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​L’indice des prix, enjeu stratégique


Tahiti, le 1er mars 2022 – Au-delà de la simple statistique, la publication mensuelle de l’indice général des prix revêt une importance économique et politique. D’où la nécessité de suivre son évolution dans le contexte inflationniste actuel.
 
L’augmentation significative du coût des matériaux a déjà conduit le gouvernement à faire voter un nombre conséquent d’exonérations de droits et taxes à l’importation de ces marchandises afin de réduire l’impact de cette flambée sur le coût de la construction en Polynésie. Mais à peine votées, c’est le prix du baril de pétrole qui s’envole. Autour de 80 dollars en début d’année, il flirte désormais avec la barre des 100 dollars depuis une semaine. Un niveau plus atteint depuis août 2014. Une hausse qui s’ajoute à celle exponentielle, subie depuis plusieurs mois, du prix du fret. Ces augmentations ont pour incidence d’impacter directement ou indirectement l’indice des prix à la consommation (IPC) constaté localement avec des conséquences qui dépassent le seul cadre des prix pratiqués en magasin.
 
Le Smig concerné
 
En effet, l’évolution du Smig dépend également de l’IPC. Selon le code du travail “lorsque cet indice atteint un niveau correspondant à une hausse d'au moins 2% par rapport à l'indice constaté lors de l'établissement du dernier Smig, celui-ci est relevé dans la même proportion à compter du premier jour du mois qui suit la publication de l'indice entraînant ce relèvement”. À la suite du mouvement de grève générale fin 2021, le gouvernement avait acté une première revalorisation de 2% à compter du 1er décembre. Un deuxième réajustement du Smig de 1 point doit intervenir au mois de juillet prochain puis un autre de même ampleur en décembre 2022. Reste que si les prix augmentent de plus de 2% par rapport à décembre dernier, le protocole sera en quelque sorte caduque puisque la revalorisation devra aussitôt se faire “dans la même proportion”. L’instauration de la TVA sociale, qui s’applique à tous les biens et services à tous les stades de la commercialisation, à compter du 1er avril pourrait ainsi conduire à l’observation d’une forte hausse de l’indice des prix. Si le gouvernement s’est montré très discret lors du vote de la mesure en décembre dernier, le représentant Nuihau Laurey avait prédit quant à lui une hausse des prix de 10%. Dans cette hypothèse, le Smig progresserait dans une proportion dix fois plus élevée que celle obtenue par les syndicats pour le seul mois de juillet, et passerait alors automatiquement à 171 570 Fcfp par mois.
 
Maîtriser le prix des hydrocarbures
 
Il reste qu’au moment des négociations entre le gouvernement et les syndicats, la TVA sociale, son taux, son assiette et sa date d’application, n’étaient pas encore approuvés par l’assemblée de la Polynésie française et les cours du pétrole n’avaient pas explosé. L’évolution de l’IPC est donc sensible à l’évolution de ces composants, mais la plupart ne connait pas de fortes oscillations d’un mois sur l’autre. Si les prix des produits alimentaires, des logements, des vêtements ou encore des meubles varient, ils le font dans des petites proportions selon les publications mensuelles de l’ISPF. L’évolution des hydrocarbures est quant à elle plus préoccupante. En novembre dernier, la hausse des carburants, actée par arrêté du Conseil des ministres, avait contribué à elle seule à une augmentation de l’indice général des prix de +0,31%. La répercussion de l’envolée actuelle du prix du baril aurait une incidence plus importante encore. Compte tenu de sa part dans l’indice des prix (4,1%), une hausse de 15 à 20 Fcfp dans les mois à venir des prix à la pompe conduirait à une augmentation de l’IPC de +0,5% du fait de ce seul composant. La dernière fois que le baril était à 100 dollars, le prix du sans-plomb était de 178 Fcfp en Polynésie contre 146 aujourd’hui. Une raison qui pourrait expliquer le choix du gouvernement, annoncé la semaine dernière, “de ne pas répercuter cette hausse internationale à la population polynésienne” et donc de maintenir les prix à la pompe jusqu’en juin prochain. “Cette surcharge sera assurée par le budget du Pays” indiquait ainsi le communiqué de la présidence. Les Polynésiens qui, par choix ou par contrainte, ne disposent d’aucun véhicule thermique participeront ainsi à l’effort collectif en s’acquittant de leurs taxes et impôts.
 

Rédigé par Sébastien Petit le Mardi 1 Mars 2022 à 20:46 | Lu 1090 fois