Transport aérien : le cri de colère des habitants de Ua Huka


UA HUKA, le 15 novembre 2018 - Depuis dimanche, le twin Otter d'Air Tahiti n'effectue plus de liaisons entre Ua Huka et Nuku Hiva, ce qui entraine plusieurs difficultés pour les habitants et les touristes. Mercredi en fin de journée, une mamie de 79 ans a dû être évasanée sur un bonitier, malgré des conditions météorologiques défavorables. Sa famille crie sa colère.

"J'ai pleuré de colère", raconte Rosina Teatiu, une des filles de cette dame de 79 ans qui a dû prendre la mer pour rejoindre l'île de Nuku Hiva, malgré une mer agitée.

Déjà opérée à Papeete le 9 octobre, "suite à une fracture du fémur", cette mamie est revenue sur son île natale vendredi dernier. Mais son retour ne sera pas de tout repos. "En prenant sa douche, ma nièce a entendu un craquement au genou", explique Rosina Teatiu. "Nous sommes allés voir l'infirmier, il a pris des photos, il nous a dit qu'il avait informé le Samu et nous avons attendu, en vain, un retour jusqu'à mardi."

Sans twin otter, l'évasan de cette mamie semble compliqué. Ne sachant plus quoi faire, Rosina décide de contacter sa sœur qui est aide-soignante à l'hôpital de Nuku Hiva. "Je lui ai dit que maman souffrait et qu'il fallait lui trouver un bonitier parce qu'elle ne supporterait pas de voyager sous le soleil. Dans la journée, elle m'a rappelée pour me dire qu'elle avait trouvé un bonitier et que ce sera celui qui est utilisé lors de la rotation de l'administration qui est en tournée sur Ua Huka. Maman a attendu du matin jusqu'à 17h45-18 heures pour partir sur Taiohae, ce n'est pas normal", s'insurge Rosina.

Et en soirée, le verdict tombe : la prothèse de cette mamie a craqué, ce qui lui a valu une autre opération à Nuku Hiva, cette fois-ci. "Elle n'a pas voulu repartir à Papeete, elle a dit au docteur : 'Je suis fatiguée de me battre'", dit Rosina, avant de rajouter cette phrase empreinte d'émotion : "Aux Marquises, on n'a pas le droit d'être malade". Comme le chantait Jacques Brel en 1977 : "Veux-tu que je te dise, gémir n'est pas de mise, aux Marquises".

"On ne peut plus accepter d'être évasané dans ces conditions, en 2018. En poti marara, on a à peu près 2 heures de bateau et en bonitier, on en a pour 3 heures ou 3h30 pour la traversée", prévient Arii Taiaapu, président du comité du Tourisme à Ua Huka.

DES RÉSERVATIONS ANNULÉES POUR LES PENSIONS

Cette situation complique la vie sur place. On prend notamment le cas des élèves, originaires de ces deux îles, qui n'ont pas encore repris le chemin de l'école. "Les parents attendent les consignes de l’Éducation", avance Arii Taiaapu.

Dans le secteur du Tourisme, c'est l'hécatombe, avec plusieurs annulations pour les quatre pensions de Ua Huka. "Les touristes sont obligés de chercher un moyen pour retourner sur Nuku Hiva pour pouvoir prendre l'ATR. Ils sont obligés de faire appel aux poti marara pour descendre sur Nuku Hiva, pour 2 heures de traversée à 50 000 francs le bateau, à leur frais. C'est un budget en plus qu'ils ont dû intégrer à leurs vacances", rajoute le président du comité du Tourisme de Ua Huka.

"Il y a un couple qui a dû affréter un bateau dimanche pour retourner sur Papeete, parce qu'il devait reprendre le travail lundi matin. Mardi, deux autres couples ont dû affréter un autre bateau pour poursuivre leur séjour sur Hiva Oa. Il y a une pension aussi qui devait accueillir les AirBnB, ses clients ne sont pas arrivés. Il y a une autre pension qui devait accueillir des personnes en mission… Depuis mi-octobre, on a eu des annulations aussi bien des touristes que des personnes qui viennent en mission sur l'île", détaille Arii Taiaapu.

Pour finir l'année en beauté, les pensions de Ua Huka attendaient une centaine de touristes, une clientèle qui a été trouvée lors du dernier Salon du Tourisme sur Tahiti. "Aujourd'hui, c'est une grosse perte. On a investi pour participer à ce salon, on a rempli l'agenda, et là, on ne sait plus comment faire pour les personnes qui ont réservé chez nous", explique le gérant d'une pension de famille.

Arii appelle le gouvernement à prendre ses responsabilités et à réfléchir sur l'élargissement de la piste de Ua Huka. "On ne voit pas où est le problème puisque le Casa arrive à se poser. Peut-être qu'un jour un ATR viendra se poser à Ua Huka. On demande qu'il cherche un moyen de nous retirer ce petit avion (Twin otter, NDLR) pour que l'on voyage dans de bonnes conditions avec un ATR", conclut-il.

Nous avons contacté la compagnie aérienne locale qui devrait réagir dans la journée. Affaire à suivre…
"Pas d'avion, pas de client, bungalow vide", écrivait Arii, ce jeudi, sur sa page facebook.

Rédigé par Corinne Tehetia le Jeudi 15 Novembre 2018 à 11:10 | Lu 6979 fois