Tumata, un ancien délinquant, retrouve le bon chemin


Tumata ne veut plus retomber dans la délinquance. Il appelle la nouvelle génération à ne pas suivre ses traces. "Il faut travailler car la vie est dure aujourd'hui", a-t-il déclaré.
PAPARA, le 07/04/2016 - Tumata veut croire en un avenir meilleur. Après un séjour de trois ans dans un pensionnat pour jeunes délinquants à Hao, il voit la vie autrement. Son passé trouble n'est qu'un lointain souvenir. Il lance un message à la nouvelle génération pour qu’elle se reprenne en main. La vie ne se résume pas à la violence et aux mauvaises fréquentations. Le plus important est de travailler dur pour réussir.

À 20 ans, Tumata a déjà vécu beaucoup de choses dans sa vie. Il a été adopté jusqu'à l'âge de 10 ans, mais au décès de son père adoptif, il retourne chez ses parents biologiques. Son père, un ancien caïd, lui a enseigné les valeurs de la vie. Mais, à son adolescence, Tumata préfère écouter ses amis. Ses années collège ne vont pas se passer comme l'espérait son père. "Je n'allais pas en cours et j'insultais les professeurs." L'adolescent est même allé jusqu'à taper un de ses professeurs, ce qui a conduit à son exclusion de l'établissement scolaire. "Ce professeur avait convoqué mes parents et mon père m'a rossé dans le bureau et le professeur n'a rien fait. Et au moment de sortir de la salle, je me suis défoulé sur lui."

Par la suite, les événements ne s'arrangeront pas pour Tumata. Alcool, mauvaises fréquentations, drogue... un cocktail qui le poussera à dépasser ses limites. "Quand je prenais le bus de Papara pour aller à Taravao, au lieu d'aller à l'école eh bien j'allais avec les collègues pour triper ou pour faire des "conneries". Par exemple : jeter des cailloux sur l'école, sur les maisons ou embêter aussi les autres jeunes…" Il s'est même retrouvé face à un juge. "Le juge m'a fait un rappel sur la loi. J'avais 16 ans et j'ai menacé quelqu'un avec un couteau. Mais c'était de la légitime défense et je n'avais pas l'intention de le tuer", explique-t-il.

Tumata sera pris en charge, par la suite, par la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) qui l'enverra dans un pensionnat à Hao, durant trois ans.

Sur place, il continuera à suivre ses études jusqu'à obtenir un CAP en agriculture. "À Hao, on avait une semaine de classe et on était aussi en stage. On était une trentaine de garçons et une vingtaine de filles. On restait dans l'enceinte, c'est comme une prison et quand on se conduisait bien, on pouvait sortir pour aller à la mer ou à la salle. C'est une école avec des dortoirs, il y a aussi une serre pour l'agriculture. Les gendarmes venaient nous voir pour nous expliquer ce qui est bien et ce qui ne va pas. Si tu fais cela, voilà ce qu'il t'arrive."

Et le dépaysement n'a pas été évident pour un adolescent qui avait pris l'habitude de semer la terreur dans sa commune. "Je traînais avec la bande MS 39 de la Carrière. On tripait, et quand il y avait des bagarres, je me mettais aussi dedans. À mon arrivée à Hao, je ne me sentais pas bien parce que j'avais mes habitudes avec mes copains sur Tahiti. Alors que sur Hao, je ne connaissais personne. Cela me faisait drôle, mais à la longue, je me suis adapté." Sa vie a commencé a changé : "Quand j'étais là-bas, j'ai pris conscience de mes erreurs, j'ai beaucoup regretté mes actes."
Tumata revenait sur Tahiti durant les vacances scolaires. Il a commencé à suivre son père dans les actions mises en place par l'association Rima Taure'a, présidée par Tom Tefaaora. "J'ai commencé à œuvrer au sein de cette association, et nous allions à la rencontre d'autres jeunes, à cette époque-là, j'avais 16 ans. On nous nourrissait, etc. Et c'est à partir de ce moment que j'ai commencé à changer. Je me suis senti utile."

À 18 ans, il sort définitivement du pensionnat de Hao et revient à Tahiti. Ses anciens amis ne le reconnaîtront pas. "Ils me disaient que j'avais beaucoup changé et ça m'a fait plaisir."

Aujourd'hui, Tumata a décroché un contrat de service civique grâce à l'association Rima Taure'a. "Je l'ai orienté vers la culture parce que je pensais l'envoyer en formation au centre culturel de Papara, où ils apprennent aux jeunes à fabriquer des instruments. Ça va toucher à la menuiserie et c'est la base de sa formation à l'école. Sa formation se fera en vue du Hura Tapairu, auquel on participera en décembre", explique Tom Tefaaora, président de l'association. Le passé de Tumata n'a pas été un frein pour l'association. "C'est un membre jeune de notre association qui m'a parlé de lui et m'a dit qu'il était intéressé par notre rythme de vie, l'ambiance "djeuns", etc. Donc je lui ai répondu de faire comme ils avaient l'habitude de faire. Qu'il fallait expliquer aux nouveaux les activités de notre association… Donc il s'est initié, il est venu, il a vu et il a apprécié. Il vient vers nous, on lui offre le meilleur de nous-mêmes pour qu'il s'en sorte. Une confiance s'installe et après il y a le libre-arbitre. Il décide du chemin qu'il veut choisir, le bien ou le mal."

Tumata a quitté le domicile de ses parents, il y a trois mois. Il vit aujourd'hui chez un ami qui l'aide à s'en sortir. Il a l'intention d'intégrer la Marine, "c'est mon rêve et c'est ce que mon père a fait, il est mon exemple", confie-t-il. Il compte entamer les démarches, une fois qu'il aura terminé son contrat de service civique.

Un tatouage qu'il a fait à son arrivée à Hao, pour exprimer sa haine envers les personnes qui l'avaient placé là-bas. Un acte qu'il regrette amèrement. "Quand j'allais au RSMA, comme j'espérais être agent de sécurité, à chaque fois, ils me disaient : "Ah pour être agent de sécurité, tu crois que c'est joli ça ?" J'ai envie d'enlever ça."

Rédigé par Corinne Tehetia le Jeudi 7 Avril 2016 à 17:52 | Lu 6190 fois