​Ronny Teriipaia publie sa feuille de route pour l'Éducation


Tahiti, le 5 août 2023 - Nouvelle majorité, nouvelle méthode. Tandis que le président du Pays innove sur la forme pour présenter le bilan des 100 jours de son gouvernement, son ministre de l'Éducation, Ronny Teriipaia, prend la plume dans une “lettre de rentrée”. Il y expose les grandes lignes de la politique éducative qu'il souhaite mener avec notamment pour objectif de mettre en place “des écoles immersives”.
 
“La politique que je vais conduire avec vous ne fera pas table rase du passé”, prévient d'emblée le ministre de l'Éducation à l’adresse du monde enseignant : elle “s'appuiera sur ce qui a bien marché ces dernières années et sur la Charte de l'Éducation”, tout en impulsant des “priorités nouvelles”.

Comme il l'avait déjà évoqué, il réaffirme sa volonté de “mettre en place, à terme, des écoles immersives”. On ne sait pas pour quand exactement donc. L'année prochaine ? D'ici la fin de la mandature ? “À terme”. Dont acte. En attendant, pour y arriver Ronny Teriipaia s'est entouré d’une “task force” de “cinq personnes expertes dans leurs domaines respectifs” et assure que des “actions seront développées sur le terrain”.

Encourager la pratique de la langue polynésienne au quotidien

“Le rôle de l'école doit être majeur dans la décennie à venir car elle concourt à la préservation et à la transmission de notre patrimoine linguistique et culturel”, écrit le ministre qui veut donc que l'école prenne le relais dans un contexte où “même si une grande partie de la population est en contact avec une ou plusieurs langues, celles-ci sont de moins en moins pratiquées en famille”. Un constat établi depuis longtemps, et les ministres de l'Éducation de l'ancienne mandature avaient déjà développé le bilinguisme dans les écoles. Le ministre Teriipaia entend ainsi s'appuyer sur “les retours d'expériences de ces écoles bilingues à parité horaire” pour atteindre son objectif d'“améliorer la connaissance de nos langues polynésiennes, et d'encourager leur pratique au quotidien”.

Un concours sur la reconnaissance de l'histoire et de la culture polynésiennes

Dans cette lettre, il encourage le personnel de l'Éducation et les chefs d'établissements à “créer un écosystème favorable à l'apprentissage des langues régionales” et “favoriser le chant et plus particulièrement les hīmene tumu” pour que “nous” puissions “tous chanter nos chants traditionnels”, de la “maternelle à la terminale voire au-delà”.

L'histoire, la géographie, la culture et l'identité polynésiennes, l'enseignement du fait nucléaire ou encore le fait colonial devront être mieux “pris en compte” dans les programmes scolaires. “À l'image du prestigieux concours national sur la résistance et la déportation, je vais lancer un concours sur la reconnaissance de l'histoire, de la géographie et de la culture de la Polynésie.”

Les enseignants mieux payés ?

Sur les fondamentaux, notamment l'enseignement du français et des mathématiques, le ministre indique qu'il appliquera en Polynésie “les réformes” de son homologue national “à la rentrée 2023 au collège et au lycée professionnel”. Une heure de soutien et d'approfondissement dans ces deux matières sera en outre inscrite à l'emploi du temps des élèves de chaque classe de sixième, et “des stages de réussite seront organisés avant la reprise de janvier 2024 et avant la rentrée d'août 2024”.

Il ajoute qu'il suivra aussi le ministre de l'Éducation nationale sur la “revalorisation financière du métier d'enseignant”. Sans plus de précision. Voilà qui va faire plaisir à ce corps de métier qui a battu le pavé de nombreuses fois ces derniers mois. Reste à savoir de quel ordre sera cette revalorisation, quand elle sera mise en place, et surtout, si elle sera bien financée.

Dans cette lettre de 9 pages, il évoque aussi l'enseignement professionnel et sa volonté de voir aboutir le projet de Campus des métiers de la mer et “veut faire évoluer les dispositifs d'apprentissage”. Afin de favoriser la réussite scolaire, la Mission de lutte contre le décrochage scolaire (MDLS) deviendra la Mission pour la persévérance scolaire (MPS) à la rentrée 2023. Au-delà du changement de nom (c'est la mode), le ministre veut mettre en place des “pratiques pédagogiques accrocheuses” pour que les élèves aient envie de rester à l'école. Il encourage d’ailleurs “fortement” les chefs d'établissement “à se servir des questionnaires Colcam et Lycam afin de repérer au plus vite les décrocheurs potentiels et mettre en place un soutien adapté”. Des chefs d'établissements qui sont au demeurant sollicités tout au long de ce courrier.

Développement durable : objectif 100% d'ici trois ans

Notamment sur le harcèlement à l'école, en leur demandant de mettre en place, “dans les jours suivant la rentrée, une heure de sensibilisation sur la thématique ‘harcèlement et réseaux sociaux’”, le harcèlement ne s'arrêtant plus aux portes de l'école aujourd'hui. En matière de santé à l'école, “la pratique sportive et la dynamique Génération 2024 doivent se poursuivre, en particulier la mise en œuvre des dispositifs 30 minutes d'activité physiques quotidiennes à l'école, deux heures de sport en plus par semaine dans les sections sportives”.

Dans la même veine, pour encourager les pratiques favorables à la santé, les 17 objectifs de développement durable (les ODD) seront intégrés dans les programmes et le tableau de bord des écoles. Le ministre s'est fixé comme objectif que “100% des écoles et des établissements scolaires entrent dans une démarche globale de développement durable dans une échéance de trois ans”.

Rénover les établissements

Enfin, au niveau des infrastructures, outre la livraison de nouveaux bâtiments comme l'internat du collège de Atuona ou le campus du collège Mataura à Tubuai, Ronny Teriipaia annonce une rénovation et une restructuration des 35 établissements qui “ont besoin de travaux”. À la fin de l'année, vraisemblablement au moment de présenter le budget primitif du Pays pour l'année prochaine, il annoncera une “programmation pluriannuelle de travaux” en mobilisant “toutes les ressources” : celles du Pays, et de l'État au titre de la Dotation globale d'investissement (DGI), du Fonds exceptionnel d'investissement (FEI) ou de l'agence de rénovation urbaine (ANRU).

Rédigé par Stéphanie Delorme le Samedi 5 Aout 2023 à 19:17 | Lu 3722 fois