​Aux assises, récit d'une nuit d'horreur


Tahiti, le 13 novembre 2023 - Le procès d'un maçon de 41 ans poursuivi pour un viol aggravé commis sur sa voisine s'est ouvert lundi devant la cour d'assises. L'accusé, qui avait agressé la victime en menaçant de la tuer avec un couteau de 20 cm, encourt vingt ans de réclusion criminelle au terme des deux jours d'audience. 
 
La troisième session de la cour d'assises pour l'année 2023 s'est ouverte lundi avec le procès d'un maçon de 41 ans accusé de viol aggravé, menaces de mort et violation de domicile, en présence de la victime, une jeune femme de 31 ans. Les faits s'étaient déroulés en plein milieu de la nuit du 1er août 2021 à Punaauia lorsque l'accusé, dont les parents habitaient à une centaine de mètres de la victime, s'était introduit dans le domicile de cette dernière après avoir démonté les louvres d'une fenêtre. Il avait saisi un couteau de cuisine doté d'une lame de 20 cm, avait pris un pull pour se recouvrir le visage et était entré dans la chambre de la jeune femme qui dormait. Il avait ensuite menacé de la tuer en lui apposant le couteau sur les flancs et lui avait fait subir des sévices sexuels. Il avait quitté la chambre pour aller couper l'électricité et était ensuite revenu à la charge. Se rendant compte que la victime, en état de choc, était au téléphone avec les gendarmes, l'individu avait quitté les lieux en laissant des traces de sang puisqu'il avait été blessé lorsque la jeune femme avait essayé de le désarmer. 
 
Placé en garde à vue, l'individu, un père de deux enfants qui venait d'être quitté par sa concubine, avait reconnu les faits en expliquant qu'il était “attiré” par la jeune femme lorsqu'il la voyait partir travailler. Il avait également avoué qu'il s'était déjà introduit à son domicile pour y mener une sorte de repérage. Le soir des faits, il avait tout à fait conscience qu'il allait “devoir forcer” la jeune femme en “l'absence de consentement”. Interrogé sur cette terrible agression au début de son procès lundi, le maçon a de nouveau reconnu les faits en indiquant : “J'assume”.
 
Antécédents judiciaires
 
Tel qu'il est d'usage à la cour d'assises, cette première matinée de procès a été consacrée à la personnalité de l'accusé, un homme ayant des problèmes avec l'alcool qui a déjà été condamné à plusieurs reprises pour des violences, notamment commises sur son ex-compagne et leur fils alors âgé de 18 mois. Alors qu'il est incarcéré depuis un peu plus de deux ans, la présidente de la cour a expliqué qu'en détention, le quadragénaire avait un “poste de confiance” dans lequel il donnait entière satisfaction à l'administration pénitentiaire. L'accusé a également assuré qu'il avait déjà commencé à indemniser la victime à hauteur de 5 000 francs par mois. 
 
Interrogé sur son parcours de vie, le maçon a raconté qu'il avait grandi dans une fratrie de neuf enfants à Raivavae avec des parents qui vivaient principalement de la pêche et de l'agriculture. Entendue à son tour, sa sœur et unique fille de la famille a dépeint une enfance dominée par la violence de leur père qui buvait beaucoup et frappait ses fils avec “tout ce qui pouvait lui tomber sous la main”. Éprouvée par cette audition devant la cour d'assises, elle a également expliqué que tous ses frères “buvaient comme des trous” et que l'accusé considérait les femmes comme des “objets”. 
 
Nuit d'horreur
 
Digne et courageuse, la victime – qui vit désormais en métropole – s'est avancée à la barre en début d'après-midi pour témoigner sur cette nuit d'horreur. “Je me suis réveillée, j'ai vu brièvement une ombre dans l'entrebâillement de la porte. J'ai demandé qui était là, la porte s'est ouverte en plus grand, il était là et a brandi son couteau en me disant ‘Arrête de crier ou je vais te tuer’.”
 
Effondrée, la jeune femme a expliqué à la cour qu'elle s'était dit que c'était “fini” pour elle et qu'elle ne “voulait pas mourir”. Interrogée sur les conséquences de cette agression, elle a ensuite raconté de longues nuits d'insomnie ponctuées par des réveils à l'heure à laquelle l'agression avait eu lieu. Alors que l'avocat général lui faisait remarquer qu'elle n'avait pas demandé de huis clos lors de cette audience – un fait assez rare pour être noté – la victime lui a fermement répondu : “Ce n'est pas à moi d'avoir honte”.
 
Le procès doit reprendre mardi matin avec l'audition des enquêteurs. 

Rédigé par Garance Colbert le Lundi 13 Novembre 2023 à 18:32 | Lu 9117 fois