Session budgétaire : "Le Pays a été laissé à l’abandon" accuse Nuihau Laurey


PAPEETE, jeudi 19 septembre 2013 – Nuihau Laurey s’en est vivement pris à la précédente majorité, lors du discours prononcé en ouverture de la session budgétaire de l’Assemblée, avant de présenter les orientations de la politique menée par le gouvernement dont la partition budgétaire devra être adoptée le 17 décembre prochain.

Et de détailler : "Pendant prés de 10 années, notre Pays à été laissé à l’abandon : nos entreprises en perdition confrontées à l’effondrement de la commande publique et à l’incompétence gouvernementale ; Près de 15 000 emplois détruits ; 30 % des Polynésiens vivants au dessous du seuil de pauvreté ; l’incapacité pour beaucoup à se loger, à éduquer leurs enfants, à se soigner ; Notre système de soins menacé par le déséquilibre financier grandissant d’une protection sociale dont les coûts ne sont pas maîtrisés et les ressources de plus en plus limitées du fait des destructions d’emplois ; Notre système de retraite au bord de l’asphyxie dont la viabilité n’excède pas quelques années, voire quelques mois ; Nos comptes publics en déshérence avec l’effondrement de plus de 20 % des recettes fiscales du Pays, une trésorerie exsangue qui l’empêche de pouvoir régler ses fournisseurs, une dette qui atteint des sommets et des bailleurs de fonds aux abonnés absents".

"Un discours clair qui met en évidence l’héritage que nous subissons, l’absence de gestion des équipes gouvernementales passées et la nécessité de faire des efforts", a résumé le vice-président.

Harangue par laquelle le chef par intérim du gouvernement polynésien a rappelé les réformes mises en œuvre par l’exécutif, depuis le mois de juin dernier avec le soutien de l’Assemblée de Polynésie française et projeté cette action dans l’avenir avec la promesse d’une amélioration de la trésorerie en 2014, "du fait de ces ressources additionnelles et de la mise en œuvre de vraies mesures de maîtrise des dépenses publiques".

"L’avance de trésorerie de 5 milliards que nous sollicitons auprès de l’Etat, remboursable en deux années, à l’inverse de la subvention versée l’année dernière et dilapidée par l’ancienne équipe gouvernementale, permettra de donner un véritable ballon d’oxygène à nos fournisseurs, à nos entreprises, à nos communes", a-t-il également précisé.

"Pour la première fois, deux comptes d’affectation spéciale, le fonds FIGD et FELP donneront une visibilité et une transparence totale sur les ressources consacrées à l’investissement public et à la lutte contre la pauvreté".

L'annonce également d'une requalification du système économique polynésien avec une réduction progressive de l'interventionnisme public au bénéfice d'un encouragement de l'initiative privée. Le vice-président a rappelé dans ce contexte l'étude du projet de loi du Pays sur la concurrence, transmis au CESC, et le projet de plan de départs volontaires de 600 à 800 agents de catégorie C et D de la fonction publique territoriale à l'horizon 2015.

"J’ai présenté un certain nombre de mesures claires. J’ai essayé de ne pas faire de poésie budgétaire", a aussi estimé Nuihau Laurey.

Discours de Nuihau Laurey

Monsieur le Président de l’Assemblée
Madame et messieurs les ministres,
Monsieur le Haut-commissaire de la République,
Mesdames et Messieurs les représentants,
Messieurs les parlementaires,
Monsieur le représentant de la Polynésie française au Conseil économique social et environnemental,
Mesdames et Messieurs les journalistes,
Mesdames et Messieurs,

 Aujourd’hui s’ouvre la session budgétaire de notre Assemblée. C’est un moment important de la vie démocratique de notre collectivité. Au terme des discussions qui s’engageront, que je souhaite riches, productives et respectueuses, nous examinerons le projet de budget de notre Pays pour l’année 2014.
 C’est un acte majeur, vous le savez, qui fixera pour l’année à venir les grandes orientations économiques et sociales de notre collectivité.
 C’est un acte qui posera surtout le socle du retour à la croissance tant attendu et qui inscrira sur la durée de la mandature le développement que le gouvernement souhaite impulser à notre pays.
 Pendant prés de 10 années, notre Pays à été laissé à l’abandon :
 Nos entreprises en perdition confrontées à l’effondrement de la commande publique et à l’incompétence gouvernementale ;
 Près de 15 000 emplois détruits ; 30 % des Polynésiens vivants au dessous du seuil de pauvreté ; l’incapacité pour beaucoup à se loger, à éduquer leurs enfants, à se soigner ;
 Notre système de soins menacé par le déséquilibre financier grandissant d’une protection sociale dont les coûts ne sont pas maîtrisés et les ressources de plus en plus limitées du fait des destructions d’emplois.
 Notre système de retraite au bord de l’asphyxie dont la viabilité n’excède pas quelques années, voire quelques mois ;
 Nos comptes publics en déshérence avec l’effondrement de plus de 20 % des recettes fiscales du Pays, une trésorerie exsangue qui l’empêche de pouvoir régler ses fournisseurs, une dette qui atteint des sommets et des bailleurs de fonds aux abonnés absents.
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 Voilà la réalité de notre pays telle que nous l’avons trouvé il y a un peu plus de trois mois.
 Depuis l’installation de la nouvelle majorité et l’entrée en fonction du nouveau gouvernement, nous travaillons pour sortir notre Pays de cette période économique et sociale la plus désastreuse de son histoire.
 En quelques mois beaucoup a été fait :
 La reprise en main du budget avec l’adoption d’un collectif qui permet de redonner de la sincérité à cet acte essentiel pour notre pays ;
 La réforme fiscale qui nous permettra dès l’année 2014 de retrouver une partie de nos ressources financières, au travers d’un relèvement de la CST pour les plus hauts revenus, sans toucher aux plus bas salaires, pour plus de solidarité ;
 Au travers d’une baisse de 5 points de l’impôt sur les bénéfices, pour favoriser l’initiative privée ;
 Au travers de contributions additionnelles pour les entreprises dominantes de ce pays ;
 La mise en œuvre d’une aide d’ugence aux ménages les plus démunis qui subissent de plein fouet et depuis plusieurs années le déclin de notre pays ;
 La mise en place d’un ensemble de dispositions relatives à l’utilisation du foncier public dans le cadre de partenariats public privé facilités, et plus récemment la transmission au CESC d’un projet de loi sur la concurrence et sur la création d’une autorité polynésienne de régulation de la concurrence.
 Oui, le travail gouvernemental a été intense, et votre Assemblée a redoublé d’effort Mr le président.

 Aussi, au nom du Président de la Polynésie française et de l’ensemble des ministres, je tenais à vous en remercier.

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 Mais le chemin qui nous permettra de retouver la croissance est encore long, il demandera des efforts, il nécessitera des changements, il exigera de la persévérance et une foi à toute épreuve.

 Je sais que nous ne partageons pas tous la même vision de l’avenir de notre pays.

 Je sais que l’alternance de 2004 a suscité de nombreux espoirs, rapidement déçus par l’incompétence et l’absence de vision pour notre pays.

 J’entends ceux qui prônent à tue tête l’indépendance, qui serait la solution à tous nos problèmes, le coup de baguette magique qui réglerait nos dettes, solutionnerait le problème de nos retraites, de la prise en charge de nos coûts de santé, de la relance économique de notre pays, Ceux là même qui ont démontré pendant toutes ces années leur incapacité à diriger notre pays, ceux la même qui ont précipité notre collectivité dans un déclin économique ininterrompu, ceux là même qui nous ont mené au fond du gouffre et qui, maintenant touchés par le miracle de l’amnésie collective viennent nous expliquer comment gérer un pays.

 Ceux là même enfin, qui sournoisement agissent en sous main pour repousser l’adoption d’un dispositif d’aide à la création d’emplois destiné à des milliers de nos concitoyens qui ont perdu leur emploi et peinent à se réinsérer dans le monde du travail.

 Vous le savez comme moi, la politique de la terre brûlée n’a jamais profité à ceux qui l’ont mis en œuvre !

 A l’opposé, permettez moi de saluer ici le sens de l’intérêt général des membres du groupe A Tia Porinetia, qui ont démontré ces derniers mois leur capacité à dépasser les clivages politiques primaires, pour soutenir avec la majorité, parfois, tout en étant vigilant, les mesures, comme le Contrat d’Accès à l’Emploi, ou d’autres projets destinées à soulager la détresse de nos concitoyens ou à faciliter le redressement de notre pays.

 J’appelle de mes vœux qu’un tel esprit constructif s’instaure à nouveau et se solidifie tout au long des échanges que nous aurons ces prochaines semaines.

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 Mesdames et messieurs les représentants, nous souhaitons impulser, au travers du budget 2014 un nouvel élan à notre pays.


 Le débat d’orientation budgétaire qui sera au cœur de cette session, sera pour nous l’occasion de nous prononcer sur les enjeux majeurs de notre collectivité, avec pragmatisme et avec réalisme.

 Laissez-moi vous présenter simplement les principaux éléments économiques et financiers qui constitueront la trame du budget que nous soumettrons à votre examen.

 Sans artifices inutiles et sans langue de bois.

 Concrètement, ce budget, pour la première fois depuis de nombreuses années, verra ses recettes de fonctionnement augmenter grâce à la réforme fiscale initiée en juillet dernier.

 Concrètement, notre redressement financier résultera de cet effort collectif, critiqué avec facilité et disons le, parfois avec démagogie par certains d’entre vous, un effort collectif qui était pourtant nécessaire et pour lequel le courage politique a clairement manqué à ceux qui nous ont précédé.

 Pour la première fois, notre trésorerie s’améliorera en 2014 du fait de ces ressources additionnelles et de la mise en œuvre de vraies mesures de maîtrise des dépenses publiques.

 L’avance de trésorerie de 5 milliards que nous sollicitons auprès de l’Etat, remboursable en deux années, à l’inverse de la subvention versée l’année dernière et dilapidée par l’ancienne équipe gouvernementale, permettra de donner un véritable ballon d’oxygène à nos fournisseurs, à nos entreprises, à nos communes.

 Pour la première fois, deux comptes d’affectation spéciale, le fonds FIGD et FELP donneront une visibilité et une transparence totale sur les ressources consacrées à l’investissement public et à la lutte contre la pauvreté.

 Ces deux fonds marquent cette volonté indéfectible du gouvernement de ne rien céder ni sur les actions en faveur des plus démunis, ni sur celles destinées à la relance de l’activité économique et au soutien de nos entreprises.

 Nous solliciterons de toutes les entités publiques des efforts de réduction ou de maîtrise de leurs dépenses.

 Nous inscrirons, au travers de ce budget, les impacts liés à la mise en œuvre d’un plan de départ volontaire destiné aux agents publics, cela en partenariat avec l’Etat.

 Nous prendrons les mesures qui assureront le financement de nos investissements.

 Au delà du recours à des emprunts bancaires classiques, nous solliciterons le marché obligataire plus dynamique, synonyme d’une gestion plus rigoureuse qui a cruellement fait défaut ces dernières années et a été sévèrement sanctionnée par la notation dégradée attribuée à notre collectivité.

 Nous relancerons la commande publique, à travers des investissements structurants.

 Nous devrons retrouver dans ce domaine aussi plus de dynamisme, plus d’ampleur.

 Nous attendons de l’Etat qu’il soit au rendez-vous et qu’il garantisse au partenariat financier qui le lie à la Polynésie la souplesse et l’efficacité nécessaire par une meilleure planification des investissements publics, cela notamment grâce à une collaboration plus efficace en matière de financements croisés avec l’Etat, contrat de projet ou 3IF.

 Nous nous appuierons sur les nouveaux outils que votre assemblée a mis en place pour renforcer le partenariat entre le secteur public et le secteur privé, afin d’assurer l’émergence de projets de grande ampleur à l’image de celui du Mahana Beach.

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 Ce budget marquera l’engagement de notre pays dans sa transition d’une économie trop fortement administrée vers une économie davantage fondée sur l’initiative privée et la créativité individuelle.


 Nous réduirons progressivement et avec réalisme le poids de l’intervention publique par la baisse planifiée des dispositifs de taxation qui participent de la cherté de la vie.

 Le démantèlement de l’impôt sur les transactions et la création d’une imposition (B.N.C, B.I.C….) participera à la modernisation de notre système fiscal et à une meilleure équité et une meilleure efficacité dans l’appréhension des revenus.

 Nous veillerons à maintenir et consolider coûte que coûte notre tissu industriel, source d’une diversité d’emplois, de compétences et de valeur ajoutée pour notre Pays.

 Nous avancerons dans la mise en œuvre de la restructuration de l’action et de l’organisation des pouvoirs publics qui doivent être tournées vers leurs missions essentielles.

 La modernisation de la fonction publique fera l’objet de plusieurs textes, dont certains ont déjà été présentés dès cette semaine au conseil supérieur de la fonction publique.

 Dans les semaines à venir, nous signerons avec l’Etat un pacte de croissance qui sera la pierre angulaire d’un partenariat à nouveau loyal et confiant qui s’articulera sur des engagements réciproques et respectueux des compétences et des prérogatives de chacun.

 Pas à pas, nous avançons et c’est ce que nous allons continuer à faire tout au long de cette période qui s’ouvre avec la session budgétaire.

 Je vous le dis, cette fin d’année sera pleine et vivante, ouverte et constructive.

 Le budget en sera l’acte majeur, car il sera l’expression de cette nouvelle politique porteuse d’avenir et d’espoir pour notre population.

 Il s’appuiera sur les efforts déjà consentis par tous.

 Il sera au rendez-vous du soutien à la croissance et à l’emploi, s’assurant tout autant d’une commande publique dont le financement sera garanti, que des actions d’insertion, de formation, et de retour à l’emploi.

 Je le dis clairement : le centre de gravité du développement de notre Pays doit se déplacer du secteur public, vers le secteur privé.

 Nous devons tout faire pour que notre développement s’appuie sur la création de richesses et non pas sur la distribution de subsides publics, qui au demeurant ne sont que le produit des prélèvements fiscaux effectués sur chaque citoyen de notre pays.

 En créant les conditions d’une concurrence saine, nous favoriserons la reconversion de notre économie

 Des mesures cruciales devront être prises pour assurer la pérennité de la protection sociale généralisée

 Dans ce contexte, nous attendons très clairement le retour de l’Etat au financement du régime de solidarité de la Polynésie française, signe d’une confiance retrouvée et d’un partenariat franc et volontaire pour accompagner la Polynésie dans son œuvre de redressement et de rééquilibrage.

 Mesdames et Messieurs, je terminerai ce discours d’ouverture en vous disant toute ma confiance dans notre avenir commun !

 Ma confiance dans les Polynésiens, ma confiance dans un partenariat renouvelé au sein de la République, ma confiance dans la capacité de notre pays à se relever.

 Merci.

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Jeudi 19 Septembre 2013 à 12:08 | Lu 2383 fois