​“Rien ne montre une amélioration”


Tahiti, le 25 août 2021 – Augmentation massive des hospitalisations, record d'hospitalisations, de patients en réanimation et de décès en 24 heures… La situation sanitaire est loin d'être maîtrisée. “Il ne se passe rien de très significatif qui montre une amélioration”, constatent froidement les autorités sanitaires.
 
“S'il doit y avoir une décroissance du nombre des cas, ce n'est probablement pas pour demain matin”. Le ministre de la Santé, Jacques Raynal, a tenu mercredi le point presse désormais hebdomadaire destiné à commenter l'évolution de la situation sanitaire en Polynésie. A ses côtés, l'épidémiologiste Jean-Marc Ségalin et le responsable de la campagne de vaccination Daniel Ponia sont revenus avec le ministre sur les dernières données publiées par le bulletin épidémiologique hebdomadaire de la plateforme Covid du Pays. Des données “consolidées” à la date du mardi 22 août toujours aussi inquiétantes. Et même additionnées aux derniers chiffres diffusées mercredi, avec un nouveau record à 378 hospitalisations, dont 57 en réanimation et 25 décès en 24 heures, le Dr Ségalin a résumé sans détours la situation : “Il ne se passe rien de très significatif qui montre une amélioration”.
 
Hospitalisations “massives”
 
En résumé, la quasi-totalité des indicateurs sont dans le rouge, à l'exception de la progression de la campagne de vaccination toujours bien orientée. Les autorités sanitaires notent principalement une “augmentation massive” des admissions au Centre hospitalier, dans les hôpitaux de la Direction de la santé à Moorea, Uturoa ou Taravao et dans les cliniques privées Cardella et Paofai avec à chaque fois un “dépassement des capacités hospitalières initiales”. L'analyse des caractéristiques sociodémographiques des patients hospitalisées montre un pourcentage plus fort d'hommes que de femmes touchées, mais surtout une baisse de la moyenne d'âge par rapport à la première vague : 54,8 ans en moyenne aujourd'hui contre 59,7 ans lors de la première vague fin 2020-début 2021.
 
Mais surtout –“et c'est probablement l'élément majeur de cette présentation”, a insisté le Dr Ségalin– ces données arrêtées au 18 août dernier pour la seconde vague actuellement en cours montrent que 87,7% des patients hospitalisées étaient non vaccinés ou non totalement vaccinés. Un chiffre qui monte à 93,7% pour les patients admis en réanimation et à 86,4% pour les patients décédés des suites du Covid… “Pas la peine d'avoir fait des études épidémiologistes pour comprendre”, a insisté le Dr Ségalin. “On peut discuter de la vaccination. On peut avoir des doutes. Mais on ne peut pas douter des chiffres… Là, ça veut dire que quand on est vaccinés, on a dix fois moins de chances d'aller à l'hôpital”. Constat froid et empirique, mais qui a le triste mérite de refléter la situation réelle de l'effet de la vaccination au fenua.
 
“Il s'agit d'un problème individuel mais il s'agit aussi d'un problème collectif”, a poursuivi l'épidémiologiste. “Toute cette dépense d'énergie au profit de personnes qui auraient probablement pu échapper à cette hospitalisation va grever l'ensemble de nos capacités à soigner les gens et va probablement empêcher certaines personnes qui ont d'autres maladies de recevoir les soins qu'ils auraient reçu habituellement.”
 
Des courbes “quasi verticales”
 
Sur la progression de l'épidémie en Polynésie, difficile aujourd'hui de cerner la situation dans laquelle se trouve le fenua. Sur le nombre de cas, “les courbes sont quasi verticales”, a commenté l'épidémiologiste. La très grande majorité des cas sont évidemment localisés à Tahiti (6 615), mais au total 45 îles réparties sur les cinq archipels rapportaient des cas de Covid en début de semaine, avec des taux d'incidences très élevés sur l'archipel de la Société. L'âge moyen des cas confirmés est relativement jeune (36 ans) et les deux tiers des cas dépistés ont moins de 45 ans.
 
Le ministre de la Santé s'est refusé à toute “prédiction” sur l'atteinte du “pic” de la propagation épidémique, pourtant espérée dans les jours à venir. En revanche, il a indiqué avoir quelques éléments statistiques d'assez mauvaise augure pour l'après-crise et la future “décroissance” de la contamination. “Selon une probabilité, par rapport aux analyses de notre soutien épidémiologique à Melbourne, cette décroissance, qu'ils ont déjà observée dans d'autres pays, est une décroissance qui est relativement lente”. Conséquences sur une éventuelle prolongation du confinement au fenua ? Le ministre s'est également refusé à tout commentaire sur ce sujet. La décision sera sanitaire “et” économique. Redoutable équilibre.
 

Rédigé par Antoine Samoyeau le Mercredi 25 Aout 2021 à 21:10 | Lu 7476 fois