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​Far West aux Tuamotu Nord


Tahiti, le 11 janvier 2022 - En mars 2021, un conseil municipal de Napuka a été quelque peu agité. Interventions de personnes extérieures, vote sur des délibérations non inscrites à l’ordre du jour ou encore séance continuant après avoir été clôturée par le tāvana qui avait quitté la salle. Des actes pas vraiment du goût du maire concerné, ni du haut-commissariat. Ils ont demandé au tribunal administratif de Papeete l’annulation des délibérations prises ce jour-là. Compte tenu des circonstances, le rapporteur public leur a donné raison.

Un maire qui sollicite l’annulation des délibérations de son propre conseil municipal, ce n’est pas commun. Surtout si cette demande est de surcroit appuyée par les services du haut-commissariat chargé notamment de vérifier la régularité de toutes les décisions prises par les assemblées délibérantes des communes. Il faut se plonger dans les circonstances exceptionnelles rencontrées par le tāvana de Napuka lors de la séance du conseil municipal du 12 mars 2021 pour comprendre la cocasserie de la situation.
 
Le SIVMTG s’invite
 
Réunis pour débattre des affaires de la petite commune paumotu de 284 habitants, les conseillers municipaux n’étaient pas seuls. Plusieurs agents du Syndicat intercommunal à vocation multiple des Tuamotu-Gambier (SIVMTG) étaient présents à l’initiative du maire délégué de la commune associée de Tepoto Nord. Des agents parmi lesquels le Directeur général des services (DGS) du syndicat, dont la nomination, sur laquelle pèse une ombre d’illégalité, a déjà été épinglée par le tribunal administratif il y a quinzaine jours. Cette présence n’est en soit pas interdite si elle ne perturbe pas les débats et permet même aux élus de disposer de quelques informations supplémentaires. Comme l’a rappelé le rapporteur public en séance ce mardi, ces personnes extérieures “ne peuvent en tout état de cause participer à la décision ou influencer les débats au sein du conseil municipal”. Et c’est là que le bât blesse.
 
Tāvana absent, les souris dansent
 
Le magistrat relève en effet que, selon le compte rendu de la séance concernée, le DGS “est intervenu de manière récurrente dans les débats, excédant la seule délivrance d’une information ponctuelle de nature à éclairer les membres du conseil municipal, allant même jusqu’à diriger les débats et à demander à sa mère, première adjointe, de présider la séance et de faire voter des délibérations non inscrites à l’ordre du jour alors que le maire avait levé la séance et quitté la salle, accompagné de la troisième adjointe”. Une affaire de famille doublée d’une forme de putsch qui avait surtout l’apparence d’un règlement de comptes à OK Corral. En effet, parmi les délibérations rajoutées dans le dos du tāvana figuraient celles lui retirant ses abonnements téléphoniques du maire, la prise en charge du billet d’avion du maire pour les déplacements et ses délégations de fonctions, lui interdisant de conduire tous les véhicules communaux ou encore portant élection des représentants de la commune au SIVMTG et au SPCPF. Le rapporteur public a conclu que, “dans ces conditions”, la présence du DGS du syndicat, “eu égard à l’influence qu’elle a exercée sur le cours des débats” a entaché d'irrégularité l’ensemble des délibérations prises au cours de cette séance et non pas les seules adoptées en l’absence du maire. Si les conclusions du magistrat sont suivies, pas moins de 29 délibérations seront annulées du fait de la présence d’un calife à la place du calife.
 

Rédigé par Sébastien Petit le Mardi 11 Janvier 2022 à 19:28 | Lu 3044 fois