TPE : exporter devient simple comme une lettre à la poste


Pour les artisans et TPE exporter devient plus simple grâce à un formulaire simplifié qui permet de se passer de transitaire
PAPEETE, le 27 octobre 2015 - Une nouvelle procédure pour les exportations de colis de moins de 30 kg et valant moins de 450 000 Fcfp vient d'être mise en place. Fini les transitaires obligatoires : il ne reste plus qu'un petit formulaire à remplir et les produits locaux seront envoyés à l'étranger… comme une lettre à la poste.

Depuis ce lundi 26 octobre, un artisan ou une entreprise qui exporte ses produits peut bénéficier d'une procédure de déclaration en douane très simplifiée directement dans les bureaux de postes des cinq archipels. Pour un colis de moins de 30 kg et valant moins de 450 000 Fcfp (la limite de l'assurance transport de l'OPT), il lui suffit de remplir une déclaration "CN23", disponibles à la poste, où il rentrera les mêmes informations qu'un colis normal (adresse de l'expéditeur et du destinataire, contenu et valeur du colis) et une petite case en plus : le code douanier des produits et leur pays d'origine. Pour les produits vivants, un champ permet de préciser les informations requises (il faudra généralement récupérer un certificat phytosanitaire à Motu Uta). Et c'est tout : aucune taxe ou frais supplémentaire et la déclaration sur papier auto-copieur est directement en trois exemplaires.

UNE MESURE POUR FAVORISER LE E-COMMERCE DES ARTISANS

L'idée est de favoriser l'exportation des petites entreprises à l'heure où le e-commerce facilite grandement la recherche de clients dans le monde entier. Prenons le cas d'un artisan de Polynésie qui essaye de trouver une clientèle étrangère. C'est peut-être un fabricant de rames décoratives à Raiatea, un producteur de vanille de la Presqu'Île ou un bijoutier-créateur des Marquises. Il propose ses produits sur des plateformes spécialisées comme alittlemarket.com, etsy.com ou les grands classiques que sont ebay.com et amazon.com. Il a peut-être même créé son propre site internet.

Jusqu'à présent pour exporter un produit, même une babiole en nacre à 1000 Fcfp, il était obligé de passer par un professionnel des procédures douanières. Avec 1000 Fcfp de transport et au moins 6000 Fcfp de transitaire, le bijou-fantaisie à 8 euros voyait son prix multiplié par huit… et perdait toute chance d'être acheté. Du coup, pas étonnant que les artisans qui se risquent au e-commerce fraudaient presque tous et envoyaient leurs produits par simple colis, sans déclaration douanière. Avec le risque d'un contrôle fiscal, d'un contrôle douanier et bien sûr aucune cotisation pour leur retraite ou leur assurance maladie.

Désormais, ils n'auront plus que les frais de transport à ajouter auxquels les internautes sont habitués. Ils varient selon l'OPT entre 160 Fcfp (100 grammes par bateau) et 38 220 Fcfp (30 kilos par avion, prioritaire). Et à ce prix, ils auront une assurance sur leur marchandise…

Le chiffre : 10 000 colis ont bénéficié d'une déclaration douanière "ancienne version" en 2014. La nouvelle procédure devrait augmenter ce nombre.

La nouvelle procédure de déclaration simplifiée a été initiée par la CCISM, qui a été rejointe par les douanes, l'OPT et les services phytosanitaires.
CONTRÔLES À L'ARRIVÉE, PROCÉDURES PHYTO ET LE CAS DE LA PERLE

Si les petits exportateurs voient leurs tracasseries administratives diminuer, le formulaire simplifié reste soumis à de nombreuses limites. Déjà il faut que les produits exportés soient "d'origine locale" (voir encadré) ; pour les produits issus du vivant il faut faire sa déclaration au service phytosanitaire et récupérer le certificat ad hoc ; pour des bijoux contenant moins de 10 perles de Tahiti, il faut joindre une déclaration sur l'honneur qu'il ne s'agit pas de rebus (pour exporter plus de 10 perles, rendez-vous au service de la perliculture pour examen puis direction le transitaire).

Les formalités à Tahiti étant terminées, il faudra encore s'assurer que les douanes à l'arrivée vont laisser entrer le colis. D'où le certificat du phyto pour le miel, la vanille, le monoi et autres ra'au Tahiti. Mais même pour les autres produits, le nombre de règles et de normes applicables dans le monde est considérable. Là il faut se renseigner, en particulier pour le marché américain particulièrement exigeant. Un service spécialisé de la CCISM pourra tout de même vous aider, il suffira de le contacter par mail à export@ccism.pf.

Qu'est-ce qu'un produit d'origine polynésienne ?

Une loi de 1989 impose une petite taxe statistique sur les exportations de tout produit qui n'est pas "d'origine polynésienne". Mais comme l'OPT ne peut pas collecter les taxes, ces produits ne peuvent pas bénéficier de la déclaration simplifiée et doivent toujours passer par un transitaire (à moins de se plonger dans la paperasse).

Les textes internationaux définissent un produit comme d'origine locale si au moins 40% de sa valeur ajoutée vient de Polynésie. Par exemple un T-shirt imprimé à Tahiti ne sera considéré comme local que si le coût de l'impression, de l'étiquetage et les autres transformations effectuées à Tahiti sont presque égaux au prix du tricot de base importé par l'entreprise.


L'avantage fiscal des exportateurs

Les professionnels du secteur connaissent bien cette spécificité fiscale polynésienne : tout le chiffre d'affaires à l'exportation des entreprises est exempté de l'impôt sur les sociétés. Cet impôt représente tout de même entre 25% et 35% des bénéfices d'une entreprise. C'est là que la déclaration simplifiée facilitera la vie des petits patrons : leur copie du formulaire CN23 pourra servir de justificatif auprès du fisc.

Précisément, c'est l'article 115-1 alinéa 6 du Code des Impôts qui prévoit que les entreprises qui "produisent, transforment ou revendent des biens corporels neufs ainsi que celles qui conçoivent, développent ou exploitent des productions informatiques ou multimédia, celles qui réalisent des prestations d'ingénierie afférentes à la protection de l'environnement et celles qui réalisent des prestations de génie civil, d'électronique et d'électromécanique bénéficient d'un abattement d'impôt égal au pourcentage du chiffre d'affaires réalisé à l'exportation par rapport au chiffre d'affaires total."

Malheureusement pour les artisans, seul l'impôt sur les sociétés payé par les sociétés anonymes bénéficie de cet avantage fiscal considérable. L'impôt sur les transactions et les patentes n'en profitent pas…

Rédigé par Jacques Franc de Ferrière le Mardi 27 Octobre 2015 à 15:59 | Lu 4371 fois