Un contrat de projets Etat/Pays/communes à 13,2 milliards


Réunion de l'atelier sur le contrat de projets Etat/Pays/communes ce vendredi à la Présidence.
PAPEETE, le 12 décembre 2014. La prochaine mouture du contrat de projets pour les années 2015 à 2020 aura la particularité, en Polynésie française, de se décomposer en deux parties. Un contrat de projet de forme classique est conclu entre l'Etat et la Polynésie française doté de 36 milliards de Fcfp, mais un second contrat de projets associant l'Etat, le Pays et les communes, réservé à des opérations uniquement communales est prévu : il sera doté de 13,2 milliards de Fcfp. Les discussions sur ce contrat de projet communal ont déjà démarré et ont défini les thématiques retenues qui aborderont uniquement les investissements à prévoir pour la fourniture de l'eau potable, l'assainissement ou encore la gestion des déchets : des compétences attribuées aux communes de Polynésie depuis l'adaptation du CGCT (code général des collectivités territoriales) aux communes polynésiennes.

Trois obligations des communes ont été inscrites dans le CGCT à la charge des communes avec comme date butoir celle du 31 décembre 2011 pour la gestion des déchets, celle du 31 décembre 2015 pour la fourniture d'eau potable à tous les administrés et celle du 31 décembre 2020 pour l'assainissement. Or, la gestion des déchets est loin d'être assumée par toutes les communes polynésiennes, la distribution de l'eau potable n'est actuellement effective que très partiellement, en 2012, 13 communes seulement avaient un taux de conformité supérieur à 90 % (dont 5 à 100 %). En matière d'assainissement la capitale du Pays, Papeete est à peine en train d'achever la construction d'une vaste station d'épuration à Fare Ute (sur le remblai de Papeava) qui ne traitera les eaux usées que de 12 000 personnes, soit moins de la moitié de la population résidente de la ville.
Bref, le constat est fait que sur leurs obligations réglementaires, les communes polynésiennes sont à la traîne et que les investissements nécessaires pour rattraper ce retard est considérable."L'obligation de livrer de l'eau potable pour les communes coûte énormément cher. Nous sommes entourés d'eau, nous avons beaucoup d'eau mais la rendre potable et la transporter nous coûte beaucoup d'argent" explique le président Edouard Fritch, également maire de Pirae. En matière d'assainissement, c'est pareil, les réseaux d'eaux usées sont à construire de A à Z et les unités de traitement aussi. A titre d'exemple, Papeete prévoit d'investir 12 milliards de Fcfp sur 15 ans pour arriver au bout de ses équipements de traitement des eaux usées.

C'est donc pour donner un coup de pouce efficace envers les communes que ce contrat de projets, qui leur sera réservé pour les cinq années à venir, prévoit de financer exclusivement les investissements à réaliser dans ces domaines particuliers. Car, même si le président Edouard Fritch a commencé à négocier avec l'Etat de repousser à 2020 l'ensemble de ces obligations communales –demande relayée depuis par les sénateurs- il va bien falloir se mettre à travailler sur ces problématiques "environnementales". Le Haut commissaire, Edouard Beffre a été très clair à ce sujet, ce vendredi matin, lors de la réunion organisée par la présidence de la Polynésie avec les tavana des 48 communes polynésiennes. "Il pourrait y avoir un report des délais sur ces obligations (…) mais allongement des délais ne dit pas qu'il ne faut rien faire" prévenait le représentant de l'Etat. "Report ne veut pas dire report ad vitam aeternam. Il y aura quand même des délais et les communes devront se mettre en position d'y parvenir. Nous voyons bien que les communes ont devant elles de grosses dépenses à faire, sur l'eau, sur les déchets, sur l'assainissement. Certaines ont franchi le pas, d'autres doivent encore le faire et si nous dédions pas une partie importante des crédits dont nous disposons, il y aura des difficultés (…) C'est pourquoi, on veut avec le contrat de projets et avec le Pays les aider pour y parvenir" poursuivait Lionel Beffre.

Les nouvelles règles du contrat de projets réservé aux communes

Pour ce contrat de projets sur la période 2015-2020 réservé aux communes polynésiennes de nouvelles règles ont été établies. Les financements ne seront délivrés que pour de "grosses opérations" dont les montants dépassent les 15 millions de Fcfp (en deçà de ce seuil les financements passeront par le FIP (fonds intercommunal de péréquation). L'enveloppe prévisionnelle de 13,2 milliards de Fcfp se décompose par une participation de 6 milliards de Fcfp de l'Etat et l'apport de la même somme par le Pays. Le solde (entre 5 à 15%) selon les projets représentera la part communale au financement.

Par ailleurs les taux de subvention accordés sont modulés en fonction de la taille de la commune.

- Pour les communes de moins de 1 000 habitants le taux de subventionnement atteindra 95% du projet d'investissement à réaliser en TTC (toutes taxes comprises). Il ne restera que 5% du projet à financer par la commune elle-même ;
- Pour les communes de 1 000 à 5 000 habitants, le taux de subventionnement sera de 90% TTT ;
- Au-delà de 5 000 habitants, le taux de subventionnement est fixé à 85% TTC, la commune devant assumer à sa charge 15% du coût du projet.

Une répartition qui permettra de répartir en trois tiers quasi identiques les 48 communes de la Polynésie française.

A Makemo, les 1500 habitants du village de Pouheva et des environs peuvent désormais trouver refuge dans cet abri de survie, en cas de marée cyclonique ou de tsunami.
La construction des abris de survie à la recherche de financements

Au cours du dernier contrat de projets entre l'Etat et la Polynésie qui s'achève cette année, la construction des abris de survie a eu la part belle. Au cours du contrat de projets 2008-2014 la construction ou la réhabilitation d'abris de survie sur 41 atolls (permettant de protéger plus de 15 000 personnes) était programmée pour faire face aux changements climatiques touchant les habitants des atolls, principalement dans les Tuamotu. Ce programme de construction/extension/réhabilitation des abris de survie –qui servent également de bureaux pour la mairie, pour l'infirmerie ou d'école pour la municipalité concernée, a monopolisé une grande partie des crédits disponibles du contrat de projets qui s'achève. Non seulement parce qu'il y avait une urgence de sécurité des personnes en la matière, mais aussi parce que d'autres programmes ont piétiné, tels que le logement social.

Toutefois, la construction ou reconstruction d'abris de survie sur le territoire n'est pas achevée au terme des six ans du précédent contrat de projets Etat/Pays 2008-2014. Pour le poursuivre, il aurait fallu accepter que la moitié des crédits réservés aux communes dans le nouveau contrat de projets Etat/Pays/communes servent à ce programme de construction des abris de survie. "Il faudra trouver de nouvelles sources de financement" a admis le président Edouard Fritch. Le haut commissaire Lionel Beffre n'a pas dit autre chose, "la construction des abris de survie est importante, certes, mais on ne peut pas consacrer 50% de crédits pour des communes qui ne représentent que 10% de la population. Il faut trouver de nouveaux financements". L'une des pistes est celle du programme Rescue développé par l'Agence française de développement. Dans son discours à Nouméa, le 19 novembre dernier devant la Communauté du Pacifique Sud (CPS), le président de la République François Hollande annonçait que le programme Rescue mobilise 11 millions d'euros (1,3 milliard de Fcfp) pour "la coopération régionale en vue de la restauration des services écosystémiques et d'adaptation au changement climatique". Avec cette somme on est loin toutefois des 6 milliards de Fcfp nécessaires pour les seules opérations à réaliser en Polynésie française.

Rédigé par Mireille Loubet le Vendredi 12 Décembre 2014 à 12:59 | Lu 1386 fois