Surendettement : plus de pouvoir pour le juge


Le profil des surendettés n'est pas le même qu'en France. Au fenua, la population des foyers surendettés se caractérise par la prédominance (deux tiers) de personnes vivant en couple et ayant au moins une personne à charge (74%) avec deux à trois personnes à charge en moyenne, indique l'Institut d'émission d'outre-mer. Photo : AFP
PAPEETE, le 22 mars 2017. Le gouvernement a préparé un projet de loi du Pays pour faciliter le désendettement des particuliers. L'objectif est "d'accélérer les procédures" et de "renforcer les droits du débiteur".

La perte de travail, une séparation, un problème de santé… D'un seul coup, un emprunt qui était parfaitement gérable peut devenir un fardeau trop lourd à porter. Dès que le remboursement de sa dette empêche un ménage de faire face à ses charges courantes, il est considéré comme surendetté. Avant 2012, c'était alors une spirale infernale d'intérêts, de pénalités de retard, de saisies et finalement de misère qui se mettait en place. Mais une loi du Pays a été mise en place pour aider les ménages à se sortir de cette spirale infernale.

Un peu plus de quatre ans après ce premier texte, le gouvernement a préparé un projet de loi du Pays pour faciliter davantage le désendettement des particuliers. L'objectif est "d'accélérer les procédures" et de "renforcer les droits du débiteur" note l'exposé des motifs du projet de loi du Pays.

ACCELERATION DU TRAITEMENT DES DOSSIERS
Ce texte prévoit notamment que le juge d'instance puisse "prononcer directement un redressement personnel (c’est-à-dire un effacement des dettes) avec ou sans liquidation judiciaire, sans avoir à attendre une recommandation en ce sens de la commission de surendettement". Le traitement des dossiers sera ainsi accéléré, le retour en commission n'étant plus nécessaire.

Le juge d'instance deviendra un élément essentiel dans le parcours des surendettés pour sortir de ce cauchemar économique moderne. La procédure de redressement personnel permet d'effacer toutes les dettes, de remettre les compteurs à zéro et de repartir sur de bonnes bases mais il ne faut pas accumuler de nouvelles dettes par la suite.
Autre modification importante prévue : la possibilité de recours devant le juge contre la décision d'orientation prise par la commission est supprimée. "Ainsi sera évitée la manœuvre dilatoire que constituait très souvent ce recours". Mais "le recours contre la décision de recevabilité est maintenu ainsi que le recours que les créanciers peuvent intenter contre les mesures imposées ou recommandées."

Autre mesure en faveur des foyers surendettés : le délai de suspension et d'interdiction des procédures d'exécution sera porté à deux ans au lieu d'un.

Ce qui signifie qu'il est impossible pour un créancier de mettre en œuvre un recouvrement forcé d'une dette, comme une saisie sur compte bancaire par exemple. Il est également impossible par exemple de poursuivre l'expulsion du débiteur de son domicile sauf si l'expulsion est la conséquence d'une saisie immobilière.

Les créanciers ne peuvent non plus initier de nouvelles poursuites qui tendraient à obtenir un titre exécutoire permettant les saisies, ou évidemment à exécuter une condamnation pécuniaire.

"LES PHASES DE CONCILIATION ECHOUENT LE PLUS SOUVENT"
Le texte prévoit également que la commission puisse prendre des mesures de redressement immédiatement "sans passer une phrase amiable de conciliation entre le débiteur et ses créanciers". "On constate, en pratique, que les phases de conciliation échouent le plus souvent, ce qui conduit la commission de surendettement –ou, le cas échant, le juge d'instance- à prendre généralement les mêmes décisions que celles qu'elle avait recommandées concernant le plan conventionnel de redressement."

En Polynésie française, le surendettement touche principalement des personnes vivant en couple, sans travail et locataires de leur logement, indique une enquête réalisée par l'Institut d'émission d'outre-mer. Cette étude a été réalisée à partir des dossiers examinés par la commission de surendettement en 2014.

Les Polynésiens surendettés sont relativement plus âgés qu’en métropole : ils ont majoritairement entre 45 et 54 ans, comme dans les DOM. Les jeunes paraissent moins exposés au surendettement grâce au soutien familial et intergénérationnel : les moins de 35 ans ne représentent que 14 % des surendettés. Le chômage est le principal facteur d’explication de leur surendettement et concerne 60 % d’entre eux.

Rédigé par Mélanie Thomas le Mercredi 22 Mars 2017 à 09:07 | Lu 2848 fois