Territoriales 2013 : le Tahoera’a se taille la part du Lion


Le premier tour des élections territoriales a mis en relief la chute de popularité de l’UPLD, le retour en grâce du Tahoera’a et la confirmation d’une 3e voie autonomiste incarnée par A Ti’a Porinetia. Si les rapports de forces observés dimanche sont confirmés au second tour, le 5 mai, le parti orange devrait installer de 35 à 38 élus sur 57 à l’Assemblée territoriale, alors que l’opposition se partagera les restes.

Sa popularité en chute libre, l’UPLD semble payer l’adition d’un choix stratégique incompris, en période de crise, doublé d’une absence de résultat probant. Le rassemblement des partis souverainistes a concentré sa communication de campagne sur le thème de la réinscription de la Polynésie française sur la liste des territoires non-autonomes. Plusieurs déplacements à New-York n’auront pourtant pas suffi à transformer la revendication chère à Oscar Temaru en résolution adoptée en assemblée générale à l’ONU. Et il est très probable qu’une telle mesure ne sera pas adoptée avant le 16 mai prochain, date de l’entrée en fonction de la nouvelle majorité à l’Assemblée, place Tarahoi.

Difficile de défendre un bilan forgé en période de "vaches maigres" pour Oscar Temaru. Et ce, y-compris dans son propre fief de Faa’a. Il n’a jamais enregistré un aussi mauvais score avec moins de 5 000 voix (4 760 selon les résultats provisoires du premier tour) dans une commune où à peine 2 personnes sur 3 se sont rendues aux urnes, dimanche. Par comparaison, le vote UPLD avait mobilisé 54,7% des suffrages exprimés au deuxième tour des Territoriales de 2008, avec 7 141 voix alors que plus de 3 électeurs sur 4 avaient voté dans la commune.

Globalement, sur l’ensemble des îles de la Société, où résident 8 Polynésiens sur 10, le mouvement souverainiste est en recul de pratiquement 30% par rapport aux résultats obtenus au premier tour des Territoriales de 2008. Il avait totalisé 36 309 voix sur l’archipel, le 27 janvier 2008, contre 26 345 dimanche dernier et ce alors que le pays compte pratiquement 10% d’électeurs de plus qu’alors.

Entre le premier et le deuxième tour des Territoriales de 2008, l’UPLD avait connu une amélioration d’approximativement 25% de ses résultats. Sur la base d’une telle progression, le rassemblement souverainiste croit pouvoir compter sur au moins 38 à 40 000 voix le 5 mai, à la faveur de reports et d’un plus fort taux de participation.

Mais il est évident qu’à ce compte-là, l’UPLD siègera dans l’hémicycle sur les rangs de l’opposition avec au mieux 12 élus.

Le retour en grâce des "orange"

Pour le Tahoera’a Huira’atira, le temps est à l’orange. Désavoué en 2008 avec à peine plus de 20 000 voix sur la Polynésie, contraint de négocier un accord avec l’UPLD pour siphonner la plateforme To Tatou Ai’a, le parti autonomiste a réussi à s’imposer comme un vote refuge, cette année. Le parti croyait pouvoir compter sur un électorat de 50 000 voix. Il recueille 51 316 voix et 40,16% des suffrages exprimés dimanche, alors que le taux de participation de 67,45% à ce scrutin est légèrement en-dessous des 70 à 72% attendus.

Sur la base de la mobilisation en sa faveur observée dimanche, il semble certain que le parti de Gaston Flosse s’achemine vers une large victoire au deuxième tour, dans deux semaines. Le parti orange arrive en tête dans les huit sections de Polynésie française.

Nul besoin de faire alliance cette fois-ci. Avec une prime majoritaire de 19 sièges pour la liste qui sort en tête le 5 mai et une répartition à la proportionnelle sur la base des suffrages exprimés, dans chacune des sections, le parti orange pourrait installer de 35 à 38 élus dans la nouvelle Assemblée de Polynésie française, qui siègera à compter du 16 mai prochain. De quoi régner durablement et sans partage.

Une ombre ternit cependant ce joli tableau : la possible sanction d’inéligibilité qui pèse sur Gaston Flosse, dans l’affaire des emplois fictifs. La cour de cassation pourrait donner son avis courant octobre prochain. En cas de rejet du pourvoi - qui rendrait de fait définitif l’arrêt en appel - Gaston Flosse sera contraint de quitter les affaires publiques pour trois ans. La charge de Président de la Polynésie française serait alors confiée à Edouard Fritch.

Renaissance d'une 3e voie autonomiste

La surprise vient incontestablement du résultat obtenu par le tout nouveau parti A Ti’a Porinetia, au premier tour de ces Territoriales 2013. La liste menée par Teva Rohfritsch y apparaît de toute évidence comme la 3e voie autonomiste, avec pratiquement 1 électeur sur 5 (19,92%) qui aura voté en sa faveur, le 21 avril.

Cet espoir d'une alternative autonomiste avait un temps été incarné par le Fetia Api et son président, Boris Léontieff. Mais cette dynamique avait été fauchée dans l'élan avec la disparition accidentelle du leader politique, le 23 mai 2002 dans les Tuamotu, victime d'un mystérieux accident d'avion avec le marquisien Lucien Kimitete, Arsène Tuairau et Ferfine Besseyre.

Onze ans après, A Ti’a Porinetia s’est officiellement constitué que le samedi 13 avril alors que le groupe politique s’était rassemblé début février à l’Assemblée, sur les bases d’une partie des groupes To Tatou Ai’a et Ia Ora Te Fenua.

3 mois de campagne auront suffi au parti jaune pour montrer sa capacité à rassembler de manière significative sous son égide un électorat autonomiste alternatif et non orange.

Dans le cadre d’une triangulaire, et sur la base des rapports de force observés dimanche, A Ti’a Porinetia devrait être en mesure d’installer 9 à 10 élus à l’APF, le 16 mai prochain.

Mais dans cette Assemblée appelée à siéger pour les cinq prochaines années, le Tahoera’a Huira’atira se sera taillé la part du Lion.

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Lundi 22 Avril 2013 à 16:44 | Lu 2398 fois