Théodore Tuahine, maire de Hao, en compagnie du représentant de la société Tian Rui, Wang Chen, et du Président Edouard Fritch, dimanche à Hao.
HAO, 8 novembre 2015 - Un point de situation sur l’état d’avancement du chantier de la ferme aquacole a été présenté aux élus du conseil municipal de Hao, dimanche matin sur place, à l’initiative d’Edouard Fritch et en présence de Wang Chen. Le représentant de la société chinoise Tian Rui, souhaite que la ferme entre en exploitation sous 24 mois.
Dimanche, devant les élus de la municipalité des Tuamotu l’investisseur chinois s’est borné à affirmer qu’il souhaitait que cela "aille le plus vite possible. En Chine nous aimons que ça aille vite", a-t-il insisté. "Mais nous sommes en Polynésie française. Il y a une réglementation locale. Nous attendons les autorisations pour débuter les travaux".
Aussi, dimanche les élus n’ont-ils eu que quelques plans de masse, les explication du maître d'oeuvre, Coco Taputuarai et les assurance conjointes du Président Fritch et de l'investisseur, pour se rendre compte de l’ampleur de ce projet exceptionnel.
Le projet est développé par la société chinoise Tian Rui, représentée par son antenne locale, une filiale de droit polynésien dénommée Tahiti Nui Ocean Foods. L’activité aquacole s’intéresse à l’élevage en cage, dans le lagon de l’atoll, de variétés à forte valeur ajoutée sur le marché chinois.
Les installations de cette ferme aquacole de Hao prévoient, sur une emprise foncière de 36 hectares, la construction de 120 000 m2 de locaux, comptant une écloserie de 12 000 m2, un laboratoire, des unités de congélation, de stockage, de transformation et de conditionnement du poisson avant son exportation ; mais aussi des locaux administratifs et 75 logements pour les cadres. Flanqués à l’ouest de ce vaste complexe, 56 bassins. En activité, cette zone sera dédiée au grossissement des juvéniles pendant les 18 premiers mois avant que leur élevage ne soit achevé en cage, dans le lagon.
Pour la réalisation du complexe, 580 000 tonnes de matériaux doivent être acheminés sur place pour ce chantier hors normes. Et déjà cela pose un problème lié au fret, dans un atoll desservi à raison de huit touchers de caboteurs par mois, c'est-à-dire qu'à raison de 10000 tonnes par mois de fret, il faudrait 5 ans pour acheminer le tout. Près de 40% devrait venir directement de Chine (structures métalliques, préfabriqués...) pour tenir les délais.
2800 cages dans le lagon
Pour l’instant, l’activité aquacole polynésienne se borne à la production de 15 tonnes de paraha peue (Platax) en 2013 avec l’objectif de parvenir à 25 tonnes en 2014. La production de crevettes est, selon le dernier rapport sur l’état de l’environnement, de 79 tonnes… A Hao, les volumes de production de la ferme aquacole annoncés par l’homme d’affaires chinois font état à terme de 50.000 tonnes de poisson par an. Du mérou, essentiellement mais aussi de la loche et du napoléon. Pour leur élevage, 2800 cages doivent être disséminées dans le lagon de l’atoll et des îles voisines. "La production commencera peut-être à 20.000 tonnes et sera augmentée progressivement en fonction de la faisabilité. Bien sûr, ce que j’aimerais à terme c’est couvrir l’ensemble des Tuamotu à l’exception des atolls qui ont déjà une activité perlicole ou touristique", affirme Wang Chen. L’investissement prévu sur dix ans pourrait atteindre 130 à 150 milliards Fcfp.
Le lancement de l’activité est attendu comme une source d’espoir par les habitants de Hao qui espèrent la création de 500 à 600 emplois directs lors des travaux de construction. Un chiffre synonyme de plein emploi dans une commune îlienne qui comptait 1317 âmes au recensement de 2012. Les seuls travaux entamés pour l’heure sont ceux d’une voie bétonnée de contournement de 600 mètres qui occupe 20 jeunes en CDD jusqu’au 31 décembre.
Du côté de la ferme, les travaux devraient débuter en début d’année par le chantier du terrassement des 36 hectares. C’est le seul dossier complet dont dispose le service de l’Urbanisme. Les demandes d’autorisation pour les travaux immobiliers ont été déposées mi-octobre et doivent être complétés notamment par une étude d’impact sur l’environnement. "Pour de tels investissements nous sommes bien entendu vigilants sur toutes les phases de l’instruction", a rappelé dimanche le Président Edouard Fritch.
Car dans ce projet, rien n’est anodin. Ni le site de Hao, ni les répercutions que l’on peut craindre sur l’écosystème de cet atoll.
En mai dernier, dans un rapport d’observations définitives sur la politique de la pêche et de l’aquaculture, la Chambre territoriale des comptes s’interrogeait sur l’impact d’une telle activité sur l’environnement. Elle évoquait ses craintes quant à la "dégradation de l’écosystème du lagon, écosystème par définition fragile puisqu’il s’agit d’un milieu fermé. Or, l’élevage en cage favorise les épidémies par la concentration des poissons recherchée. En outre, il perturbe l’écosystème par l’accumulation des déjections des élevages".
Mais Wang Chen l’assure catégoriquement : "Nous allons faire les choses dans les règles. La pollution n’est pas là parce qu’on la redoute. Nous ferons régulièrement des analyses scientifiques pour tester l’eau du lagon et les résultats nous les publierons. Il n’y aura aucun secret".
"Je crois que M. Wang Chen partage le souci de la population locale et du Pays", estime Edouard Fritch. "Nous avons tous hâte que ces investissements débutent mais ils ne commenceront que dès lors qu’ils auront toutes les autorisations".
L'environnement en question
L’autre problème qui se pose est celui de la pollution historique de cet atoll qui a servi pendant 30 ans de base arrière du CEP lors des campagnes d’expérimentation nucléaires de 1966 à 1996. Cette activité militaire a été polluante. L’association Moruroa a tatou, estime selon ses recherches que le lagon de Hao contient cinq avions Vautour, "des fusées, des réacteurs et surtout de très nombreux fûts de déchets divers" dont certains seraient radioactif.
Dans le cadre de la mission de dépollution de l’atoll, le comité de pilotage Etat Pays commune a mis en place un "comité lagon". Des plongées régulières ont permis un inventaire des déchets en vue de leur récupération, quand c’est possible. La liste est tenue confidentielle. Mais les plongeurs auraient identifié des "câbles, des structures métalliques, des blocs de béton, des ancres, un châssis de camion de 400 kg, des sacs de terre, des restes de ferme perlière, des batteries…".
"D’après les informations dont nous disposons, il n’y a pas de pollution inquiétante sur terre. Pour nos produits, dans le futur, nous serons aux normes HACCP et aux normes européennes. Cela nous permettra de nous assurer que nos produits sont de bonne qualité", déclare Wang Chen questionné à ce propos.
Depuis 2009, 146 000 m3 de terres ont été isolées sur place suite aux travaux de dépollution menés par l’Etat. Ils sont stockés en bout de piste à Hao non loin de l’emplacement où doivent être construits les locaux de la ferme aquacole de Tahiti Nui Ocean Foods.
Une étude publiée en juin 2012 sur la base d’analyses réalisées par le bureau Pae Tai Pae Uta pour le compte de l’agence métropolitaine Artelia faisait pourtant apparaître la présence très forte de métaux lourds, pyralène et hydrocarbures dans les sols de Hao, mais aussi dans les eaux souterraines de l’atoll. Ce document a mis en évidence la présence de ces polluants dans les poissons, les invertébrés, les fruits et légumes et même la viande des porcs élevés sur place.
Ses recommandations suggéraient notamment de limiter la consommation de poisson à au plus deux repas par semaine, et l’interdiction de cultiver légumes et coco sur les sols pollués par l’ancienne activité du CEP. Ce rapport termine par cette phrase : "Les résultats de l’évaluation quantitative des risques sanitaires mettent en évidence une incompatibilité manifeste entre l’état actuel des milieux et leurs usages actuel et projetés".
Beaucoup d’interrogations demeurent associées à la réalisation de ce projet aquacole. A Hao, si on redoute les conséquences environnementales qui pourraient être liées à son exploitation, on souhaite rester optimiste et croire que tout sera fait dans les règles de l'art. On compte sur les 600 emplois que ce projet pourrait générer localement durant sa phase de construction, avec patience.
Le projet est dans les cartons du Pays depuis la signature en novembre 2012 d’un "memorendum of understanding" entre Oscar Temaru, pour le compte de la Polynésie française et la société chinoise Jingmin fisheries investments management limited. Repris à son compte par Gaston Flosse puis par Edouard Fritch ce n’est qu’en mai dernier que le site du futur complexe aquacole de Hao a été inauguré. Mais depuis, en dehors d’un imposant monolithe planté sur place, rien n’a changé. Sept mois après, le dossier en est encore au stade des préliminaires.
Dans le meilleur des cas, ce projet n’entrera pas dans sa phase d’exploitation avant le premier trimestre 2018.
Dimanche, devant les élus de la municipalité des Tuamotu l’investisseur chinois s’est borné à affirmer qu’il souhaitait que cela "aille le plus vite possible. En Chine nous aimons que ça aille vite", a-t-il insisté. "Mais nous sommes en Polynésie française. Il y a une réglementation locale. Nous attendons les autorisations pour débuter les travaux".
Aussi, dimanche les élus n’ont-ils eu que quelques plans de masse, les explication du maître d'oeuvre, Coco Taputuarai et les assurance conjointes du Président Fritch et de l'investisseur, pour se rendre compte de l’ampleur de ce projet exceptionnel.
Le projet est développé par la société chinoise Tian Rui, représentée par son antenne locale, une filiale de droit polynésien dénommée Tahiti Nui Ocean Foods. L’activité aquacole s’intéresse à l’élevage en cage, dans le lagon de l’atoll, de variétés à forte valeur ajoutée sur le marché chinois.
Les installations de cette ferme aquacole de Hao prévoient, sur une emprise foncière de 36 hectares, la construction de 120 000 m2 de locaux, comptant une écloserie de 12 000 m2, un laboratoire, des unités de congélation, de stockage, de transformation et de conditionnement du poisson avant son exportation ; mais aussi des locaux administratifs et 75 logements pour les cadres. Flanqués à l’ouest de ce vaste complexe, 56 bassins. En activité, cette zone sera dédiée au grossissement des juvéniles pendant les 18 premiers mois avant que leur élevage ne soit achevé en cage, dans le lagon.
Pour la réalisation du complexe, 580 000 tonnes de matériaux doivent être acheminés sur place pour ce chantier hors normes. Et déjà cela pose un problème lié au fret, dans un atoll desservi à raison de huit touchers de caboteurs par mois, c'est-à-dire qu'à raison de 10000 tonnes par mois de fret, il faudrait 5 ans pour acheminer le tout. Près de 40% devrait venir directement de Chine (structures métalliques, préfabriqués...) pour tenir les délais.
2800 cages dans le lagon
Pour l’instant, l’activité aquacole polynésienne se borne à la production de 15 tonnes de paraha peue (Platax) en 2013 avec l’objectif de parvenir à 25 tonnes en 2014. La production de crevettes est, selon le dernier rapport sur l’état de l’environnement, de 79 tonnes… A Hao, les volumes de production de la ferme aquacole annoncés par l’homme d’affaires chinois font état à terme de 50.000 tonnes de poisson par an. Du mérou, essentiellement mais aussi de la loche et du napoléon. Pour leur élevage, 2800 cages doivent être disséminées dans le lagon de l’atoll et des îles voisines. "La production commencera peut-être à 20.000 tonnes et sera augmentée progressivement en fonction de la faisabilité. Bien sûr, ce que j’aimerais à terme c’est couvrir l’ensemble des Tuamotu à l’exception des atolls qui ont déjà une activité perlicole ou touristique", affirme Wang Chen. L’investissement prévu sur dix ans pourrait atteindre 130 à 150 milliards Fcfp.
Le lancement de l’activité est attendu comme une source d’espoir par les habitants de Hao qui espèrent la création de 500 à 600 emplois directs lors des travaux de construction. Un chiffre synonyme de plein emploi dans une commune îlienne qui comptait 1317 âmes au recensement de 2012. Les seuls travaux entamés pour l’heure sont ceux d’une voie bétonnée de contournement de 600 mètres qui occupe 20 jeunes en CDD jusqu’au 31 décembre.
Du côté de la ferme, les travaux devraient débuter en début d’année par le chantier du terrassement des 36 hectares. C’est le seul dossier complet dont dispose le service de l’Urbanisme. Les demandes d’autorisation pour les travaux immobiliers ont été déposées mi-octobre et doivent être complétés notamment par une étude d’impact sur l’environnement. "Pour de tels investissements nous sommes bien entendu vigilants sur toutes les phases de l’instruction", a rappelé dimanche le Président Edouard Fritch.
Car dans ce projet, rien n’est anodin. Ni le site de Hao, ni les répercutions que l’on peut craindre sur l’écosystème de cet atoll.
En mai dernier, dans un rapport d’observations définitives sur la politique de la pêche et de l’aquaculture, la Chambre territoriale des comptes s’interrogeait sur l’impact d’une telle activité sur l’environnement. Elle évoquait ses craintes quant à la "dégradation de l’écosystème du lagon, écosystème par définition fragile puisqu’il s’agit d’un milieu fermé. Or, l’élevage en cage favorise les épidémies par la concentration des poissons recherchée. En outre, il perturbe l’écosystème par l’accumulation des déjections des élevages".
Mais Wang Chen l’assure catégoriquement : "Nous allons faire les choses dans les règles. La pollution n’est pas là parce qu’on la redoute. Nous ferons régulièrement des analyses scientifiques pour tester l’eau du lagon et les résultats nous les publierons. Il n’y aura aucun secret".
"Je crois que M. Wang Chen partage le souci de la population locale et du Pays", estime Edouard Fritch. "Nous avons tous hâte que ces investissements débutent mais ils ne commenceront que dès lors qu’ils auront toutes les autorisations".
L'environnement en question
L’autre problème qui se pose est celui de la pollution historique de cet atoll qui a servi pendant 30 ans de base arrière du CEP lors des campagnes d’expérimentation nucléaires de 1966 à 1996. Cette activité militaire a été polluante. L’association Moruroa a tatou, estime selon ses recherches que le lagon de Hao contient cinq avions Vautour, "des fusées, des réacteurs et surtout de très nombreux fûts de déchets divers" dont certains seraient radioactif.
Dans le cadre de la mission de dépollution de l’atoll, le comité de pilotage Etat Pays commune a mis en place un "comité lagon". Des plongées régulières ont permis un inventaire des déchets en vue de leur récupération, quand c’est possible. La liste est tenue confidentielle. Mais les plongeurs auraient identifié des "câbles, des structures métalliques, des blocs de béton, des ancres, un châssis de camion de 400 kg, des sacs de terre, des restes de ferme perlière, des batteries…".
"D’après les informations dont nous disposons, il n’y a pas de pollution inquiétante sur terre. Pour nos produits, dans le futur, nous serons aux normes HACCP et aux normes européennes. Cela nous permettra de nous assurer que nos produits sont de bonne qualité", déclare Wang Chen questionné à ce propos.
Depuis 2009, 146 000 m3 de terres ont été isolées sur place suite aux travaux de dépollution menés par l’Etat. Ils sont stockés en bout de piste à Hao non loin de l’emplacement où doivent être construits les locaux de la ferme aquacole de Tahiti Nui Ocean Foods.
Une étude publiée en juin 2012 sur la base d’analyses réalisées par le bureau Pae Tai Pae Uta pour le compte de l’agence métropolitaine Artelia faisait pourtant apparaître la présence très forte de métaux lourds, pyralène et hydrocarbures dans les sols de Hao, mais aussi dans les eaux souterraines de l’atoll. Ce document a mis en évidence la présence de ces polluants dans les poissons, les invertébrés, les fruits et légumes et même la viande des porcs élevés sur place.
Ses recommandations suggéraient notamment de limiter la consommation de poisson à au plus deux repas par semaine, et l’interdiction de cultiver légumes et coco sur les sols pollués par l’ancienne activité du CEP. Ce rapport termine par cette phrase : "Les résultats de l’évaluation quantitative des risques sanitaires mettent en évidence une incompatibilité manifeste entre l’état actuel des milieux et leurs usages actuel et projetés".
Beaucoup d’interrogations demeurent associées à la réalisation de ce projet aquacole. A Hao, si on redoute les conséquences environnementales qui pourraient être liées à son exploitation, on souhaite rester optimiste et croire que tout sera fait dans les règles de l'art. On compte sur les 600 emplois que ce projet pourrait générer localement durant sa phase de construction, avec patience.
Le projet est dans les cartons du Pays depuis la signature en novembre 2012 d’un "memorendum of understanding" entre Oscar Temaru, pour le compte de la Polynésie française et la société chinoise Jingmin fisheries investments management limited. Repris à son compte par Gaston Flosse puis par Edouard Fritch ce n’est qu’en mai dernier que le site du futur complexe aquacole de Hao a été inauguré. Mais depuis, en dehors d’un imposant monolithe planté sur place, rien n’a changé. Sept mois après, le dossier en est encore au stade des préliminaires.
Dans le meilleur des cas, ce projet n’entrera pas dans sa phase d’exploitation avant le premier trimestre 2018.
Tearii Taputuarai, dirigeant de la société Coco group Engineering, chargé de la maîtrise d'oeuvre du projet de ferme aquacole, pour le compte de la société Tahiti Nui Ocean Foods.
Un point de situation sur l’état d’avancement du chantier de la ferme aquacole a été présenté aux élus du conseil municipal de Hao, dimanche matin à l’initiative d’Edouard Fritch et en présence de représentants de la société chinoise Tian Rui.