Unesco à Ua Pou : interrogations sur l'accès aux ressources


Ua Pou, le 20 juillet 2022 - Après avoir fait une tournée dans le Sud de l’archipel marquisien en mai, c’est au Nord d’avoir la visite de la délégation Unesco chargée d’aller à la rencontre de la population pour sonder ses peurs mais aussi pour répondre à toutes ses questions. Parmi elles, la gestion des ressources naturelles et culturelles, que certains habitants craignent de voir “sanctuarisées” en cas d'inscription au Patrimoine mondial.
 
C’est dans la foulée de l’inauguration de sa tournée officielle que la nouvelle navette, le Kaoha Tini a transporté la délégation Unesco depuis Nuku Hiva, où elle a entamé sa visite du Nord de l’archipel des Marquises. Onze personnes représentant la Direction de la culture et du patrimoine (DCP), la Direction de l'environnement (Diren), la Communauté des communes des îles Marquises (Codim), l’Office français de la biodiversité (OFB) ou encore la société de communication Tahiti Experts Event sont venues à la rencontre de la population pour entamer la dernière phase du dossier d'inscription au patrimoine mondial, qui consistera, entre autres, à réaliser dans un effort commun, un plan de gestion des ressources.
 
La particularité de ce dossier “complexe” est qu’il concerne une demande de labellisation pour un bien mixte, c’est-à-dire qu’il englobe les îles des Marquises dans leur entièreté, l’une ne peut accéder à la liste du patrimoine mondial sans les autres. Et cela fonctionne dans les deux sens : les îles ne peuvent rester sur la liste ne serait-ce que si l’une d’elles change d’avis. Individuellement cependant, elles sont toutes une valeur unique universelle (VUE), condition sine qua non à leur accession à la liste.

“Seule la population est en mesure de dire quelle est la réalité du terrain”

Pendant son séjour à Ua Pou, la délégation rencontrera des habitants des vallées les plus concernées par un zonage extensif, à savoir celles où les zones à classer englobent même le village, comme à Hohoi, vallée de la pierre fleurie. Anatauarii Tamarii, archéologue et agent de la DCP, explique l'importance de ces rencontres, car “seule la population est en mesure de dire quelle est la réalité du terrain. Nous sommes là pour faire comprendre quel est lobjectif de ce dossier et apporter des éléments clairs. Mais surtout pour permettre la transmission aux générations futures de la richesse naturelle et culturelle des îles Marquises.”
 
Mardi, jour de son arrivée, la délégation est partie à la rencontre du maire, de ses élus puis de la population de Hakahau. Au cours de ces rencontres, le dossier est présenté sous forme de résumé puis des ateliers participatifs s'organisent permettant un échange privilégié entre les membres de la délégation et la population.
 
À Hakahau mardi, six tablées d’une douzaine de personnes ont été composées et chacun a pu échanger autour des enjeux de l’île. Les préoccupations les plus récurrentes concernaient la protection des ressources terrestres (pierre fleurie, flore endémique), marines (poissons, crustacés), culturelles (conservations des pae pae), mais aussi l’impact du tourisme. Des questions ont également été posées sur l’impact de l’accession au label Unesco par rapport aux habitudes de consommation, certains Marquisiens craignant de ne plus avoir accès à certaines de ces ressources une fois le label Unesco obtenu (les œufs d’oiseaux sur les motu autour de l’île par exemple).
La population est sortie plutôt sereine de ces ateliers qui auront duré trois heures.
 
Mercredi sera consacré aux vallées de Hohoi et Hakatao et jeudi matin, le groupe se déplacera à Hakahetau, vallée des pitons et ses départs de randonnées mythiques, notamment celle qui mène au pied du pic de Poumaka.
 
Le dépôt de dossier aura lieu en janvier ou février 2023 mais c’est seulement en juin 2024 que la commission Unesco se réunira pour statuer en faveur ou non du classement des îles Marquises.


Rédigé par Eve Delahaut le Mercredi 20 Juillet 2022 à 16:55 | Lu 859 fois