​Les morsures de chiens errants se multiplient à Bora Bora


Tahiti, le 23 octobre 2023 – Avec 61 cas de morsure depuis le début de l’année, la commune de Bora Bora fait face à un réel problème de sécurité. En cause : des chiens laissés libres de divaguer sur l’espace public par des maîtres insouciants lorsqu’ils ne sont pas abandonnés. La municipalité, les vétérinaires et l’association Animara en appellent au civisme et incitent les propriétaires à opter pour la stérilisation afin d’éviter la prolifération canine.
 
61 victimes de morsures ayant nécessité une intervention médicale depuis le début de l’année : avec ses 10 758 administrés la Perle du Pacifique fait face à un inquiétant problème de sécurité publique. D’autant que sur cet effectif de victimes, 20 sont des enfants, davantage sujets à des plaies à la tête ou au visage. Ainsi, le week-end dernier, une fillette de 10 ans a dû recevoir six points de suture après avoir été mordue lors d’une bagarre de chiens. En février, un autre enfant a failli perdre un œil dans des circonstances similaires.
“Ils ont tous une mère, mais tous n’auront pas un maître”. C’est le slogan choc mis en avant par l’association Animara qui œuvre depuis 2006 au bien-être animal sur l’île. Face au nombre préoccupant d’accidents impliquant les chiens, ces bénévoles défenseurs de la cause animale déplorent le manque de responsabilité des maîtres, qui laissent leurs animaux se reproduire et divaguer sans aucune surveillance. “Les accidents se produisent souvent au sein de la famille ou du quartier. Les chiens, en trop grand nombre, sont laissés libres de se promener comme bon leur semble, et c’est là que les accidents arrivent”, estiment Kiki et Feufeu, les deux bénévoles de l’association. “Nous faisons du porte-à-porte afin de sensibiliser la population et de proposer des solutions adaptées au cas par cas, mais cela reste difficile.”

Pourtant, depuis 2016, après l’attaque d’une touriste grièvement blessée par une meute de chiens, dont certains appartenaient à des races catégorisées dangereuses, une convention a été signée entre l’association Animara, la police municipale et la mairie. C’est dans ce contexte aussi que la municipalité a mis en place la procédure “Chien mordeur” afin d’être en mesure d’engager une action en responsabilité civile envers les propriétaires, même en l’absence de plainte de la part des victimes. Mais le dispositif ne se limite pas à cela : il comprend un volet de prise en charge des animaux impliqués ; des campagnes de prévention sont en outre régulièrement menées sur le principe du porte-à-porte par Kiki et Feufeu, les bénévoles de l’association Animara, pour promouvoir le recours à la stérilisation.  Chaque année, la municipalité dégage 9 millions de francs pour financer le dispositif Chien mordeur.

“Dès qu’un accident est signalé aux pompiers, la police municipale intervient et le chien responsable de l’accident est présenté aux vétérinaires pour une étude comportementale”, explique Steeven Geva, chef de la brigade de police municipale de Bora Bora. “Il est ensuite pris en charge par l’association pour être mis en chenil jusqu’à ce qu’il soit stérilisé et réévalué tous les deux mois, ou euthanasié, en fonction du résultat des tests.” Le Chef Geva est d’ailleurs un des quatre agents formés à intervenir dans la cadre de la procédure Chien mordeur. Le tāvana, de son coté, est en mesure de mettre en demeure le propriétaire de se plier à la procédure préconisée à l’issue de l’étude comportementale.
 
Stérilisation au tiers coûtant
 
De leur côté, les bénévoles de l’association Animara sont régulièrement mis à contribution pour vanter les bienfaits d’un recours à la stérilisation des animaux. Le refuge de l’association accueille aujourd’hui les chiens à l’adoption recueillis après abandon ou victimes de maltraitance. Cependant, les deux bénévoles, connus de tous dans l’île pour leur engagement et leur amour des animaux, se disent “usés par l’absence de réaction” de la population. “Nous pourrions stériliser 500 chiens par an, mais nous nous heurtons au refus des propriétaires, malgré des conditions financières très favorables : nous prenons en charge un tiers du prix de la stérilisation, les vétérinaires offrent un autre tiers, il ne reste que le tiers restant à la charge du propriétaire. Malgré cela, un grand nombre refuse, en particulier lorsqu’il s’agit de stériliser les mâles. Certains chiens ont la chance d’être adoptés par des touristes qui financent leur expédition dans leur pays d’origine, mais cela ne suffit pas à résoudre le problème.”

C’est pourtant la stérilisation qui semble la meilleure solution au problème des risques de morsure. Elle calme les animaux, surtout lorsqu’elle est pratiquée sur un jeune chien. Elle permet aussi d’éviter une surpopulation canine hors de contrôle, propice à la formation de meutes. “Le problème, c’est qu’il y a trop peu de plaintes même dans le cas de blessures graves”, analyse le Chef Geva. Et selon tous les partenaires du dispositif, c’est cet état de fait qui encourage les maîtres indélicats à poursuivre les adoptions ou à laisser se multiplier les portées sans égard pour les conséquences. Des propriétaires qui restent en outre très souvent difficiles à identifier. À Bora Bora aujourd’hui, le civisme et la prise de conscience des propriétaires d’animaux semblent nécessaires pour assurer la sécurité de tous et le bien-être des animaux.

Rédigé par Lucie Scarparo le Lundi 23 Octobre 2023 à 18:56 | Lu 2121 fois