Une carte pour surveiller la flotte de pêche chinoise en Polynésie


Le parcours de 10 bateaux de pêche chinois pendant le dernier mois. Ils sont en ce moment à quai à Papeete.
PAPEETE, le 18 mars 2019 - Grâce au site Global Fishing Watch, tout un chacun peut suivre à la trace les bateaux de pêche en activité dans notre région. Nous avons retrouvé les bateaux de la flotte chinoise à quai à Papeete.

Le site Global Fishing Watch a été créé par des ONG voulant alerter l'opinion sur la surpêche dans le monde. Il permet de suivre à la trace 60 000 bateaux de pêche industrielle dans le monde grâce à leurs balises de position (même s'il y a parfois certains "trous" suspects dans la couverture des itinéraires de ces bateaux). Nous vous en parlions déjà en 2017.

Nous l'avons utilisée pour retracer le parcours de 10 bateaux chinois venus s'amarrer au quai de Papeete ces derniers jours. Nous les avons suivis sur le dernier mois, ce sont les captures d'écran ci-contre. Ce qu'on voit c'est que ces bateaux, appartenant sans doute à la même flotte, étaient en pleine campagne de pêche à l'Est de notre ZEE, puis qu'ils ont décidé de venir à Papeete il y a huit jours. La carte montre bien que - au moins ces bateaux-là - ont pris une ligne droite ininterrompue de l'extérieur de notre ZEE jusqu'à arriver au large du port.

Leur comportement au large du port de Papeete. Les bateaux semblent surtout être en train d'attendre, certains coupant même leurs moteurs et partant à la dérive.
Une fois au large de Tahiti la situation est plus compliquée, avec des bateaux qui semblent rester stationnaires, voire dériver, pendant plusieurs heures. Ce qui correspond aux explications du Port autonome selon qui ils attendaient qu'une place se libère.

Leur parcours ne correspond pas aux schémas de pêche palangrière. En illustration ci-dessous, nous vous avons joint le trajet d'un bateau polynésien en pleine campagne de pêche aux Tuamotu. On voit clairement qu'il lâche ses lignes dans l'océan, puis qu'il doit faire demi-tour et retracer exactement ses pas pour récupérer ses prises. Un comportement si typique qu'il est impossible à rater. Donc même si la carte montre bien un ou deux demi-tours suspects des bateaux chinois, avec leurs cales pleines et plusieurs années de mer pour certains de ces bateaux, il semble douteux qu'ils se soient amusés à prendre tant de risques quelques heures avant d'arriver à quai. Il s'agit peut-être tout simplement d'une dérive naturelle pendant leur temps d'attente.

Si Global Fishing Watch semble donc innocenter la flotte chinoise des accusations de "piller" notre ZEE, elle montre tout de même bien comment l'océan Pacifique dans son ensemble, surtout les eaux internationales, est victime d'une pêche industrielle intensive qui réduit très rapidement les stocks de poissons. Des projets comme les grandes Aires Marine Protégées des Marquises et des Australes visent justement à préserver cette ressource pour l'avenir.


Pour comparer, un bateau Polynésien en pleine campagne de pêche à la palangre aux Tuamotu. On remarque bien le comportement typique d'un palangrier en activité : lâcher ses lignes puis retracer ses pas pour récupérer ses prises.

Tous les 32 bateaux chinois identifiés autour de notre ZEE ce dernier mois. Leurs balises sont parfois étrangement interrompues... Malgré tout on voit que leurs efforts de pêche se concentrent à l'Est et au Nord de nos eaux territoriales.

Rédigé par Jacques Franc de Ferrière le Lundi 18 Mars 2019 à 16:02 | Lu 17754 fois