​12 ans ferme pour le “prédateur”


Tahiti, le 8 juin 2024 – Les jurés de la cour d’assises ont condamné, vendredi soir, un retraité de 72 ans, notamment poursuivi pour viols sur mineures et recours à la prostitution de mineures, à 12 ans de prison ferme, soit une peine inférieure aux quinze ans de réclusion requis par l’avocat général. 
 
Au terme de trois jours de procès, les jurés de la cour d’assises ont condamné, vendredi soir, un homme de 72 ans qui était poursuivi pour des viols et agressions sexuelles sur mineures de moins de quinze ans, recours à la prostitution de mineures ainsi que pour de la détention et de l’offre de paka. L’individu a été reconnu coupable d’avoir, sur plusieurs années, commis des abus sexuels sur des mineurs qui se trouvaient, pour certaines, dans un état de déshérence familiale. Des faits en partie reconnus par l’accusé. 
 
Au commencement de ce troisième jour d’audience, vendredi, l’avocat des quatre victimes de cette affaire, Me Loris Peytavit, avait évoqué un “dossier particulièrement grave” dans lequel on trouve un septuagénaire, “ni sénile, ni idiot” qui avait affirmé devant des experts judiciaires puis devant un juge d’instruction que “les Polynésiennes sont toutes des cochonnes qui écartent pour de l’argent”. Des propos plus que choquants proférés à l’encontre de jeunes filles en “déshérence”. “En bon prédateur, il les a appâtées gentiment avec du paka, un peu de sous, la télé ou bien encore même du Coca Cola. Ce dossier est celui de la misère sociale avec des cellules familiales défaillantes. Ces victimes n’avaient tellement rien que cela représentait beaucoup à leurs yeux.” L’avocat a conclu sa plaidoirie en condamnant fermement le fait que l’accusé n’ait, dans le cadre de ce dossier, pas passé un seul jour en détention. 
 
“Juges d’un état de droit”
 
L’avocat général est pour sa part revenu sur l’âge et la situation personnelle des victimes, qui avaient pour la plupart moins de 15 ans à l’époque. “Il connaissait leur fragilité et seules les mineures ont fait l’objet de ses assauts et de ses pulsions. Elles ont aussi été choisies pour leur état de grande précarité et pour exploiter leur misère alors qu’elles n’étaient pas en capacité de réagir.” Avant de requérir quinze ans de réclusion criminelle à l’encontre de l’accusé, le représentant du ministère public a tenu à insister sur le risque de réitération établi, selon lui, par le fait que l’accusé avait avoué de manière “incomplète” et qu’il n’a que très peu suivi les soins imposés durant son contrôle judiciaire. 
 
Confrontée à la difficile défense d’un client au sujet duquel elle a elle-même reconnu qu’il lui inspirait du dégoût, Me Myriam Toudji a tenu à rappeler aux jurés lors de sa plaidoirie qu’ils étaient les “juges d’un état de droit”, ce qui les “oblige encore plus”. “Disons-le : c’est l’archétype du sale type mais l’on ne juge par une personne par rapport à son capital de sympathie.” L’avocate est ensuite revenue sur chacune des infractions reprochées à son client. Après avoir affirmé qu’il n’était pas “sérieux” de poursuivre aussi le retraité pour quatre plants de paka dans un dossier comportant des faits bien plus graves, Me Toudji a évoqué les viols reprochés au septuagénaire en expliquant que “la parole d’une victime, aussi importante soit-elle, ne pouvait servir comme unique base pour condamner quelqu’un”.
 
“Élément objectif”
 
L’avocate a également abordé la personnalité de son client, un homme né “au sortir de la guerre” d’une mère qui avait échappé aux camps de concentration et qui n’a pas eu une “vie très heureuse”. Pour conclure sa plaidoirie, elle a abordé l’âge de son client, un “vieillard” de 72 ans qui n’a jamais passé un jour en prison. “Si vous suivez ces réquisitions, c’est la mort civile pour lui mais c’est la mort, tout court, car il ne ressortira pas vivant de détention, vous ne pouvez pas balayer d’un revers de manche l’élément objectif qu’est son âge.”
 
Après en avoir délibéré, les jurés de la cour d’assises ont donc finalement condamné le septuagénaire à 12 ans de réclusion criminelle. Il devra verser un million de francs aux deux victimes de viols et 600 000 francs aux deux autres victimes de cette affaire. 
 
La cour d’assises reprendra lundi avec le procès d’un homme poursuivi pour avoir violé et frappé une cycliste à Raiatea.
 

Rédigé par Garance Colbert le Samedi 8 Juin 2024 à 09:52 | Lu 2320 fois