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​Pas de pénurie d'oxygène... pour l'instant


Tahiti, le 23 août 2021 - En dépit de la flambée des besoins en oxygène liée au traitement des formes inquiétantes de Covid, la Polynésie française est en situation critique, mais il n’y a pas de “risque de rupture si la crise se stabilise au point actuel”, assure le ministre de la Santé.

Les formes inquiétantes du Covid s’accompagnent d'un syndrome de détresse respiratoire aiguë. Un apport en oxygène est alors nécessaire pour éviter une mort par asphyxie du patient. Et avec l’explosion épidémique liée au variant Delta, les besoins en oxygène connaissent une flambée record en Polynésie. Des besoins en constante augmentation depuis début août. Mais pour l’instant, “le problème est cadré”, assure le ministre de la Santé. “Il n’y a pas de risque de rupture, si la crise se stabilise au point actuel”, insiste Jacques Raynal. Le ministère s’est fendu d’un communiqué ce week-end pour détailler tous les approvisionnements en oxygène et en matériel d’assistance respiratoire en cours ou attendus. “On a des capacités en oxygénothérapie qui nous permettent largement de faire face à la crise actuellement.” 

La société Gazpac Tahiti, prestataire pour la fourniture d’oxygène, a en effet dédouané hier une cuve “iso tank” de 16 tonnes d’oxygène liquide. “Ses cuves sont pleines”, insiste le ministre. Deux autres “iso tanks” sont attendus début septembre de Nouvelle-Zélande par voie maritime. Un “iso tank” supplémentaire et 128 “obus” B47 de 34,5 litres d’oxygène doit être expédié de Nouvelle-Calédonie pour une arrivée prévue le 12 septembre, alors que l’entreprise vient de renforcer son stock avec 100 bouteilles vides arrivées du Caillou jeudi dernier. Des équipements utiles pour le transport des malades et l’approvisionnement des hôpitaux périphériques. 
La gestion des besoins et des ressources fait au demeurant l’objet d’un point quotidien assuré par l’Agence de régulation de l’action sanitaire et sociale (Arass). Les ressources polynésiennes en oxygène sont surveillées comme le lait sur le feu.

Demande multipliée par 10 au CHPF

Car avec plus 253 hospitalisations Covid en cours lundi, et une demande en oxygène décuplée par rapport à ses besoins normaux, le centre hospitalier de Taaone touche à la limite de ce qu’il peut délivrer en interne, avec ses trois générateurs. 
"Notre réseau est ce qu’il est. Et on est au maximum de ce que l’on peut faire”, indique-t-on au CHPF. “Il n’a jamais été dimensionné pour l’utilisation qu’on en a aujourd’hui. Aucun hôpital au monde n’est dimensionné pour faire ce qu’on fait actuellement.” Pour faire face à la demande, l’établissement a installé 20 lits équipés d’un concentrateur d’oxygène dans son grand hall. Mais, dès que possible, “l’enjeu est de pouvoir faire sortir les patients qui le peuvent pour une oxygénation à domicile”. 

Là aussi, les capacités techniques disponibles sur le territoire sont soumises à rude épreuve. “En 10 jours, nous avons épuisé le stock de concentrateurs dont nous disposions pour les trois prochains mois jusqu’en octobre”, constate le Dr. Grégory Détrun, président de l’Apair. Et la demande ne cesse d’augmenter, stimulée par les médecins généralistes. Depuis l’année dernière ces praticiens peuvent prescrire des concentrateurs d’oxygène à domicile lorsque l’hospitalisation de leur patient n’est pas justifiée. L’Association polynésienne d’aide aux insuffisants respiratoires gère une centaine de concentrateurs. Avec cette demande nouvelle et massive, elle se trouve contrainte de les faire tourner à flux tendu. “On récupère les appareils chez les patients qui peuvent s’en passer pour appareiller les patients Covid, après une maintenance de routine. Cela ne nous permet d’appareiller que les patients les plus urgents. On fait systématiquement le point au jour le jour.” Petite lueur d’espoir : L’Apair doit recevoir une trentaine de concentrateurs neufs sur le vol de ce mercredi sans réel espoir d’en obtenir de nouveaux ensuite. “Les fournisseurs n’en ont plus et on n’a plus les budgets.”

“On espère tenir”

En proie aux mêmes difficultés, Isis Médical, l’autre prestataire important pour l’accompagnement des insuffisants respiratoires a vu son stock de concentrateurs fondre en quelques jours. Mais à la différence de son homologue, Isis a pu s’appuyer sur son réseau de partenaires métropolitains. Samedi, l’entreprise a ainsi reçu 144  concentrateurs d’oxygène par le vol Air Tahiti Nui. “On espère pouvoir tenir jusqu’au pic de cette vague épidémique”, a déclaré à nos confrères de TNTV son gérant, Mahera Arakino. Un conseil des ministres exceptionnel avait acté la veille la mobilisation de 6,5 millions de Fcfp pour prendre en charge les frais d’affrètement. 

Enfin, en même temps que les sept infirmiers et trois médecins anesthésistes-réanimateurs attendus en renfort jeudi en Polynésie, le ministère des Outre-mer a annoncé ce week-end par communiqué l’arrivée de “près de 450" concentrateurs d’oxygène. Une promesse en matériel qui laisse le ministre de la Santé dubitatif : “Je n’ai rien vu de tel sur le site de Santé Publique France. Mais ça peut toujours servir. Abondance de biens ne nuit pas”. 

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Lundi 23 Août 2021 à 19:16 | Lu 680 fois