Une soirée spéciale coups de cœur du Heiva ce vendredi


Marguerite Lai, ici chez elle, dans son atelier de création de costumes, vous attend ce vendredi pour une soirée exceptionnelle.
PAPEETE, le 21 juillet 2015 - A l'initiative de Marguerite Lai, une soirée spéciale coups de cœur du Heiva 2015 se tiendra place To'ata, ce vendredi. L'occasion de voir ou revoir la prestation de quatre groupes plébiscités par le public cette année mais pas forcément primés : Ori i Tahiti, Tamarii Pereaitu, Haururu Papenoo et O Tahiti E.


Bonne nouvelle pour tous ceux qui auraient manqué les performances de certaines formations lors de ce Heiva i Tahiti 2015, une soirée exceptionnelle est prévue vendredi 24 juillet, sur l'aire de To'ata. C'est le jeune groupe Ori i Tahiti qui ouvrira les festivités, puis ce sera au tour de Tamarii Pereaitu d'assurer le show, suivi de Haururu Papenoo (en chant) et enfin O Tahiti E. Au programme : l'intégralité des chorégraphies des troupes, soit quatre heures de prestations, de 19 heures à 23 heures.

Marguerite Lai, chef de O Tahiti E, est à l'origine de cet événement qui joue les prolongations : "Nous souhaitons satisfaire le public qui n'a pas eu l'occasion de tout voir le Heiva cette année, car la soirée avec O Tahiti E était vendue en trois jours. Et puis, un tiers de mon groupe n'est jamais monté sur la scène de To'ata, cela leur tient à cœur. Pour la soirée de vendredi, je suis contente, car la première tribune A était déjà à guichet fermé, lundi midi, en une demi-journée, sans publicité !". Terau Piritua, chef de Ori i Tahiti, a tout de suite accepté la proposition de Marguerite afin "d'amortir toutes les dépenses engendrées au cours du Heiva".

"O TAHITI E EST UN GROUPE CONTEMPORAIN"

Sans jeter de l'huile sur le feu, difficile de passer outre la polémique qui agite une fois encore le paysage culturel autour de ce Heiva ; le débat mérite d'être ouvert. Celle qui danse depuis l'âge de 14 ans et qui a créé O Tahiti E en 1986, livre son opinion : "Les groupes n'ont pas compris le point de vue du jury ; pour eux, c'était une sanction. Les jeunes d'aujourd'hui entendent toujours parler de moderne et de traditionnel, et souvent ils viennent me demander quelle est la différence. Ils n'ont pas connu Madeleine Moua (grande dame du 'ori Tahiti, dont le nom a été attribué au 1er prix de danse en Hura Tau, ndlr). J'essaie de leur expliquer que le groupe de Coco (Hotahota, primé cette année avec Temaeva, ndlr) est traditionnel alors que Les Grands Ballets sont modernes, par exemple. Pour ma part, je suis contemporaine, je vis le monde d'aujourd'hui ; dans ma troupe d'ailleurs, il y a tous les corps de métiers, c'est ouvert. J'inculque aussi aux nouvelles générations que la danse, ce n'est pas la culture, c'est une partie de la culture. La culture polynésienne, c'est la pirogue, la médecine, le ahima (four tahitien, ndlr), la façon de vivre du Polynésien du matin au soir, c'est un tout. Il faut que le jury nous dise ce qu'il attend et arrêter de prendre le public pour un imbécile".

Et Marguerite de poursuivre : "Mon spectacle était axé sur le thème "Te 'Anapa" ("L'éclat du navire de Teta"). Par exemple, pour symboliser la rivière en furie au Fare Hape de Papenoo, si je devais faire uniquement des alignements, ce serait ennuyeux… Le Heiva est un moment de joie, de fête, nous avons envie de rire de notre culture. Tous les pas de O Tahiti E étaient traditionnels. Je pense qu'en premier lieu, il faut que les chefs de groupes arrêtent d'être membres du jury. Manque-t-on à ce point-là de connaisseurs de la culture polynésienne ? De mon côté, je ne veux plus juger mes pairs, et je ne serai plus jamais membre du jury tant que O Tahiti E existera. Et puis, je suggère qu'on revienne à ce qui se faisait avant, c'est-à-dire décerner un prix en catégorie traditionnelle et un autre prix en création".

En outre, les chefs de troupes attendent avec grande impatience la fiche de notation et le compte-rendu du jury. "Nous demandons surtout à ce que le jury reçoive les groupes qui le souhaitent", explique encore Marguerite. Un sentiment partagé par le leader de la troupe naissante Ori i Tahiti, qui dit "respecter la décision du jury", mais souhaiterait "connaître ses faiblesses pour progresser". Terau confie encore : "Nous nous sommes inspirés des groupes des années passées et avons essayé de nous inscrire dans la mouvance traditionnelle. Nous dansons avant tout par amour et passion pour notre pays et notre jeunesse".

"LE REGLEMENT N'EST PAS CLAIR"

Après avoir obtenu le 3e prix du Meilleur orchestre création, "une sucette" selon elle, Marguerite Lai nous fait part de son incompréhension sur la pénalité de dix points reçue en raison de l'effectif trop important de son groupe : "Aux premières répétitions, nous étions 320 artistes, donc il a fallu que je fasse plusieurs sélections et finalement, nous étions 232 personnes, avec 218 danseurs et 14 musiciens. Le jury nous a mis une pénalité, mais le règlement n'est pas clair". Après nous être procuré le règlement, il apparaît que "l'effectif comptabilisé par l'organisateur doit être celui des artistes présents sur scène", et être compris entre "60 et 120 danseurs, et 12 et 40 musiciens", ce qui fait un total de 72 à 160 artistes. Plus loin, il est stipulé que "le groupe qui ne présente pas l'effectif minimal requis s'expose aux sanctions suivantes : une pénalité financière de 1/72e par personne manquante et une pénalité de dix points". Le texte précise enfin : "Le nombre de figurants n'entre pas en en compte dans l'effectif des artistes". Même en maîtrisant la langue de Molière, avouons que cela ne sonne pas comme une évidence…

Quant au regard qu'elle pose sur les jeunes groupes qui se sont produits cette année à To'ata pour la première fois, elle partage son expérience : "Qu'ils continuent à venir au Heiva, c'est très bien. Gagner le Heiva est une chose, durer en est une autre. O Tahiti E a remporté le 1er prix en 1997 et en 1998 ; nous avons eu le 2e prix (traditionnel) en 1999 ; le 1er prix en 2005 ; le 3e prix en 2009 ; le 1er prix encore en 2012 ; et… "out" en 2015 (rires) ! O Tahiti E ne participe au Heiva que tous les trois ans, nous serons de retour donc en 2018. N'oublions pas qu'il faut aimer ce que ce que l'on fait".

En attendant, la magie du Heiva continue donc avec cette soirée de rattrapage vendredi, mais aussi à travers le Mini Heiva à l'InterContinental (du 23 juillet au 1er août) et Te Hura Nui au Méridien Tahiti (du 7 au 21 août), qui accueilleront notamment O Tahiti E, respectivement les samedi 25 juillet et samedi 15 août, et Ori i Tahiti les jeudi 23 juillet et samedi 8 août.

Photo : TFTN
Infos pratiques

Vendredi 24 juillet, à partir de 19 heures
Tarifs : 2 000 Fcfp (tribune A) et 1 500 Fcfp (tribunes B et C)
Billets en vente à Carrefour Punaauia & Arue et Radio 1

Rédigé par Dominique Schmitt le Mardi 21 Juillet 2015 à 16:34 | Lu 1400 fois