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“Tu es en train de tuer la petite entreprise”


“Tu es en train de tuer la petite entreprise”
Tahiti le 18 juillet 2024 - Les gérants et employés de la société Maupiti Express sont inquiets pour leur avenir avec l’arrivée de l’Apetahi Express sur leurs plates-bandes. Ils regrettent que le tāvana de l’île ait pris cette décision sans concertation.

Les gérants et les onze employés du Maupiti Express 2 sont inquiets. Ils ont appris par la population l’arrivée de l’Apetahi Express sur la ligne Bora Bora-Maupiti à raison de trois rotations par semaine. Tous regrettent que le tāvana de Maupiti, Woullingson Raufauore, ait pris cette décision “seul”. “C’est un arrangement de tāvana avec le gérant de Apetahi Express”, dénonce un des employés. Ce jeudi, après la demande des gérants et des employés du Maupiti Express 2, une réunion a été organisée avec le conseil municipal.

“Nous allons faire faillite”

Dépitée, la gérante de la société Maupiti Express, Josée Sachet, a annoncé aux élus et notamment au tāvana Woullingson Raufauore que si les navettes de l’Apetahi Express sont maintenues, la société va “faire faillite, c’est sûr et certain. Je ne veux pas vendre du rêve à nos employés.”

Selon elle, le tāvana lui aurait demandé d’augmenter le nombre de navettes à deux fois par semaine. “Nos dépenses vont être multipliées par deux, d’autant plus que le samedi, il n’y a personne. On va essayer mais c’est couru d’avance, on court à notre perte, on va mettre la clé sous la porte.”

Josée Sachet se sent trahie, car après avoir servi Maupiti pendant vingt-sept ans, le tāvana Woullingson Raufauore ne lui a pas fait part de son projet. “Nous sommes mécontents car il aurait pu nous en parler. Il a décidé tout seul, on ne peut pas se battre contre une grande société.”

Elle était d’autant plus surprise, que même des élus de la majorité découvraient cette nouvelle en même temps qu’eux. Josée Sachet regrette que la population ait été invitée à une réunion où l’annonce a été faite, “mais moi, je n’étais pas du tout invitée. Je ne comprends pas pourquoi.”

“C’est une concurrence déloyale”

Contactée, la quatrième adjointe au maire, Mathilda David épouse Valentin, tout aussi surprise de cette nouvelle, assure que “nous n’étions pas au courant que Apetahi allait faire trois navettes par semaine”. Elle affirme qu’elle a appris, tout comme d’autres élus, cette nouvelle en même temps que la population de l’île lors d’une réunion en juin dernier, concernant notamment la pêche aux cailloux. “Nous avons pensé que la venue de l’Apetahi Express serait que pour cette occasion.”
Elle comprend le désarroi des personnes concernées : “Ils ont eu raison de demander une réunion car on ne pouvait pas répondre à leurs inquiétudes”.

Mathilda David épouse Valentin a assuré, en réunion ce jeudi, que “c’est une concurrence déloyale car Apetahi Express est une grande société (…). Maupiti Express est une toute petite société et n’a pas les reins solides pour concurrencer Apetahi Express.”

 Elle “déplore la façon dont cela s’est fait, il aurait fallu qu’on fasse cela bien avant que les décisions soient prises, pour ne pas que l’un ou l’autre soit en difficulté. La ligne est ouverte et on ne peut plus faire marche arrière”, dit-elle.

Elle rappelle que onze personnes “dépendent uniquement du Maupiti Express. S’il y a un plan social et que l’Apetahi Express les récupère, c’est déjà une solution mais on ne sait rien du tout.”

“C’est un arrangement entre tāvana et Tuanua Degage”

Les employés de Maupiti Express ont rencontré le tāvana et lui ont fait part de leurs inquiétudes. “Nous seront en difficulté car c’est notre gagne-pain. Demain, on va faire quoi ? Errer sur la route ? Et il nous a tout simplement répondu que c’est la volonté de la population. Et on se demande si c’est vraiment une demande de la population.”

Pour les salariés, trois voyages par semaine, “c’est trop, cela veut dire qu’on ne fera plus que du fret maintenant ? Alors que nous transportons aussi des passagers”. Ils auraient aimé que les trajets de ce concurrent restent “exceptionnels, comme pour la pêche aux cailloux ou le jour de l’An”.
Ils rappellent que lorsqu’ils étaient seuls à faire les navettes aux Raromata’i, leur bateau était “rempli”. Et lorsque la concurrence s’est installée, “on n’a plus eu de passagers. Et, là cela va être pire, comment on va faire ? Nous avons des emprunts.” “Même si on baisse nos tarifs, les habitants vont prendre la concurrence car c’est plus rapide et il y a à manger, c’est normal.”

Les employés se souviennent même d’une réunion, organisée il y a trois ans par le tāvana et où Tuanua Degage avait annoncé qu’“il n’allait plus venir à Maupiti car il avait eu un accident et il s’est retrouvé sur le récif. Aujourd’hui, pourquoi il revient sur sa parole ? C’est clair que c’est un arrangement entre tāvana et Tuanua Degage”, regrettent les employés de la société.

Rappelons que la société Maupiti Express est toujours sous le coup d’un redressement pendant encore les deux prochaines années. Contactés, le tāvana Woullingson Raufauore et Tuanua Degage sont restés injoignables.

Rédigé par Vaite Urarii Pambrun le Jeudi 18 Juillet 2024 à 20:23 | Lu 4746 fois