​Paea met fin à la pollution de sa station d'épuration de Tiapa


Tahiti, le 13 janvier 2024 – C’est une pollution environnementale qui persiste depuis 30 ans à Paea. Pressée par une décision de justice et aidée par un financement d’État, la commune a engagé des travaux qui doivent s’achever en avril prochain pour la réhabilitation de la station d’épuration de Tiapa.
 
Les travaux de réhabilitation de la station d’épuration de Tiapa doivent s’achever mi-avril prochain. Des travaux conduits dans un délai contraint qui promettent d’apporter une réponse à un problème vieux de plus de 30 ans, à Paea. Une pollution à l’origine de l’interdiction de baignade ordonnée par arrêté municipal en 1997 et toujours en vigueur, au PK 20,5 plage de Tiapa, en raison d’une mauvaise qualité des eaux rejetées : la canalisation d’évacuation dans le lagon des eaux issues de la station d’épuration fuit en effet à trop faible distance du littoral et rejette des eaux surchargées en germes d’origine organique.
 
“La population de Paea est très résiliente”, estime le tāvana Antony Géros, maire de Paea depuis juillet 2020, qui entend bien laisser au crédit de son prédécesseur, feu Jacquie Graffe, l’incapacité trentenaire à remédier à ce problème de pollution. “Pour peu que leur maire, leur metua, arrive à bien faire passer son message, elle tolère ce qu’il y a autour.”
 
La chambre territoriale des comptes s’était indignée de cette situation, dans un rapport d’observations définitives en 2019. Et face à l’inaction apparente de la commune, l’association de protection de l’environnement La Planète Brûle avait porté l’affaire en justice. Mi-octobre 2022, la commune a été condamnée à “prendre toutes mesures nécessaires et appropriées pour faire cesser le rejet dans le lagon des eaux souillées provenant de la station d’épuration Tiapa”. Le tribunal administratif de Polynésie française avait alors donné un an à Paea pour s’exécuter, au risque de devoir payer une forte astreinte quotidienne passé ce délai.
 
La station d’épuration redimensionnée
 
Pressée par cette injonction, la mairie de Paea a publié un avis d’appel public à concurrence en août dernier pour des travaux de réhabilitation de la station d’épuration et ses ouvrages annexes. Procédure à l’issue de laquelle la société Polynésienne des eaux a été sélectionnée, en groupement avec la société MD-Bat. La période de préparation du chantier et la réalisation du dossier d’exécution s’est achevée le 13 novembre. Les travaux de rénovation ont débuté le 15 décembre avec un délai d’exécution prévu pour s’achever le 11 avril prochain.
 
L’objectif, pour les installations de la station d’épuration de Tiapa, est de permettre “une désinfection qui garantisse le traitement des germes et une qualité de l’eau dite de haute baignade”, explique Pascal Chung, le chef du service municipal des eaux. À courts termes, ces travaux doivent porter sur une réhabilitation et un redimensionnement des équipements chargés du traitement des eaux usées en provenance de la centaine de logements des lotissements Tehauparu et Te Puhapa, situés en amont. “Jusqu’à présent, on a mis en place un traitement par UV. Chaque année, la commune souscrit un contrat de maintenance. L’entreprise fait des analyses de l’eau ; des mesures de ce qui entre dans la station d’épuration, de ce qui en sort. On voit qu’il y a un abattement biologique. Mais ce n’était pas suffisant.” En cause, selon le technicien, “des branchements sauvages” sur le réseau d’assainissement, notamment pour l’évacuation d’eaux pluviales, “ce qui est interdit”. Résultat : l’afflux en eaux “usées” est bien supérieur à la capacité de traitement de la station d’épuration. Et cette situation entraîne la saturation très rapide des réservoirs chargés du stockage des boues de traitement. Aussi, le chantier de réhabilitation prévoit-il notamment un renforcement de la capacité de traitement des boues issues du bassin de décantation de la station d’épuration. Deux lits de séchage plantés de roseaux seront ajoutés à l’installation. Les travaux de creusement débutent cette semaine. La capacité de traitement de la station sera ainsi triplée à 1 000 m3 par jour.
 
À plus longs termes, dans le cadre d’un autre programme non encore financé, l’émissaire de rejet dans le lagon des eaux traitées pourrait être prolongé au-delà de la barrière récifale. Pour l’heure, il fuit toujours à une cinquantaine de mètres du rivage. Mais les aménagements sur le système de traitement de la station d’épuration de Tiapa promettent, sur le papier, de garantir des rejets dignes d’une eau à la norme “haute baignade” dès avril prochain. “À ce moment-là, il n’y aura plus de problème. On pourra retirer même l’émissaire puisque l’eau rejetée sera en principe plus salubre que l’eau pluviale”, estime Antony Géros.

“Le problème était financier”

La commune travaille depuis 2020 sur son schéma directeur d’assainissement des eaux usées, insiste Ragitea Bourgeois, la chargée du développement urbain et de l’environnement à la mairie de Paea. Et cette réflexion bénéficie de subventions publiques depuis 2018, précise-t-elle, histoire de bien souligner que si l’injonction du tribunal administratif a bien “dynamisé” une procédure en cours, la réflexion pour remédier au problème de pollution était déjà à l’œuvre à Paea. “Le travail à faire sur la station d’épuration était clairement identifié. On était d’ailleurs en lien avec la subdivision administrative des îles du Vent à ce sujet”, explique Ragitea Bourgeois. “Le problème qui s’est posé était financier. La municipalité ne disposait pas des 40 millions de francs nécessaires pour lancer le chantier de rénovation. On a donc sollicité des financements. Et c’est vrai que la décision de justice a beaucoup aidé pour cela” : la commune de Paea a obtenu de l’État en mai dernier l’octroi d’une subvention de 27 millions de francs au titre de la Dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR). Le solde de 13 millions pour le financement de l’opération a été financé sur fonds propres.

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Dimanche 14 Janvier 2024 à 15:11 | Lu 2365 fois