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Une petite poêlée du Bois de Boulogne pour le dîner?


Paris, France | AFP | vendredi 08/09/2017 - Ils trouvent notre alimentation monotone et ultratransformée. En basket, K-Way et sac à dos, des "cueilleurs urbains" s’apprêtent à explorer les fourrés du Bois de Boulogne pour y débusquer des plantes sauvages qu'ils rêvent de cuisiner.  
"Les plantes sauvages comestibles et médicinales font partie de notre patrimoine, mais sont tombées dans l'oubli", regrette Christophe de Hody, un naturopathe à la tête d'un petit groupe de cueilleurs débutants. 
Pour remédier à cette amnésie collective, ce spécialiste des plantes sauvages propose depuis cinq ans des "balades cueillette" dans les parcs et forêts de l'Ile-de-France avec un objectif: faire redécouvrir ces plantes "longtemps dénigrées" et aujourd'hui malheureusement "remplacées par des aliments raffinés ou venus de l'autre bout du monde".
Son public est sérieux, les questions techniques: "J'aimerai bien trouver une molène !" (plante médicinale), "Moi, une bardane ", "On peut faire de la tisane avec la benoite urbaine ?".
Alliant la tendance du retour à la nature et la mode du manger sain et local, la cueillette urbaine fait des adeptes. Aux Etats-Unis, et notamment à Central Park à New York, l'engouement est tel que les autorités rappellent régulièrement que ce hobby est interdit et que les parcs publics ne sont pas des "garde-mangers collectifs".   
Mais en France, ces cueillettes sont tolérées si elles restent destinées à une consommation personnelle assure Christophe de Hody qui, déjà petit, grignotait les plantes de la vallée de Chevreuse. 
Devant son auditoire, essentiellement féminin, il égrène une alliaire. Ses feuilles ressemblent aux orties mais ont le goût et l'odeur de l'ail. A cette époque de l'année, il ne reste plus que les graines brunâtres au bout des tiges. 
"Goutez ! ça monte aux nez", s'amuse-t-il, vantant les mérites de ces graines, de vrais "exhausteurs de goût". 
 

- Chénopodes à l'huile d'olive -

 
"Des fois ce que l'on goute nous semble un peu fort, on n'est pas habitué", admet Sylvie, une enseignante d'art corporel. Regrettant que notre monde aseptisé n'offre que peu de variété de goûts, elle raconte avoir déjà cuisiné des Chénopodes, une plante à feuilles en forme de patte d'oie, d'un vert blanchâtre. 
"Avec un peu d'huile d'olive et de sel, c'est délicieux", assure la jeune femme.
Le petit groupe progresse lentement. Christophe de Hody déterre une grosse racine. "L'odeur vous fait penser à quoi ?". "Au bacon fumé ?", "au radis ?" ... "Il faut bien écraser les racines, sinon vous ne sentirez que l'odeur de la terre", explique le trentenaire barbu.
Finalement c'est Célia qui trouve la bonne réponse: la racine sent le clou de girofle et elle appartient à une benoite urbaine. "On a tous besoin de se reconnecter, de se réapproprier la nature", explique la gagnante qui repart avec la racine dans son sac. 
Avec son trophée, elle pourra parfumer son pain d'épices ou son jus de pomme bio et profiter des propriétés astringentes, antidiarrhéiques et stomachiques de la plante. 
La pluie tombe maintenant à torrents et couvre le bruit des voitures, l'odeur de la terre emplie les sous-bois. Capuches ou parapluie au dessus de la tête, les participants sont toujours aussi appliqués. "Il n'y a pas de problème de temps, c'est juste une question d'équipement", s'amuse le guide qui avec sa veste en laine bleu et ses chaussures de cuir est de loin le moins bien équipé.
"Je pense que les gens ressentent le besoin de prendre leur temps, d'observer", explique-t-il. "Ils ont envie de se balader dans la nature, pour se faire du bien, pour déstresser" et "de revenir à des choses plus simples, plus qualitatives". Ses sorties et ateliers affichent souvent complets. 
"Avant de participer à ces balades, je n'avais jamais remarqué toutes ces petites plantes. Maintenant je les vois partout !", s'enthousiasme Sylvie visiblement sous le charme de ce "jardin à ciel ouvert".

le Vendredi 8 Septembre 2017 à 03:48 | Lu 418 fois