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Un pédophile de 74 ans condamné à 3 ans de prison ferme


"Et l'on n'a pas su gérer les pertes de repère absolues entraînées par les abus sexuels dont elle avait été victime."
"Et l'on n'a pas su gérer les pertes de repère absolues entraînées par les abus sexuels dont elle avait été victime."
PAPEETE, le 12 octobre 2017 - L'homme, inconnu de la justice, rabattait de jeunes adolescentes devant leur lycée pour avoir des relations sexuelles tarifées avec elle.Ce matin, il était jugé pour des faits de "corruption, recours à la prostitution et agression sexuelle" sur des mineurs de moins de 15 ans.

C'est une affaire particulièrement sordide qui était, ce matin, jugée au tribunal de Papeete. Un individu de 74 ans était poursuivi pour avoir, entre 2014 et 2016, fréquemment ramené de très jeunes filles à son domicile où il avait des rapports sexuels avec elles en contrepartie de modiques sommes d'argent.

RABATTAGE

L'enquête avait été menée par la gendarmerie
L'enquête avait été menée par la gendarmerie
Les faits remontent au début de l'année 2016. A cette époque, le procureur de la République reçoit un signalement indiquant qu'un homme âgé vient très souvent aux environs d'un lycée de Taravao à bord de son véhicule. Les équipes enseignantes voient de jeunes filles monter dans sa voiture. L'une d'entre elles étant, par ailleurs, signalée par le corps éducatif en raison de son attitude particulièrement "dévergondée" et des différents témoignages selon lesquels elle aurait eu des rapports sexuels avec le vieil homme. Lors des perquisitions effectuées au domicile de ce dernier, une belle maison avec piscine, les enquêteurs découvrent des fichiers pédopornographiques sur l'ordinateur de l'individu qui a tout de même utilisé un logiciel de cryptage pour, selon ses dires, "ne pas que son fils tombe dessus." Les investigations permettent d'établir que l'homme a, tout d'abord, eu des rapports sexuels avec l'adolescente de 14 ans dont le comportement interpellait les enseignants du lycée. Pour quelques milliers de francs, il l'amenait chez lui, la faisait boire puis se livrait à des actes pédophiles. Ensuite, il semble que la jeune fille soit revenue avec certaines de ses camarades. Elle touchait alors 1000 ou 2000 Fcfp de plus. Si le terme de "rabatteuse" a pu être employé, il apparaît surtout que cette adolescente était, au regard de son parcours de vie, dans une situation de prise de risques et de révolte. Le président du tribunal a évoqué "une enfant qui, dès le début de son existence, a vécu dans les pires conditions. Ballotée de foyer en foyer, violée à deux reprises par son grand-père, elle n'avait pas d'assise familiale, ressentait un fort sentiment abandonnique. Et l'on n'a pas su gérer les pertes de repère absolues entraînées par les abus sexuels dont elle avait été victime."

Comme tous les prédateurs, le septuagénaire utilisait un stratagème bien rodé dans lequel il proposait d'abord aux victimes de venir chez lui pour faire le ménage puis, il en arrivait à leur proposer des relations sexuelles tarifées. Certaines avaient, alors, accepté. Ce matin, lors de l'audience, cinq d'entre elles s'étaient constituées partie civile. L'homme, âgé de 74 ans, s'est présenté à la barre avec une chemise parfaitement repassée. Devant le juge d'instruction, le pédophile avait reconnu les rapports sexuels mais pas la contrepartie financière. Hier, face au président du tribunal, il s'est montré beaucoup moins catégorique, expliquant que toute cette histoire lui était tombée dessus, qu'il n'avait pas eu de chance le jour où il avait accepté de recevoir la première adolescente chez lui. Chacun aura apprécié cette grande perversité, le président du tribunal allant même jusqu'à ironiser: "si je comprends bien monsieur, dans cette histoire, vous êtes la victime."

C'est ensuite le parcours du prévenu qui a été évoqué par le tribunal. Retraité aisé, cet ancien entrepreneur est père de deux enfants. Il était inconnu de la justice hormis pour avoir signalé le comportement de sa propre fille qui, selon lui, avait une vie trop dissolue. Triste et inquiétant paradoxe. Pour sa défense, l'individu a expliqué qu'il n'avait jamais, au cours de sa vie, fait de mal à personne. L'audition de son ex-femme a toutefois révélé qu'il vivait dans une sorte de "dépravation sexuelle", l'obligeant à regarder des films pornographiques lors de leurs rapports sexuels. Témoignage renforcé par l'expertise psychiatrique dans laquelle l'homme est décrit comme ayant, "de nettes tendances pédophiles où la stratégie de recrutement n'est pas banale." Le médecin évoque également un "risque de récidive important du fait de la potentielle émergence d'une détérioration sénile qui abaisserait encore plus le contrôle de soi."

Evoquant un dossier "sans failles" , le procureur de la République a requis une peine de cinq ans d'emprisonnement dont deux ans avec sursis et mise à l'épreuve ainsi qu'une obligation de soins. Sans surprise, le tribunal, après en avoir délibéré, a suivi les réquisitions du ministère public. Puisque l'homme a déjà effectué 15 mois de détention provisoire et qu'il bénéficiera des remises de peine, il sera remis en liberté dans moins d'un an. L'audience aura duré deux heures. Le prévenu n'a émis aucun remord.

Rédigé par Garance Colbert le Jeudi 12 Octobre 2017 à 15:52 | Lu 6966 fois