Trafic d’ice en correctionnelle : en cavale Andélino avait tenté le gros coup


Le slip de Mike L. avec 468 grammes d’ice dissimulés. L’homme avait été interpellé par la douane dès son arrivée à Tahiti-Faa’a, le 1er mai 2012.
PAPEETE, 14 octobre 2014 – Le tribunal correctionnel de Papeete doit juger une affaire de trafic d'ice pour des faits commis entre décembre 2011 et mai 2012. Onze prévenus sont cités dont le détenu Andélino D.N. soupçonné d'être tête de réseau en récidive.

La cinquantaine bien conservée, Andélino D.N. est de petite taille, l’allure athlétique, d’une présentation soignée. Un verbe avec de fortes intonations portugaises, il paraît aussi très à son aise dans les prétoires. Cet ancien légionnaire purge actuellement une peine de huit ans d’incarcération à Faa’a-Nuutania, condamné en 2009 pour une grosse affaire de trafic d’ice dont il avait été reconnu tête de réseau.

Dans la petite salle d’audience du tribunal correctionnel de Papeete, 10 prévenus sont cités à comparaître avec lui. L’instruction à l’audience doit se dérouler sur deux jours, mardi et mercredi. Tous risquent jusqu’à 10 ans d’incarcération. A des degrés divers, ils sont impliqués dans le cadre d’une affaire d’ice révélée en mai 2012, à la faveur d’une saisie record de 468 grammes d’ice.
Le 1er mai de cette année-là, de retour de Santiago du Chili, Mike L. avait tenté de s’introduire en Polynésie française avec plusieurs poches de méthamphétamine fixées dans son slip. Interpellé par la douane puis lors de sa garde à vue, le passeur explique comment il a été recruté, et déclare avoir agi avec la promesse d’une rétribution de 2 millions Fcfp faite par Andélino D.N.

Sur le marché illicite polynésien une telle quantité aurait pu se vendre jusqu’à 37 millions Fcfp. Mais le plus surprenant, dans cette affaire, sera l’identité du commanditaire supposé. A l’époque en effet, Andélino D.N. abuse depuis plus de deux semaines d’une suspension provisoire de peine accordée pour 15 jours par la justice, afin de lui permettre de recevoir des soins dentaires non dispensés en prison. Sa dentition est en ruine : il a besoin de se faire implanter 10 pivots. En attendant, il porte un dentier. Il ne sera arrêté que près d’un mois plus tard, surpris lors d’un déjeuner dans un hôtel-restaurant de Papeete. Jamais il ne se sera présenté chez son dentiste. Mais entre-temps il aura pris un logement à Papara, réuni l’équivalent de 20000 dollars américains avec la participation notoire d’Alphonse F., aujourd’hui cité en récidive pour complicité d’importation de stupéfiants. En 2009 déjà Alphonse F. avait déjà été condamné pour avoir financé un précédent trafic d’ici d'Andélino.

Dans sa cavale, Andélino D.N. aura aussi recruté, avec la complicité de Teiki A., une mule (Mike L.) qu’il aura briefée jusqu’au jour de son départ pour le Mexique via le Chili. Ce que confirme aujourd’hui, Geoffrey M. dit "Seira", son chauffeur, consommateur habituel et dealer d’ice.
Sabine B., Thierry P., Elisabeth P. Vetea P., Stephy T., Esmeralda F. comparaissent aussi dans ce dossier pour usage, détention ou cession d’ice.

Dans cette affaire Adelino D. nie les faits. Tout juste reconnaît-il avoir exhumé d’une cache à Faa’a une pochette de 50 grammes d’ice qu’il avait dissimulée avant son incarcération, en 2009. Pour se procurer de l'argent, il procède à quelques ventes et s'arrange aussi pour s’obliger le service de consommateurs. "Monsieur D. vous n’avez jamais eu l’intention d’aller chez le dentiste ?", interroge dubitatif le tribunal. "J’avais besoin de 3 millions Fcfp pour mes dents", clame-t-il en réponse à la cour. "Vous savez, on vous libère pour des soins ; on vous demande juste une adresse. On ne vous donne rien de plus".

Mais le mode opératoire utilisé pour l’acquisition des 468 grammes saisis dès leur entrée en Polynésie est le même que celui qu’avait mis en évidence la justice en 2009 : l’affaire qui vaut à D.N. son séjour à Nuutania.

La mule part en direction de Santiago au Chili pour ne pas éveiller l’attention. Elle pourra toujours prétendre vouloir importer des maisons en kit. Mais depuis Santiago, elle fait un détour par Guadalajara, au Mexique, où Andélino D.N. a un contact. La drogue est achetée là-bas et la mule peut s’en retourner à Tahiti.

Tout semble l’accuser mais Andélino D.N. persiste à nier. Les liquidités dont il a bénéficiées lors de sa cavale proviennent d’un prêt consenti par Alphonse F. et de la vente d’une partie des 50 gr. d’ice planqués en 2009.

Le tribunal a deux jours pour faire jaillir la vérité de l'instruction à l’audience. Le détenu Andélino D.N. risque jusqu’à une peine de 10 ans d’incarcération supplémentaires à la peine de huit ans qu’il purge déjà. Les réquisitions seront prononcées ce mercredi.

Rédigé par JPV le Mardi 14 Octobre 2014 à 16:35 | Lu 3713 fois