Union autonomiste en décalage


Tahiti, le 11 juin 2024 – Petit coup de théâtre dans le deuxième round de discussions autonomistes ce mardi matin à la mairie de Pirae. Ahip a proposé que chacun parte de son côté au premier tour des législatives anticipées, pour se regrouper au second. L'option retenue par le Tapura, Amuitahira'a et Ia Ora te Nunaa consiste plutôt à partir unis dès le premier tour en se partageant les trois circonscriptions. Deux stratégies pour un même objectif : “Faire gagner l'autonomie.” Ahip prendra une décision finale avec son conseil politique ce mardi soir. 
 
 
Le Tapura d'Édouard Fritch et Ahip de Nicole Sanquer ont discuté pendant deux bonnes heures ce mardi matin à la mairie de Pirae. Une première depuis les dernières élections territoriales. Nuihau Laurey, Nicole Sanquer et Tevaitea Salmon sont arrivés vers 8h30 et ont été reçus, comme les autres élus autonomistes la veille, par Édouard Fritch accompagné de Tepuaraurii Teriitahi et René Temeharo. Pour parler stratégie en vue des élections législatives anticipées du 29 juin et 6 juillet prochains.
 
Lundi soir, le conseil politique du Tapura a validé – non sans quelques grincements de dents – l'option proposée par Édouard Fritch de présenter un candidat Tapura, un Ahip, et un Amuitahira'a en se partageant les trois circonscriptions dès le premier tour de scrutin. “Aller annoncer que le plus grand parti va céder deux sièges sur trois, la gymnastique n'est pas facile”, a ainsi expliqué ce mardi Édouard Fritch qui a donc défendu cette thèse auprès de ses adhérents mais aussi devant les trois représentants de Ahip, ce mardi matin. Sauf que le parti de Nicole Sanquer a présenté une autre stratégie : que chacun parte de son côté au premier tour afin de compter ses troupes et donner la parole à la “population qui déterminera qui est le meilleur candidat autonomiste”.
 
Une nouvelle qui a “perturbé”, et même “secoué” Édouard Fritch et les deux autres leaders autonomistes (Gaston Flosse et Teva Rohfritsch) qui ne l'avaient visiblement pas vu venir. Chat échaudé craint l'eau froide. Et “pour l'avoir fait à plusieurs reprises”, Édouard Fritch “ne croit pas qu'un accord au second tour soit fructueux, ne serait-ce que parce que la campagne peut réserver des surprises”.
 
Gagner ensemble ou perdre séparément
 
Pour Nicole Sanquer, rien n'est définitif puisque la décision finale est entre les mains du conseil politique de Ahip qui doit se réunir ce mardi soir. Mais elle semble bien privilégier cette stratégie qui permettrait, selon elle, de “préserver l'unité et les valeurs de chaque parti”, tout en assurant qu'au second tour, “il y aura un regroupement pour que l'autonomie gagne”. Nicole Sanquer encourage d'ailleurs Amuitahira'a et Ia Ora te Nunaa à également présenter cette seconde option à leurs conseils politiques respectifs ce mardi soir. Ce qu'ils devraient faire, même si Gaston Flosse et Teva Rohfritsch sont sur la même longueur d'ondes qu'Édouard Fritch.
 
“Il faut faire attention parce que l'idée de se présenter au premier tour n'est autre que l'idée de se compter”, met en garde Édouard Fritch qui se demande si le jeu en vaut la chandelle aujourd'hui. “Être ensemble, c'est une garantie de gagner. Être dispersés c'est aussi une garantie de perdre”, martèle le patron du Tapura qui rappelle que les dernières territoriales ont placé les autonomistes en tête avec 80 000 voix devant les 64 500 voix des indépendantistes. En se mettant ensemble dès le premier tour, c'est presque l'assurance de s'éviter un second tour, argumente-t-il encore.
 
“Rechercher l'unité nécessite beaucoup d'efforts”
 
En revanche, ce serait oublier l'ADN de chaque parti autonomiste, plaide de son côté Nicole Sanquer. “Il y a une division au niveau de nos avis respectifs, il faut être clair”, dit-elle, expliquant par exemple qu'il sera hors de question de siéger avec la majorité macroniste à l'Assemblée nationale, ou encore que Ahip est totalement opposé à l'idée portée par Gaston Flosse de tendre vers un Pays associé. Mais “les réponses qu'Édouard Fritch nous a données nous ont pleinement satisfaits et c'est pour ça que nous continuons les discussions” a tempéré Nicole Sanquer renvoyant encore la balle à son conseil politique pour trancher.
 
“Je le redis, c'est vrai que rechercher l'unité nécessite beaucoup d'efforts, beaucoup de concessions, il faut renoncer à beaucoup de choses. Je suis prêt, le Tapura est prêt à renoncer à beaucoup de choses”, concède de son côté Édouard Fritch.
 
Et si Ahip décidait finalement de présenter ses propres candidats pour le premier tour, y aurait-il quand même une plate-forme à trois avec le Tapura, Amuitahira'a et Ia Ora te Nunaa'a ? Peu probable. Édouard Fritch ne l'envisage pas ainsi en tout cas et espère que la décision finale de Ahip ira dans le sens de l'unité car c'est elle “qui va nous faire gagner”

Rédigé par Stéphanie Delorme le Mardi 11 Juin 2024 à 17:10 | Lu 4469 fois