Pita Sharples, chef de file du Maori party et actuel ministre des affaires Maori
WELLINGTON, lundi 4 juillet 2011 (Flash d'Océanie) – Pita Sharples, chef de file du Maori party et actuel ministre des affaires Maori, a officiellement donné lundi le coup d’envoi d’une nouvelle semaine de la langue Maori, dont l’objectif principal en Nouvelle-Zélande est de promouvoir l’usage de cette langue parlée par le peuple premier de ce pays.
Comme chaque année, les manifestations se multiplieront, sept jours durant et à travers le pays, afin de sensibiliser non seulement les Maori, mais aussi l’ensemble de la population, à cette langue et par conséquent la culture qu’elle véhicule.
Afin de renforcer le message, ces derniers mois, une commission chargée de réfléchir sur les questions liées à la défense de cette langue, dans un rapport remis en avril 2011, a même évoqué l’éventualité de la création d’un ministère dédié à ces questions, ainsi qu’un renforcement des actions d’enseignement en milieu scolaire, ou encore la pratique quotidienne de cette langue dans les foyers.
Dans une volonté affichée d’ouverture de l’univers Maori au reste des composantes de la communauté nationale, le thème retenu cette année est la notion de « manaakitanga », que le directeur de la commission de la langue Maori, Glenis Philip-Barbara, décrit comme le fait de « bien accueillir les étrangers et faire en sorte qu’ils se sentent les bienvenus ».
« C’est un fondement de la coutume et de l’identité Maori, une notion qui a déjà fortement contribué à la réputation néo-zélandais d’hospitalité (…) et qui se fond parfaitement bien avec cet événement incroyable cette année qui est la Coupe du Monde de Rugby », a-t-il ajouté.
« Et donc, tous ceux, quels qu’ils soient, ayant une connaissance, réduite ou étendue, de la langue Maori, sont bien évidemment encouragés à en faire usage, le plus souvent possible, pendant cette période où la Nouvelle-Zélande sera la vitrine du monde », a-t-il appelé.
Cette année aussi, pour soutenir l’événement, la commission de la Langue Maori distribue du matériel censé encourager la pratique de cette langue, que ce soit sous forme de petits livrets de vulgarisation, de dictionnaires Maori-Anglais, ou encore des jeux ou des questionnaires à l’usage des élèves des écoles.
Vers un ministère dédié à la langue Maori ?
Selon le rapport contenant recommandations et publié mi-avril 2011 par la Commission, le dispositif actuel de protection et de promotion de la langue Maori dispose d’un budget annuel de quelque six million de dollars néo-zélandais (325 millions d’euros) pour financer des actions en milieu scolaire, ainsi que la production d’émissions dans cette langue à la radio et à la télévision. Applaudissant ces recommandations, M. Sharples avait alors rappelé que la langue Maori, pour toute la Nouvelle-Zélande, était un « don précieux que nous voulons partager avec la nation tout entière ».
Ces nouvelles recommandations, si elles sont suivies, pourraient, selon lui, permettre de passer d’un statut de langue « en probable voie d’extinction » à un « réel espoir pour l’avenir ».
Selon les dernières études disponibles, environ vingt cinq pour cent de la population Maori actuelle de Nouvelle-Zélande (soit environ 130.000 personnes) déclarent être locuteurs du Maori à des degrés divers.
Le rugby au secours du Maori ?
Mi-juin 2010, à l’approche de la Coupe du Monde IRB de rugby, qui se tiendra à partir de septembre 201 en Nouvelle-Zélande, plusieurs groupes de supporters des All Blacks ont exprimé leur inquiétude concernant le fait que, selon eux, la plupart des citoyens de ce pays sont incapables de chanter les paroles en langue Maori contenue dans l’hymne national.
Roy Nielsen, l’un de ces fans inquiets, d’origine européenne et habitant de la petite ville de Palmerston North, avait alors saisi par courrier les députés du Parlement, mais aussi les médias.
Il suggérait alors que des mesures soient rapidement prises afin de lancer une campagne d’information et de sensibilisation pour qu’en 2011, lors de la Coupe du Monde, le monde entier ne voit pas des images de Néo-zélandais articulant approximativement des mots dont ils ne connaissent pas la signification.
La première suggestion de ce fan citoyen serait que, lors des retransmissions des matches des All Blacks, dès maintenant, le chant de l’hymne maori soit sous-titré à la télévision, en mode karaoké.
Selon l’UNESCO, qui publie notamment chaque année un Atlas des langues en danger dans le monde, le Maori aurait par ailleurs vu augmenter le nombre de locuteurs, « grâce à des politiques linguistiques favorables ».
dictionnaire online
Lors des éditions précédentes de cette semaine nationale de la langue Maori (« Te Wiki o te Reo Maori »), en Nouvelle-Zélande, des actions originales ont aussi été lancées, comme par exemple une version électronique d'un dictionnaire Anglais-Maori.
Selon ses concepteurs, cet ouvrage (« I-Papakupu » en langue Maori), même dans sa version électronique, pourra désormais permettre à tout les « Maoristes » à travers le monde d'avoir accès à cette ressource, qui est le fruit d'un long travail de collaboration d'une équipe de plusieurs linguistes.
Sous forme de clé USB, cette somme de travail a été officiellement portée sur les fonds baptismaux en 2008 par le ministre des affaires Maori, à l'occasion d'une réception au Musée National Te Papa (consacré à la culture indigène).
Les textos aussi
"Le lancement de ce I-Papakupu participe des efforts afin de faire en sorte que notre Te Reo reste une langue vivante, en des temps numériques (…) C'est aussi un enregistrement de la langue Maori, décrite et définie à travers un regard Maori", avait alors lancé le ministre.
Ce dictionnaire (accessible en ligne sur www.koreromaori.co.nz) comprend quelque 25.000 mots et pour chacun, des définitions, mais aussi des synonymes.
Toujours dans le cadre de cet effort, lancé il y a plusieurs années, de revitalisation de la langue indigène, un temps menacée, cette semaine nationale est allée jusqu’à mettre en place à l'arrière de transports scolaires un message à première vue incompréhensible pour les automobilistes.
« 22RU 4KAMAUA » signifie en fait « tuturu whakamaua », mais sur le mode texto, le plus populaire auprès des jeunes et nombreux usagers de téléphones mobiles.
La signification de ce message, à caractère à la fois ludique et incitatif, est simple : c'est en fait un défi aux lecteurs pour qu'ils restent attachés à cette langue et fassent à leur tour passer le message par leur téléphone mobile.
Pour les besoins de l'exercice, plusieurs chefs de clans Maori ont planché sur le moyen de retranscrire en « langue texto » un Maori censé rester compréhensible pour le plus grand nombre.
Ils sont une nouvelle fois tombés d'accord sur des règles simples, qui privilégient une retranscription essentiellement phonétique.
"En fait, on l'a testé même sur des Pakeha (d'ethnie européenne) et ils ont compris du premier coup", assurait alors Paul Stanley, Président du clan (Iwi) Ngaiterangi.
Les concepteurs de cette opération avaient ainsi mis au point toute une série de messages, qui se veulent autant de « teasers ».
Parmi ceux-là : des expressions ou interpellations comme « E 2 ki te Wro » (E tu ki te wero, « Relève le défi »), « Hiremy kitky » (Haere mai ki te kai, « Viens manger »), et même des noms de lieux emblématiques (Waikato devient ainsi « ?kato »)
Tout au long de cette semaine 2008, le quotidien New Zealand Herald avait pour sa part décidé de se prendre au jeu en publiant chaque jour des articles en Maori.
Il y a plusieurs années déjà, un groupe de développeurs programmateurs avait réussi à mettre au point et à faire approuver par le géant Microsoft la version Maori de tout le système d’exploitation.
Samoa aussi chérit sa langue
Toujours en matière de langues polynésiennes, début juin 2011, comme chaque fois au cours de ces cinq dernières années, l’État polynésien de Samoa, doyen des anciennes colonies océaniennes à avoir accédé à l’indépendance, a fêté non seulement le 49ème anniversaire de son indépendance, mais aussi la « semaine de la langue samoane ».
Ces célébrations culturelles ont eu lieu sur le territoire national, mais aussi à l’étranger, dans la grande région, où résident d’importantes communautés expatriées et établies de longue date.
La plus influente de ces communautés est celle de Nouvelle-Zélande (Auckland principalement), où les Samoans sont plus de cent trente mille et représentent la seconde population polynésienne, en ordre d’importance, juste après les Maoris indigènes, et le quatrième groupe ethnique, derrière les Européens, les Maori et les Asiatiques.
« Semaine de la langue samoane »
D’autres communautés importantes résident aussi sur la côte Ouest des États-Unis ou encore à Hawaii et en Australie.
Chez les résidents nationaux tout comme au sein de la diaspora, cet anniversaire a une fois encore été, cette année, l’occasion de marquer la « Semaine de la langue samoane », série de manifestations censées valoriser cette langue, en particulier chez les jeunes générations urbanisées, comme celles vivant en Nouvelle-Zélande.
Cette semaine s’est tenue du 1er au 7 juin 2011.
Elle a combiné des événements et manifestations à caractère culture, sportif ou éducatif avec un accent particulier sur la sensibilisation aux questions de santé et de style de vie.
Le thème retenu est d’ailleurs « "Samoa Ola » (pour un Samoa actif).
En Nouvelle-Zélande, cette manifestation a été créée en 2007 et passe donc cette année la barre de la cinquième édition.
« Les cultures océaniennes contribuent de manière significative à ce qui fait l’unicité de la Nouvelle-Zélande. Et cette semaine de la langue samoane est un de ces moments, pour nous tous, d’apprécier de manière positive une partie de cette spécificité culturelle », a estimé la ministre néo-zélandaise chargée des affaires des îles du Pacifique, Mme Georgina te Heuheu.
En Nouvelle-Zélande, le Samoan est la troisième langue parlée, derrière l’Anglais et le Maori.
Selon l’UNESCO: Les langues océaniennes se portent plutôt mieux qu’ailleurs
Lors du lancement, début février 2009, de la nouvelle édition de l’Atlas des langues en danger dans le monde, l’UNESCO (Organisation pour l’éducation, la science et la culture des Nations-Unies) soulignait pour sa part que même si quelque 2.500 langues, à travers le monde, sont considérées comme menacées à des degrés divers, les langues océaniennes ne sont toutefois pas trop mal loties.
L’UNESCO avait aussi salué les « politiques linguistiques favorables » pratiquées par certains pays, dont la Nouvelle-Zélande vis-à-vis de la langue indigène Maori, ce qui aurait fortement contribué à augmenter le nombre de locuteurs.
Toutefois, sur le terrain et notamment en Nouvelle-Zélande, les avis ont été beaucoup plus nuancés.
En 2009, à l’occasion de la journée nationale marquant l’anniversaire de la signature du Traité de Waitangi (scellant un accord foncier entre chefferies maori et la couronne britannique), la Commission des Langues Maori estimait que la pratique de cette langue indigène et fortement identitaire, bien qu’elle ne soit encore en diminution (avec environ 157.000 locuteurs), serait plutôt en perte de vitesse.
Huhana Rokx, qui dirige cette commission maori, a interprété ces indicateurs comme des signes d’alarme qui devaient amener les autorités à réagir et à lancer de nouvelles actions de promotion de cette langue indigène, surtout chez les classes jeunes.
Dans la région Pacifique, l’Australie compte ainsi 108 langues se trouvant en danger à des degrés divers.
Mais dans le Pacifique insulaire, en particulier en Mélanésie et en Nouvelle-Zélande, les dernières statistiques donnent plutôt des signes d’espoir.
En Papouasie-Nouvelle-Guinée, pays considéré comme possédant le plus riche patrimoine linguistique de la planète (plus de 800 langues y seraient parlées), le nombre de ces langues considérées comme en danger est « relativement peu élevé » (88).
D’autres langues, pourtant considérées comme éteintes, font l’objet d’une active revitalisation et seraient même sur le point de regagner un statut de langues vivantes.
L’UNESCO place dans cette catégorie le sîshëë (Nouvelle Calédonie), au même plan que le cornique (Cornouailles).
Cet Atlas de l’UNESCO, qui est disponible sous forme de site internet interactif, permet des recherches selon plusieurs critères et classe les 2 500 langues en danger répertoriées suivant cinq niveaux de vitalité différents : vulnérable, en danger, sérieusement en danger, en situation critique et éteinte (depuis 1950), a expliqué l’UNESCO en guise de mode d’emploi.
« Certaines de ses données sont particulièrement inquiétantes : sur les quelque 6.000 langues existant dans le monde, plus de 200 langues se sont éteintes au cours des trois dernières générations, 538 sont en situation critique, 502 sérieusement en danger, 632 en danger et 607 vulnérables », annonce l’organisation onusienne, qui précise par ailleurs que « 199 langues comptent moins de dix locuteurs et 178 autres langues entre 10 et 50 locuteurs ».
« La disparition d’une langue aboutit à la disparition de nombreuses formes de patrimoine culturel immatériel, en particulier du précieux héritage que constituent les traditions et les expressions orales – des poèmes et légendes jusqu’aux proverbes et aux plaisanteries – de la communauté qui la parlait. La perte des langues se fait aussi au détriment du rapport que l’humanité entretient avec la biodiversité, car elles véhiculent de nombreuses connaissances sur la nature et l’univers », a commenté Koïchiro Matsuura, Directeur général de l’UNESCO.
un monde de pensée structuré de manière unique
« Chaque langue est un monde de pensée structuré de manière unique », estime le linguiste australien Christopher Moseley, qui a dirigé la publication de cet Atlas onusien.
Mais selon lui, les phénomènes d’extinction de langues ne sont pas systématiquement causés par les langues qu’il définit comme « coloniales » (Anglais, Français, Espagnol).
« Il serait naïf et simpliste d’affirmer (cela) (…) Le phénomène relève d’un subtil équilibre des forces et cet Atlas permet à chacun de mieux comprendre cet équilibre », analyse-t-il.
L’Atlas montre aussi que pour des raisons économiques, du fait de politiques linguistiques différentes ou de phénomènes sociologiques, une langue n’a souvent pas le même degré de vitalité suivant les pays où elle est parlée.
En France métropolitaine, 26 langues sont en danger : 13 sérieusement en danger, 8 en danger et 5 en situation vulnérable, selon les mêmes sources.
Ce projet d’atlas interactif de l’UNESCO (financé par la Norvège) s’inscrit dans une logique de préservation des langues, au titre de la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel et de la biodiversité linguistique mondiale.
6.700 langues parlées dans le monde
L’UNESCO estime qu’environ 6.700 langues sont parlées dans le monde.
Sur ce total, la moitié serait en danger de disparition d’ici la fin du 21ème siècle.
« C'est un processus qui peut être freiné seulement si des actions urgentes sont prises par les gouvernements et les communautés de locuteurs », a lancé l’UNESCO la semaine dernière à l’issue de sa dernière réunion consacrée aux langues en danger.
« Les langues constituent l'un des outils principaux de l'humanité pour interagir et pour exprimer des idées, des émotions, des connaissances, des souvenirs et des valeurs. Les langues sont aussi les principaux véhicules d'expressions culturelles et du patrimoine culturel immatériel, essentiels à l'identité des individus et des groupes. La sauvegarde des langues en danger est donc une tâche cruciale dans la maintenance de la diversité culturelle dans le monde », rappelle l’organisation.
pad
*** Tous les détails sur la semaine du Maori à l’adresse suivante (en Anglais)
http://www.korero.maori.nz/
Comme chaque année, les manifestations se multiplieront, sept jours durant et à travers le pays, afin de sensibiliser non seulement les Maori, mais aussi l’ensemble de la population, à cette langue et par conséquent la culture qu’elle véhicule.
Afin de renforcer le message, ces derniers mois, une commission chargée de réfléchir sur les questions liées à la défense de cette langue, dans un rapport remis en avril 2011, a même évoqué l’éventualité de la création d’un ministère dédié à ces questions, ainsi qu’un renforcement des actions d’enseignement en milieu scolaire, ou encore la pratique quotidienne de cette langue dans les foyers.
Dans une volonté affichée d’ouverture de l’univers Maori au reste des composantes de la communauté nationale, le thème retenu cette année est la notion de « manaakitanga », que le directeur de la commission de la langue Maori, Glenis Philip-Barbara, décrit comme le fait de « bien accueillir les étrangers et faire en sorte qu’ils se sentent les bienvenus ».
« C’est un fondement de la coutume et de l’identité Maori, une notion qui a déjà fortement contribué à la réputation néo-zélandais d’hospitalité (…) et qui se fond parfaitement bien avec cet événement incroyable cette année qui est la Coupe du Monde de Rugby », a-t-il ajouté.
« Et donc, tous ceux, quels qu’ils soient, ayant une connaissance, réduite ou étendue, de la langue Maori, sont bien évidemment encouragés à en faire usage, le plus souvent possible, pendant cette période où la Nouvelle-Zélande sera la vitrine du monde », a-t-il appelé.
Cette année aussi, pour soutenir l’événement, la commission de la Langue Maori distribue du matériel censé encourager la pratique de cette langue, que ce soit sous forme de petits livrets de vulgarisation, de dictionnaires Maori-Anglais, ou encore des jeux ou des questionnaires à l’usage des élèves des écoles.
Vers un ministère dédié à la langue Maori ?
Selon le rapport contenant recommandations et publié mi-avril 2011 par la Commission, le dispositif actuel de protection et de promotion de la langue Maori dispose d’un budget annuel de quelque six million de dollars néo-zélandais (325 millions d’euros) pour financer des actions en milieu scolaire, ainsi que la production d’émissions dans cette langue à la radio et à la télévision. Applaudissant ces recommandations, M. Sharples avait alors rappelé que la langue Maori, pour toute la Nouvelle-Zélande, était un « don précieux que nous voulons partager avec la nation tout entière ».
Ces nouvelles recommandations, si elles sont suivies, pourraient, selon lui, permettre de passer d’un statut de langue « en probable voie d’extinction » à un « réel espoir pour l’avenir ».
Selon les dernières études disponibles, environ vingt cinq pour cent de la population Maori actuelle de Nouvelle-Zélande (soit environ 130.000 personnes) déclarent être locuteurs du Maori à des degrés divers.
Le rugby au secours du Maori ?
Mi-juin 2010, à l’approche de la Coupe du Monde IRB de rugby, qui se tiendra à partir de septembre 201 en Nouvelle-Zélande, plusieurs groupes de supporters des All Blacks ont exprimé leur inquiétude concernant le fait que, selon eux, la plupart des citoyens de ce pays sont incapables de chanter les paroles en langue Maori contenue dans l’hymne national.
Roy Nielsen, l’un de ces fans inquiets, d’origine européenne et habitant de la petite ville de Palmerston North, avait alors saisi par courrier les députés du Parlement, mais aussi les médias.
Il suggérait alors que des mesures soient rapidement prises afin de lancer une campagne d’information et de sensibilisation pour qu’en 2011, lors de la Coupe du Monde, le monde entier ne voit pas des images de Néo-zélandais articulant approximativement des mots dont ils ne connaissent pas la signification.
La première suggestion de ce fan citoyen serait que, lors des retransmissions des matches des All Blacks, dès maintenant, le chant de l’hymne maori soit sous-titré à la télévision, en mode karaoké.
Selon l’UNESCO, qui publie notamment chaque année un Atlas des langues en danger dans le monde, le Maori aurait par ailleurs vu augmenter le nombre de locuteurs, « grâce à des politiques linguistiques favorables ».
dictionnaire online
Lors des éditions précédentes de cette semaine nationale de la langue Maori (« Te Wiki o te Reo Maori »), en Nouvelle-Zélande, des actions originales ont aussi été lancées, comme par exemple une version électronique d'un dictionnaire Anglais-Maori.
Selon ses concepteurs, cet ouvrage (« I-Papakupu » en langue Maori), même dans sa version électronique, pourra désormais permettre à tout les « Maoristes » à travers le monde d'avoir accès à cette ressource, qui est le fruit d'un long travail de collaboration d'une équipe de plusieurs linguistes.
Sous forme de clé USB, cette somme de travail a été officiellement portée sur les fonds baptismaux en 2008 par le ministre des affaires Maori, à l'occasion d'une réception au Musée National Te Papa (consacré à la culture indigène).
Les textos aussi
"Le lancement de ce I-Papakupu participe des efforts afin de faire en sorte que notre Te Reo reste une langue vivante, en des temps numériques (…) C'est aussi un enregistrement de la langue Maori, décrite et définie à travers un regard Maori", avait alors lancé le ministre.
Ce dictionnaire (accessible en ligne sur www.koreromaori.co.nz) comprend quelque 25.000 mots et pour chacun, des définitions, mais aussi des synonymes.
Toujours dans le cadre de cet effort, lancé il y a plusieurs années, de revitalisation de la langue indigène, un temps menacée, cette semaine nationale est allée jusqu’à mettre en place à l'arrière de transports scolaires un message à première vue incompréhensible pour les automobilistes.
« 22RU 4KAMAUA » signifie en fait « tuturu whakamaua », mais sur le mode texto, le plus populaire auprès des jeunes et nombreux usagers de téléphones mobiles.
La signification de ce message, à caractère à la fois ludique et incitatif, est simple : c'est en fait un défi aux lecteurs pour qu'ils restent attachés à cette langue et fassent à leur tour passer le message par leur téléphone mobile.
Pour les besoins de l'exercice, plusieurs chefs de clans Maori ont planché sur le moyen de retranscrire en « langue texto » un Maori censé rester compréhensible pour le plus grand nombre.
Ils sont une nouvelle fois tombés d'accord sur des règles simples, qui privilégient une retranscription essentiellement phonétique.
"En fait, on l'a testé même sur des Pakeha (d'ethnie européenne) et ils ont compris du premier coup", assurait alors Paul Stanley, Président du clan (Iwi) Ngaiterangi.
Les concepteurs de cette opération avaient ainsi mis au point toute une série de messages, qui se veulent autant de « teasers ».
Parmi ceux-là : des expressions ou interpellations comme « E 2 ki te Wro » (E tu ki te wero, « Relève le défi »), « Hiremy kitky » (Haere mai ki te kai, « Viens manger »), et même des noms de lieux emblématiques (Waikato devient ainsi « ?kato »)
Tout au long de cette semaine 2008, le quotidien New Zealand Herald avait pour sa part décidé de se prendre au jeu en publiant chaque jour des articles en Maori.
Il y a plusieurs années déjà, un groupe de développeurs programmateurs avait réussi à mettre au point et à faire approuver par le géant Microsoft la version Maori de tout le système d’exploitation.
Samoa aussi chérit sa langue
Toujours en matière de langues polynésiennes, début juin 2011, comme chaque fois au cours de ces cinq dernières années, l’État polynésien de Samoa, doyen des anciennes colonies océaniennes à avoir accédé à l’indépendance, a fêté non seulement le 49ème anniversaire de son indépendance, mais aussi la « semaine de la langue samoane ».
Ces célébrations culturelles ont eu lieu sur le territoire national, mais aussi à l’étranger, dans la grande région, où résident d’importantes communautés expatriées et établies de longue date.
La plus influente de ces communautés est celle de Nouvelle-Zélande (Auckland principalement), où les Samoans sont plus de cent trente mille et représentent la seconde population polynésienne, en ordre d’importance, juste après les Maoris indigènes, et le quatrième groupe ethnique, derrière les Européens, les Maori et les Asiatiques.
« Semaine de la langue samoane »
D’autres communautés importantes résident aussi sur la côte Ouest des États-Unis ou encore à Hawaii et en Australie.
Chez les résidents nationaux tout comme au sein de la diaspora, cet anniversaire a une fois encore été, cette année, l’occasion de marquer la « Semaine de la langue samoane », série de manifestations censées valoriser cette langue, en particulier chez les jeunes générations urbanisées, comme celles vivant en Nouvelle-Zélande.
Cette semaine s’est tenue du 1er au 7 juin 2011.
Elle a combiné des événements et manifestations à caractère culture, sportif ou éducatif avec un accent particulier sur la sensibilisation aux questions de santé et de style de vie.
Le thème retenu est d’ailleurs « "Samoa Ola » (pour un Samoa actif).
En Nouvelle-Zélande, cette manifestation a été créée en 2007 et passe donc cette année la barre de la cinquième édition.
« Les cultures océaniennes contribuent de manière significative à ce qui fait l’unicité de la Nouvelle-Zélande. Et cette semaine de la langue samoane est un de ces moments, pour nous tous, d’apprécier de manière positive une partie de cette spécificité culturelle », a estimé la ministre néo-zélandaise chargée des affaires des îles du Pacifique, Mme Georgina te Heuheu.
En Nouvelle-Zélande, le Samoan est la troisième langue parlée, derrière l’Anglais et le Maori.
Selon l’UNESCO: Les langues océaniennes se portent plutôt mieux qu’ailleurs
Lors du lancement, début février 2009, de la nouvelle édition de l’Atlas des langues en danger dans le monde, l’UNESCO (Organisation pour l’éducation, la science et la culture des Nations-Unies) soulignait pour sa part que même si quelque 2.500 langues, à travers le monde, sont considérées comme menacées à des degrés divers, les langues océaniennes ne sont toutefois pas trop mal loties.
L’UNESCO avait aussi salué les « politiques linguistiques favorables » pratiquées par certains pays, dont la Nouvelle-Zélande vis-à-vis de la langue indigène Maori, ce qui aurait fortement contribué à augmenter le nombre de locuteurs.
Toutefois, sur le terrain et notamment en Nouvelle-Zélande, les avis ont été beaucoup plus nuancés.
En 2009, à l’occasion de la journée nationale marquant l’anniversaire de la signature du Traité de Waitangi (scellant un accord foncier entre chefferies maori et la couronne britannique), la Commission des Langues Maori estimait que la pratique de cette langue indigène et fortement identitaire, bien qu’elle ne soit encore en diminution (avec environ 157.000 locuteurs), serait plutôt en perte de vitesse.
Huhana Rokx, qui dirige cette commission maori, a interprété ces indicateurs comme des signes d’alarme qui devaient amener les autorités à réagir et à lancer de nouvelles actions de promotion de cette langue indigène, surtout chez les classes jeunes.
Dans la région Pacifique, l’Australie compte ainsi 108 langues se trouvant en danger à des degrés divers.
Mais dans le Pacifique insulaire, en particulier en Mélanésie et en Nouvelle-Zélande, les dernières statistiques donnent plutôt des signes d’espoir.
En Papouasie-Nouvelle-Guinée, pays considéré comme possédant le plus riche patrimoine linguistique de la planète (plus de 800 langues y seraient parlées), le nombre de ces langues considérées comme en danger est « relativement peu élevé » (88).
D’autres langues, pourtant considérées comme éteintes, font l’objet d’une active revitalisation et seraient même sur le point de regagner un statut de langues vivantes.
L’UNESCO place dans cette catégorie le sîshëë (Nouvelle Calédonie), au même plan que le cornique (Cornouailles).
Cet Atlas de l’UNESCO, qui est disponible sous forme de site internet interactif, permet des recherches selon plusieurs critères et classe les 2 500 langues en danger répertoriées suivant cinq niveaux de vitalité différents : vulnérable, en danger, sérieusement en danger, en situation critique et éteinte (depuis 1950), a expliqué l’UNESCO en guise de mode d’emploi.
« Certaines de ses données sont particulièrement inquiétantes : sur les quelque 6.000 langues existant dans le monde, plus de 200 langues se sont éteintes au cours des trois dernières générations, 538 sont en situation critique, 502 sérieusement en danger, 632 en danger et 607 vulnérables », annonce l’organisation onusienne, qui précise par ailleurs que « 199 langues comptent moins de dix locuteurs et 178 autres langues entre 10 et 50 locuteurs ».
« La disparition d’une langue aboutit à la disparition de nombreuses formes de patrimoine culturel immatériel, en particulier du précieux héritage que constituent les traditions et les expressions orales – des poèmes et légendes jusqu’aux proverbes et aux plaisanteries – de la communauté qui la parlait. La perte des langues se fait aussi au détriment du rapport que l’humanité entretient avec la biodiversité, car elles véhiculent de nombreuses connaissances sur la nature et l’univers », a commenté Koïchiro Matsuura, Directeur général de l’UNESCO.
un monde de pensée structuré de manière unique
« Chaque langue est un monde de pensée structuré de manière unique », estime le linguiste australien Christopher Moseley, qui a dirigé la publication de cet Atlas onusien.
Mais selon lui, les phénomènes d’extinction de langues ne sont pas systématiquement causés par les langues qu’il définit comme « coloniales » (Anglais, Français, Espagnol).
« Il serait naïf et simpliste d’affirmer (cela) (…) Le phénomène relève d’un subtil équilibre des forces et cet Atlas permet à chacun de mieux comprendre cet équilibre », analyse-t-il.
L’Atlas montre aussi que pour des raisons économiques, du fait de politiques linguistiques différentes ou de phénomènes sociologiques, une langue n’a souvent pas le même degré de vitalité suivant les pays où elle est parlée.
En France métropolitaine, 26 langues sont en danger : 13 sérieusement en danger, 8 en danger et 5 en situation vulnérable, selon les mêmes sources.
Ce projet d’atlas interactif de l’UNESCO (financé par la Norvège) s’inscrit dans une logique de préservation des langues, au titre de la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel et de la biodiversité linguistique mondiale.
6.700 langues parlées dans le monde
L’UNESCO estime qu’environ 6.700 langues sont parlées dans le monde.
Sur ce total, la moitié serait en danger de disparition d’ici la fin du 21ème siècle.
« C'est un processus qui peut être freiné seulement si des actions urgentes sont prises par les gouvernements et les communautés de locuteurs », a lancé l’UNESCO la semaine dernière à l’issue de sa dernière réunion consacrée aux langues en danger.
« Les langues constituent l'un des outils principaux de l'humanité pour interagir et pour exprimer des idées, des émotions, des connaissances, des souvenirs et des valeurs. Les langues sont aussi les principaux véhicules d'expressions culturelles et du patrimoine culturel immatériel, essentiels à l'identité des individus et des groupes. La sauvegarde des langues en danger est donc une tâche cruciale dans la maintenance de la diversité culturelle dans le monde », rappelle l’organisation.
pad
*** Tous les détails sur la semaine du Maori à l’adresse suivante (en Anglais)
http://www.korero.maori.nz/