Tavini huiraatira. “Le Président Flosse et moi-même avons estimé que le résultat de ce premier scrutin représentait à la fois un très grand risque pour l’avenir de la Polynésie au sein de la République mais aussi le retour à la tête de notre Pays d’un parti politique qui a plongé notre Pays dans l’une des pires périodes de son histoire”, a déroulé le président du parti rouge et blanc.
 
“C’est vrai que pendant la campagne électorale du premier tour, chacun a pu exprimer des opinions différentes. Mais sur les grands sujets de société nous nous retrouvons”, a défendu Édouard Fritch à propos de cette union de circonstance avec le parti de Gaston Flosse. Saluant ensuite “l'abnégation” des quatre candidats Tapura qui ont accepté d'être retiré de la liste pour accueillir les quatre candidat Amuitahira'a, le président du Pays a tenu à préciser qu'aucun ministère n'avait été promis durant les négociations. Et il a également insisté sur le fait que “l'accord” conclu avec Gaston Flosse “n'est pas une fusion de nos partis politiques respectifs”. L'ambition des deux leaders politiques serait de créer une “plateforme autonomiste”, a expliqué Édouard Fritch, “qui à terme soit la plus large possible”.
 
Négociations
 
Problème, cette “union autonomiste” ne rassemble pour l'heure que le Tapura et un parti qui se revendiquait encore la semaine dernière pleinement souverainiste. Si Gaston Flosse assure que Teva Rohfritsch a accepté “sur le principe” de rejoindre cette plateforme, l'intéressé ne tenait pas du tout le même discours une demi-heure plus tard lors d'une conférence de presse avec sa liste à Faa'a. Affirmant ne pas avoir été intégré aux discussions entre Gaston Flosse et Édouard Fritch en début de semaine, le sénateur n'insultait pas l'avenir en évitant les critiques trop saillantes sur l'union Tapura-Amuitahura'a. Mais il demandait en revanche des garanties plus sérieuses sur le programme de cette plateforme et sur la reconversion éclair de Gaston Flosse à l'autonomie.
 
Notons d'ailleurs que le programme du Tapura “fusionné” avec le Amuitahira'a a déjà évolué mercredi. Le président Édouard Fritch a annoncé une concession faite à son nouveau partenaire en annonçant qu'il s'engageait à réduire la TVA sociale de 1% à 0,5% dès le lendemain du second tour en cas de victoire. Et qu'il travaillerait ensuite à trouver d'autre mode de financement de la protection sociale pour arriver à la suppression de ce dispositif en 2024. Pour l'instant, ça ne coûte rien de l'annoncer.
 


Rédigé par Antoine Samoyeau le Mercredi 19 Avril 2023 à 23:40 | Lu 2610 fois