Un an sur l'atoll de Clipperton, l'incroyable défi d'un greffé du cœur


PAPEETE, le 10 novembre 2016 - Francis Gazeau, 73 ans, a été greffé du cœur il y a plus de 10 ans. Pour remercier son donneur et sensibiliser le public aux dons d'organes, le septuagénaire part à l'aventure chaque année, perdu dans l'immensité du Pacifique. Depuis trois ans, Francis Gazeau se prépare à vivre un an sur l'atoll de Clipperton, mais tout ne se passe pas comme prévu.

Long cheveux poivre et sel ramassés en couette, barbe de plusieurs jours, chemise à fleur, short, baskets, Francis Gazeau a tout du parfait Robinson Crusoé. "D'habitude, je n'ai pas une barbe aussi longue. Mais je reviens d'un atoll où j'ai vécu plusieurs mois, alors forcément, je n'ai pas pu me raser", se justifie l'aventurier.

Depuis trois ans, Francis Gazeau prépare une nouvelle expédition : vivre pendant un an sur l'atoll de Clipperton. Cet île basse appartient à la France et se situe près des côtes d'Amérique centrale et du sud. Dessus : rien, hormis la faune et la flore locales. Alors, pourquoi se lancer ce défi? Francis Gazeau, 73 ans, a reçu une greffe de cœur il y a 12 ans. "Tous les ans depuis 30 ans, je passe quelques mois sur des petits motu. C'est ma façon de dire merci à mon donneur et de sensibiliser les gens au don d'organes. Je veux leur montrer que, même greffé du cœur, on peut vivre tout à fait normalement."

A chaque fois que l'aventurier part vivre en naufragé, il réalise un documentaire de près d'une heure. Deux ont déjà été tournés. Il souhaite en réaliser un dernier en se rendant un an sur Clipperton. Ces films seront ensuite projetés par le protagoniste en métropole. "Je veux faire un tour de France de conférences pour sensibiliser au don d'organes et montrer ce que j'ai fait."

Francis Gazeau a tout prévu pour cette nouvelle aventure. Il rejoindrait l'île et en reviendrait avec un bateau de l'armée qui y part en expédition chaque année. Une fois là-bas, il pourrait vivre en parfaite autonomie grâce à son expérience de plusieurs années en milieu tropical. "Il y a beaucoup d'oiseaux, je peux manger des oiseaux par exemple. Ou encore, quand il fera beau, j'irai pêcher et je ferai des réserves pour trois ou quatre mois. Et puis, je n'ai pas de problème avec la solitude. Je sais parfaitement la gérer. Je suis un solitaire…"

Francis Gazeau s'est aussi donné comme mission de planter 3000 arbres sur l'atoll pendant l'année. Il espère ainsi pouvoir participer à des études scientifiques. "J'ai pris contact avec plusieurs chercheurs pour leur proposer mon aide et observer comment redonner vie à un atoll par exemple. Je leur propose de faire gratuitement, pendant l’année où je suis là-bas et de leur rendre compte de mes observations…" Par sa présence, il propose aussi d'appuyer la souveraineté française dans un territoire contesté par le Mexique. " Je pourrais être là, installer le drapeau français et faire un peu de surveillance, car c'est une zone riche en thons. Beaucoup de gens viennent pêcher de manière totalement illégale…"
Malgré un plan bien rôdé, tout ne se passe pas comme il le voudrait.

"LE RISQUE ZÉRO N'EXISTE PAS"

Francis Gazeau lors d'une traversée à pirogue à voile.
Depuis le lancement de son projet, Francis Gazeau se heurte à plusieurs problèmes. Pour obtenir un passe-droit sur le bateau de l'armée, le septuagénaire doit contracter une assurance. Chose qu'il a bien du mal à trouver. "L'armée me demande de prendre une assurance rapatriement mais pour le moment, je n'ai trouvé aucune compagnie d'assurance qui veut bien m'en délivrer une pour différentes raisons : le lieu, mon page, ma santé... Je suis conscient que le risque zéro n'existe pas mais je sais quand même ce que je fais! "

Francis Gazeau assure avoir l'autorisation des médecins qui le suivent depuis des années.
Dans l'attente de la délivrance de cette assurance, le projet de cet aventurier au grand cœur reste au point mort. Cet habitant de Rangiroa espère que la situation se débloquera bientôt et que son dossier sera réétudié par les autorités et les compagnies d'assurance. "J'ai déjà attendu trois ans, je ne peux pas me permettre d'attendre cinq ans de plus…"

Rédigé par Amelie David le Jeudi 10 Novembre 2016 à 11:30 | Lu 4288 fois