​Pas de quartier pour la porcherie de la Presqu’île


Tahiti, le 9 août 2021 - Le tribunal administratif de Papeete a examiné hier deux nouveaux contentieux visant à suspendre l’arrêté autorisant l’implantation de la porcherie à Taiarapu-Est. Les deux affaires, initiées par une association de riverains et la commune voisine de Taiarapu Ouest, ont surtout conduit à des débats sur l’impact environnemental du projet. Avec deux visions très différentes.

La résistance au projet d’implantation d’une nouvelle porcherie à Taiarapu-Est continue. Après avoir rejeté deux procédures fin juin, le juge des référés du tribunal administratif s’est penché hier sur les requêtes de l’association Paruru te Arutaimareva et la commune de Taiarapu Ouest. Elles ont saisi la juridiction pour trancher sur l’autorisation accordée à la SCEA Polycultures pour l’exploitation d’un élevage de porcs. Une autorisation contestée d’abord au niveau de la procédure. Le projet avait en effet reçu un avis défavorable du commissaire-enquêteur mais le Pays, après un long délai, avait fini par accorder le précieux sésame administratif. Une procédure au cours de laquelle le rôle de la SPEED est pointé du doigt. Le cabinet d’études a en effet travaillé comme assistant à la maitrise d’ouvrage pour la SCEA et a réalisé l’étude d’impact. Selon Me Fidèle, représentant l’association, “il y a un conflit d’intérêts de la SPEED de nature à altérer son jugement”. Il paraissait difficile pour le cabinet d’aider la SCEA à monter le projet puis à réaliser une étude d’impact défavorable le condamnant. Mais les avocats des requérants ont surtout argumenté sur la piètre qualité de ladite étude d’impact. Un travail de cochon en quelque sorte qui les ont poussé à rentrer dans le lard.
 
L’impact environnemental
 
Ils ont ainsi amplement mis en avant la sous-estimation dans l’étude des volumes de lisiers à déverser ou encore de la surface d’épandage nécessaire à l’exploitation. Les calculs, minimalistes selon les deux avocats, conduiraient à minorer l’impact environnemental du projet. De la même manière, ils relèvent l’absence d’étude sur l’impact hydrogéologique. Les rares éléments s’appuieraient en effet sur une étude générale des sols sur Tahiti réalisée en 1983, “une étude récente aurait dû être faite” plus spécifiquement sur la zone du projet et de l’épandage selon Me Fidèle. Cette dernière cherche à préserver un site naturel d’un projet industriel susceptible de porter atteinte à l’environnement et ainsi à limiter l’arrivée de gros groins dans leur petit coin de paradis. Une autre crainte concerne en effet l’approvisionnement en eau. L’exploitation est en effet susceptible de nécessiter un apport en eau important dans un secteur de la commune où les habitants sont souvent soumis à des coupures pour gérer la pénurie.

Pour l’avocat de la SCEA et le représentant du Pays, il ne faut pas prendre les juges pour des jambons. Me Quinquis, représentant la SCEA, s’est échinée à présenter toute une palette d’arguments pour que les magistrats ne comprennent pas de travers. Selon lui, “le projet s’inscrit dans une agriculture raisonnée”. Si l’avocat admet que gestion des lisiers en milieu tropical est une “question complexe”, techniquement, tout ce qui a été proposé par la SPEED est “parfaitement réfléchi” avec des hypothèses d’exploitation prudentes. Si l’alimentation en eau peine, c’est du fait de casses occasionnées par l’approvisionnement des riverains contestataires. Quant à l’étude contestée de 1983, il répond par un truisme : Elle constitue toujours selon lui “la bible” en la matière. Deux argumentaires donc diamétralement opposés qui ne devraient pas conduire le juge des référés à se demander longuement si c’est du lard ou du cochon. La décision est en effet attendue aujourd’hui.
 

Rédigé par Sébastien Petit le Lundi 9 Aout 2021 à 23:42 | Lu 2669 fois