Tahiti, le 17 avril 2024 – Le biologiste marin Matthieu Juncker débute ce mercredi une mission scientifique qui doit le conduire à vivre pendant les huit prochains mois en autarcie totale sur un atoll désert des Tuamotu. Là, il prévoit notamment, en partenariat avec l’Office français de la biodiversité et la commune de Anaa, de recueillir des données sur le Titi, un oiseau endémique en danger d’extinction.
Projet nom de code “À contre-courant”. C’est un grand saut que s’apprête à faire Matthieu Juncker. Il l’organise depuis plusieurs mois. Nous le rencontrons alors qu’il achève dans la hâte les derniers préparatifs. Ce biologiste marin part, ce mercredi, pour une mission scientifique et tout à la fois d’introspection aux Tuamotu. Il ne prévoit de revenir que le 25 décembre prochain. Entretemps, une immense plage temporelle de 252 jours au cours de laquelle l’aventurier s’apprête à vivre seul dans son studieux ermitage : l’îlot d’un atoll désert de 600 kilomètres carrés dans le voisinage de Anaa.
Cette immersion solitaire – et c’est la raison première de l’opération – doit lui permettre d’étudier le Chevalier des Tuamotu dans des conditions d'observation naturalistes. Le Titi, ou kivikivi, de son nom local, est un oiseau endémique de l’archipel, classé sur la liste des espèces en danger d’extinction par l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Le volatile n’est plus recensé que dans quelques atolls, voire motu, exempts de prédateurs introduits. C’est sur l’un de ces motu que Matthieu Juncker planifie de vivre en complète autarcie jusqu’à Noël prochain, dans le cadre du projet “À contre-courant”. Entretemps, il planifie le recueil de données sur l’espèce à l’aide d’observations visuelles, de capteurs, de drones, de caméras et d’enregistreurs audio. Des informations sur l’état de l’habitat du Titi : présence de prédateurs introduits ou encore érosion mécanique des îlots sous l’effet des vagues. À la clé, ces données d’observation pourront servir à recommander des actions nécessaires pour préserver l’oiseau et plus globalement les îlots de l’atoll. L’opération est organisée dans le cadre d’un appel à projets initié par l’Office français de la biodiversité et la commune de Anaa. Le projet “À contre-courant” est préparé de longue date, et organisé avec l’accord de la commune et des propriétaires fonciers.
1,5 tonne de matériel
Mais plus généralement, pour ce biologiste marin, l’objet de la mission est avant tout “le plaisir de la connaissance” : “Je suis biologiste et passionné par le fait d’observer le merveilleux d’un poisson, d’un requin, d’un oiseau. Mais il y aussi des enjeux sur place : l’atoll a beau être isolé, il est quand même fréquenté de temps en temps ; des gens peuvent débarquer et introduire accidentellement des rats et être à la source d’une dégradation complète de l’écosystème, sur les plantes, les crabes, les oiseaux… ; il peut s’agir aussi du dérèglement climatique et de ses modifications majeures à moyen terme sur l’environnement. Je voudrais que cette connaissance soit utile à de la gestion, à toute fin utile. Je ne suis ni le maire, ni la Direction de l’environnement ; mais je peux apporter des informations objectives qui, je pense, pourront leur être utiles, vu les enjeux, vu la beauté de ces espèces, s’ils décidaient de les protéger. J’ai l’ambition d’avoir un état de l’écosystème. Sur le milieu marin, je vais étudier les récifs, les poissons, les requins, les tortues ; sur le milieu terrestre, je vais rendre compte de l’érosion du littoral, je vais étudier la végétation, les oiseaux… J’ai prévu de mener une dizaine de suivis qui permettront d’avoir une image globale de l’atoll. Mais c’est cet oiseau, le Titi, autour duquel tout va graviter.”
Il part avec 1,5 tonne d’équipements. Il envisage de récupérer sur place et produire de l’eau douce, de pêcher, de cueillir les algues et les rares plantes comestibles. Il aura à sa disposition une cantine complète en guise de pharmacie. “Mais le gros du chargement, ce sera mon fare.” Un habitat surélevé pour être à l’abri d’un risque de submersion qu’il a construit, en kit, comme un abri sûr capable de résister aux dépressions tropicales. Et il aura sur place une communication satellite qu’il utilisera en dernier recours.
Projet nom de code “À contre-courant”. C’est un grand saut que s’apprête à faire Matthieu Juncker. Il l’organise depuis plusieurs mois. Nous le rencontrons alors qu’il achève dans la hâte les derniers préparatifs. Ce biologiste marin part, ce mercredi, pour une mission scientifique et tout à la fois d’introspection aux Tuamotu. Il ne prévoit de revenir que le 25 décembre prochain. Entretemps, une immense plage temporelle de 252 jours au cours de laquelle l’aventurier s’apprête à vivre seul dans son studieux ermitage : l’îlot d’un atoll désert de 600 kilomètres carrés dans le voisinage de Anaa.
Cette immersion solitaire – et c’est la raison première de l’opération – doit lui permettre d’étudier le Chevalier des Tuamotu dans des conditions d'observation naturalistes. Le Titi, ou kivikivi, de son nom local, est un oiseau endémique de l’archipel, classé sur la liste des espèces en danger d’extinction par l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Le volatile n’est plus recensé que dans quelques atolls, voire motu, exempts de prédateurs introduits. C’est sur l’un de ces motu que Matthieu Juncker planifie de vivre en complète autarcie jusqu’à Noël prochain, dans le cadre du projet “À contre-courant”. Entretemps, il planifie le recueil de données sur l’espèce à l’aide d’observations visuelles, de capteurs, de drones, de caméras et d’enregistreurs audio. Des informations sur l’état de l’habitat du Titi : présence de prédateurs introduits ou encore érosion mécanique des îlots sous l’effet des vagues. À la clé, ces données d’observation pourront servir à recommander des actions nécessaires pour préserver l’oiseau et plus globalement les îlots de l’atoll. L’opération est organisée dans le cadre d’un appel à projets initié par l’Office français de la biodiversité et la commune de Anaa. Le projet “À contre-courant” est préparé de longue date, et organisé avec l’accord de la commune et des propriétaires fonciers.
1,5 tonne de matériel
Mais plus généralement, pour ce biologiste marin, l’objet de la mission est avant tout “le plaisir de la connaissance” : “Je suis biologiste et passionné par le fait d’observer le merveilleux d’un poisson, d’un requin, d’un oiseau. Mais il y aussi des enjeux sur place : l’atoll a beau être isolé, il est quand même fréquenté de temps en temps ; des gens peuvent débarquer et introduire accidentellement des rats et être à la source d’une dégradation complète de l’écosystème, sur les plantes, les crabes, les oiseaux… ; il peut s’agir aussi du dérèglement climatique et de ses modifications majeures à moyen terme sur l’environnement. Je voudrais que cette connaissance soit utile à de la gestion, à toute fin utile. Je ne suis ni le maire, ni la Direction de l’environnement ; mais je peux apporter des informations objectives qui, je pense, pourront leur être utiles, vu les enjeux, vu la beauté de ces espèces, s’ils décidaient de les protéger. J’ai l’ambition d’avoir un état de l’écosystème. Sur le milieu marin, je vais étudier les récifs, les poissons, les requins, les tortues ; sur le milieu terrestre, je vais rendre compte de l’érosion du littoral, je vais étudier la végétation, les oiseaux… J’ai prévu de mener une dizaine de suivis qui permettront d’avoir une image globale de l’atoll. Mais c’est cet oiseau, le Titi, autour duquel tout va graviter.”
Il part avec 1,5 tonne d’équipements. Il envisage de récupérer sur place et produire de l’eau douce, de pêcher, de cueillir les algues et les rares plantes comestibles. Il aura à sa disposition une cantine complète en guise de pharmacie. “Mais le gros du chargement, ce sera mon fare.” Un habitat surélevé pour être à l’abri d’un risque de submersion qu’il a construit, en kit, comme un abri sûr capable de résister aux dépressions tropicales. Et il aura sur place une communication satellite qu’il utilisera en dernier recours.
L’épreuve de l’ermitage
Depuis dix jours qu’il finalise à Tahiti ses derniers préparatifs, l’aventurier est sans cesse dans la course. “Je crois qu’il me faudra vraiment être arrivé, avoir déposé les cantines, le matériel, voir le bateau repartir pour me dire ‘J’y suis. Mon expédition a vraiment commencé’. D’ici-là, c’est un peu les urgences qui s’enchaînent ; la logistique est majeure : cette mission, c’est un vaste projet logistique.”
Mais pour l’aventurier-chercheur, c’est aussi un saut dans l’inconnu : “J’ai la chance d’aller sur l’atoll ; mais vivre seul, en complète autonomie, c’est vraiment un pas immense que je m’apprête à franchir. J’ai de l’appréhension. Je ne pars pas serein. Je ne suis pas un spécialiste en survie. J’ai quelques connaissances […], mais le chalenge est de taille pour quelqu’un qui n’est pas des Tuamotu.”
Une mission scientifique que Matthieu Juncker regarde pour ce qu’elle est aussi, compte tenu des conditions qu’il s’impose : une ascèse. “Je recherche la solitude parce que j’ai envie d’être sevré de l’information ; de ne pas être sans arrêt en train d’échanger. Il y a sans doute une aventure introspective dans cette expédition. Elle a de nombreuses composantes : aventure, sciences, communication, et une composante personnelle dans le sens où il s’agit aussi d’aller un peu jusqu’au bout de la question ‘Qui es-tu ?’. Une fois tombé le costume de la société, de la comédie humaine, tu en viens à constater ce que sont tes limites. Et là, il n’y a plus rien à démontrer à personne. Si tu as peur, la nuit, de sortir sur le récif pour pêcher des langoustes, alors que les vagues sont grosses, la décision n’appartient qu’à toi. M’extraire de la société, je sais que ça va me coûter : je suis quelqu’un qui aime beaucoup les relations humaines. Et là, ça va être une espèce de sevrage assez sévère ; mais je trouve que ça fait partie de l’aventure d’être soi dans un environnement extraordinaire.”
“Je n’imagine pas échouer, rassure-t-il. Je suis quelqu’un d’assez optimiste. Et, tout à la fois, je n’ai rien à rendre à personne, sinon à l’Office français de la biodiversité qui attend de moi des observations de cet oiseau emblématique et en voie d’extinction qu’est le Chevalier des Tuamotu, le Titi. En dehors de ça, le challenge m’appartient : si je ne reste pas huit mois mais sept, ou six… ce sera toujours aussi bien. J’espère qu’il n’y aura pas d’échec ; mais en tout cas, ce sera une expérience positive. J’ai fixé huit mois, parce que j’ai trouvé que ce serait un temps suffisant pour apprécier la solitude, pour observer l’oiseau et toutes les composantes de l’environnement. Rendez-vous au retour pour savoir si le challenge a été tenu.”
Avec cette immersion aux Tuamotu, Matthieu Juncker envisage la publication d’un livre, et une exposition. En attendant, un journaliste l’accompagne pendant trois semaines en vue d’un documentaire qui sera diffusé sur France Télévisions.
>> PourPour suivre le projet “À contre-courant”
Depuis dix jours qu’il finalise à Tahiti ses derniers préparatifs, l’aventurier est sans cesse dans la course. “Je crois qu’il me faudra vraiment être arrivé, avoir déposé les cantines, le matériel, voir le bateau repartir pour me dire ‘J’y suis. Mon expédition a vraiment commencé’. D’ici-là, c’est un peu les urgences qui s’enchaînent ; la logistique est majeure : cette mission, c’est un vaste projet logistique.”
Mais pour l’aventurier-chercheur, c’est aussi un saut dans l’inconnu : “J’ai la chance d’aller sur l’atoll ; mais vivre seul, en complète autonomie, c’est vraiment un pas immense que je m’apprête à franchir. J’ai de l’appréhension. Je ne pars pas serein. Je ne suis pas un spécialiste en survie. J’ai quelques connaissances […], mais le chalenge est de taille pour quelqu’un qui n’est pas des Tuamotu.”
Une mission scientifique que Matthieu Juncker regarde pour ce qu’elle est aussi, compte tenu des conditions qu’il s’impose : une ascèse. “Je recherche la solitude parce que j’ai envie d’être sevré de l’information ; de ne pas être sans arrêt en train d’échanger. Il y a sans doute une aventure introspective dans cette expédition. Elle a de nombreuses composantes : aventure, sciences, communication, et une composante personnelle dans le sens où il s’agit aussi d’aller un peu jusqu’au bout de la question ‘Qui es-tu ?’. Une fois tombé le costume de la société, de la comédie humaine, tu en viens à constater ce que sont tes limites. Et là, il n’y a plus rien à démontrer à personne. Si tu as peur, la nuit, de sortir sur le récif pour pêcher des langoustes, alors que les vagues sont grosses, la décision n’appartient qu’à toi. M’extraire de la société, je sais que ça va me coûter : je suis quelqu’un qui aime beaucoup les relations humaines. Et là, ça va être une espèce de sevrage assez sévère ; mais je trouve que ça fait partie de l’aventure d’être soi dans un environnement extraordinaire.”
“Je n’imagine pas échouer, rassure-t-il. Je suis quelqu’un d’assez optimiste. Et, tout à la fois, je n’ai rien à rendre à personne, sinon à l’Office français de la biodiversité qui attend de moi des observations de cet oiseau emblématique et en voie d’extinction qu’est le Chevalier des Tuamotu, le Titi. En dehors de ça, le challenge m’appartient : si je ne reste pas huit mois mais sept, ou six… ce sera toujours aussi bien. J’espère qu’il n’y aura pas d’échec ; mais en tout cas, ce sera une expérience positive. J’ai fixé huit mois, parce que j’ai trouvé que ce serait un temps suffisant pour apprécier la solitude, pour observer l’oiseau et toutes les composantes de l’environnement. Rendez-vous au retour pour savoir si le challenge a été tenu.”
Avec cette immersion aux Tuamotu, Matthieu Juncker envisage la publication d’un livre, et une exposition. En attendant, un journaliste l’accompagne pendant trois semaines en vue d’un documentaire qui sera diffusé sur France Télévisions.
>> PourPour suivre le projet “À contre-courant”