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Un surendetté sur trois en Polynésie ne peut pas s’en sortir


Un surendetté sur trois en Polynésie ne peut pas s’en sortir
PAPEETE, jeudi 17 octobre 2013. Le dispositif de surendettement des particuliers mis en place en Polynésie depuis la fin de l’année 2012 montre une aggravation de la situation économique locale pour ceux qui sont le plus en difficulté. Derrière les dénominations administratives se cachent des réalités très dures à vivre pour ceux qui les subissent. «Compte tenu de la situation financière très dégradée d’un certain nombre de ménages, un tiers des dossiers recevables ont été orientés vers une Procédure de rétablissement personnel, qui aboutit à l’effacement de la totalité des dettes en contrepartie d’une liquidation des actifs, quand ils existent» précise le rapport d’activité de la commission de surendettement présenté par l’IEOM (l’institut d’émission d’outre-mer) et la DGAE (direction générale des affaires économiques).

Cela signifie que pour un ménage sur trois dont le dossier a pu être instruit devant la commission de surendettement polynésienne (qui travaille depuis septembre 2012), la situation a été jugée irrémédiablement compromise : la commission estime qu’il est impossible de mettre en place un plan qui permettrait un apurement d’au moins une partie des dettes, et que même, dans l’avenir, la capacité de remboursement de ce débiteur a peu d’espoir d’augmenter de manière significative. C’est la preuve que la pauvreté de ces familles va perdurer dans le temps. Au regard du rapport présenté ce mercredi à l’assemblée de Polynésie française, cette situation difficile des familles les plus démunies en Polynésie, va même en s’accentuant car depuis au cours du 3e trimestre 2013, la part des dossiers de surendettement qui se solde par cet apurement complet des dettes privées est passée à 47%, presque un dossier sur deux !

Quand la situation le permet, une partie des dettes du débiteur est toutefois liquidée par la vente de biens. Quand il n’y a pas de biens à vendre, le juge prononce un effacement de toutes les dettes sans espoir pour les créanciers de recouvrer quoique ce soit. En revanche, à partir de cette date, le surendetté est inscrit au fichier national des incidents bancaires pour cinq ans. «Nous avons eu deux situations où des maisons ont pu être vendues pour payer une partie des créanciers, mais dans la très grande majorité des cas il n’y a aucun bien, aucun actif réalisable» détaille Pierre Yves Le Bihan de l’IEOM.

Après cette procédure et l’effacement des dettes, «il y a un vrai soulagement car ces personnes sont enfin allégées des poursuites qui pesaient sur elles depuis des années de la part des créanciers, les risques d’expulsion. Les dettes que nous voyons sont très anciennes, des arriérés accumulés de loyers impayés, de factures d’eau ou d’électricité» poursuit Pierre Yves Le Bihan. Et il précise, «dans neuf cas sur dix ce sont des accidents de la vie : la perte d’un emploi, la séparation d’un couple. Il n’y a pas eu de mauvaise gestion des ressources familiales mais une impossibilité de faire face aux besoins». L’effacement des dettes lève une angoisse certaine pour ces personnes mais ne garantit pas une vie meilleure dans l’avenir : les difficultés à trouver des ressources financières étant toujours présentes. Au-delà de ces cas très lourds, les deux tiers des dossiers de surendettement traités en Polynésie se sont soldés par des procédures plus classiques avec des plans de remboursement à l’amiable ou des mesures imposées.

Après cette première année de fonctionnement, la Commission de surendettement va s’attacher à mieux faire connaître son existence. Sur 625 débiteurs reçus, seuls 82 dossiers ont été finalement instruits, un résultat décevant, au regard des 5 000 familles vivant en-dessous du seuil de pauvreté sur le territoire. «Il faut que les élus informent leurs administrés de l’existence de ce dispositif en Polynésie et que les travailleurs sociaux puissent mieux l’expliquer et accompagner les surendettés» précisait encore Pierre Yves Le Bihan.

Rédigé par Mireille Loubet le Jeudi 17 Octobre 2013 à 15:07 | Lu 2178 fois