Tuatahi et ses “petites choses de la vie” chez Winkler


TAHITI, le 8 mai - Depuis jeudi, quinze toiles de Tuatahi sont exposées à la galerie Winkler. L’artiste peintre, attendu, présente des œuvres grand format qui illustrent les petits riens du quotidien comme un oiseau dans un bananier ou le vent du soir chargé d’effluves de taina.

Sur les murs de la galerie Winkler sont accrochées quinze toiles. Des toiles “d’une grande simplicité”, décrit l’auteur, Tuatahi. Là un bulbul dans un arbre, ailleurs une scène de pêche, un homme qui rêve ou bien encore un personnage qui hume le hupe descendant de la montagne à la saison des taina. Les œuvres racontent des petites saynètes quotidiennes. Elles disent “tout ce que l’on ne voit plus, que l’on a normalisé.


Tuatahi a d’abord cherché à travailler sur des souvenirs d’enfance, sur la Polynésie des années 1990, mais il a finalement laissé libre cours à son imagination. “Le thème est devenu beaucoup trop contraignant, presque handicapant. Je l’ai mis de côté et j’ai fait les choses dont j’avais envie.” C’est alors qu’ont émergé les détails du quotidien. Des situations “sans prétention”.

Paisible, la peinture de Tuatahi respire la douceur et la sérénité dans une gamme colorée exclusive qui signe un style bien affirmé”, commente Vaiana Drollet de la galerie Winkler. “Les contours cernés de noir soulignent les teintes de bleu ciel et les tons de vert tendre. L’ensemble se mariant parfaitement aux couleurs sables ornées de motifs polynésiens. La nuit, quand la lune apparaît, des étoiles semblent scintiller sur ses fonds. Tuatahi distille ses effets de matières dans une composition parfaitement maîtrisée.”

“Faire mieux qu’hier”

L’artiste expose son travail pour la deuxième fois. Sa première exposition personnelle remonte à novembre 2021. Elle était axée sur les légendes polynésiennes. Elle comptait elle aussi 15 toiles. “C’est peu”, admet Tuatahi. “Mais je tiens à ce que chaque toile soit vraiment aboutie.” Il accorde aux œuvres le temps dont elles ont besoin. “Généreux”, “précis”, “minutieux” voire “maniaque”, l’artiste ne se contente pas d’à-peu-près. S’il doit reprendre 40 fois un trait, il le reprendra 40 fois.

Son style, depuis 2021 a évolué. Tuatahi dit avoir affiné son coup de pinceau et sa palette de couleurs. “On est toujours un peu dur avec soi-même mais mes premières toiles étaient quand même brutes de décoffrage.” Tuatahi considère ses verts “plus pétants”, ses bleus “plus apaisants”. Ses traits noirs si caractéristiques viennent harmonieusement accompagner les couleurs. “On essaie de faire toujours mieux qu’hier.”

“J’ai grandi avec des pinceaux”

Tuatahi ne peut même pas se rappeler ses débuts. “J’ai grandi avec des crayons et des pinceaux”, assure-t-il. Au fil du temps, rencontres et événements le ramènent à la peinture. Après le baccalauréat, il fait une formation nouvelles technologies et multimédias au lycée Saint-Joseph de Pirae. “Elle n’existe plus”, précise-t-il. Puis, après une année de prépa de mise à niveau en arts appliqués, il opte pour un BTS en communication visuelle à Bordeaux. “Et là, fatalement, j’ai eu de l’art appliqué en veux-tu en voilà.” Il n’ira pas au bout de sa formation et rentre à Tahiti. Finalement, il apprendra tout seul.

Il se met à l’acrylique pour “des raisons économiques”, avoue-t-il. “Et au final, j’aime bien.” À propos de sa technique, il reste peu disert. “C’est tout le problème d’avoir déserté l’école, je ne saurais pas la décrire.” En revanche, il peut revenir sur ses expériences. Ses tentatives à l’aquarelle, ses fabrications de couleurs artisanales et personnelles. “J’ai essayé le café, le fusain écrasé, et même le soyu mélangé à de la glycéro blanche.” Son père, entrepreneur dans le bâtiment, disposait de touques de peinture blanche. “Et comme je n’avais pas d’argent, j’ai fait avec ce que j’avais.” Aujourd’hui, il peint sur toile dans un style qui lui est propre et qui le distingue entre tous.


Pratique

Jusqu’au 16 mai à la galerie Winkler
Entrée libre et gratuite.
Horaires d’ouverture : du lundi au vendredi de 9 heures à 12h30 et de 13h30 à 17 heures. Le samedi de 8h30 à midi.

Rédigé par Delphine Barrais le Lundi 8 Mai 2023 à 14:37 | Lu 1456 fois