CANBERRA, jeudi 8 mars 2012 (Flash d’Océanie) – La posture la plus dure, au plan international et régional, concernant le non-retour rapide des îles Fidji à la démocratie, après le putsch du 5 décembre 2006, serait en train de s’infléchir, notamment de la part de l’Australie et du Commonwealth.
Bob Carr, tout récemment nommé chef de la diplomatie australienne, en remplacement de Kevin Rudd (qui avait démissionné fin février 2012 sur fond de rivalités et de velléités de retour à la tête du gouvernement), serait sur le point de rencontrer son homologue néo-zélandais Murray McCully lors d’un déplacement à Wellington, vendredi 9 mars 2012, annonce par avance la presse australienne.
Au menu de ces entretiens réguliers entre les deux diplomaties : un infléchissement de leur position commune (également adoptée par le Commonwealth et le Forum des Îles du Pacifique) vis-à-vis de Fidji, qui subit des sanctions notamment concernant les visas aux individus (et à leurs proches parents) participant au régime actuel mené par le Contre-amiral Franck Bainimarama.
Le Premier ministre néo-zélandais John Key pourrait aussi participer à ces pourparlers, qui pourraient aussi avoir des répercussions sur la suspension du statut de membre plein de Fidji au sein du Forum des Îles du Pacifique (FIP), début mai 2009, selon les mêmes sources.
Le Commonwealth s’était ensuite aligné sur cette position en frappant Fidji des mêmes sanctions, en septembre 2009.
Dans ces conditions, la coopération entre Fidji et l’Australie, la Nouvelle-Zélande, mais aussi le FIP, le Commonwealth et l’union Européenne, se limitait depuis à des domaines strictement humanitaires, comme l’aide à la suite de catastrophes naturelles.
Les entretiens de Wellington, en fin de semaine, devraient aussi aborder, de manière plus générale, les dossiers « d’intérêt commun » entre la Nouvelle-Zélande et l’Australie, comme par exemple la Mission Régionale d’Assistance aux Îles Salomon (RAMSI, force de stabilisation installée dans cet archipel depuis juillet 2003), le FIP et des dossiers de sécurité régionale.
Depuis fin 2009, le gouvernement néo-zélandais entretient toutefois des contacts réguliers avec le gouvernement fidjien, dans le but affiché de ne pas rompre les lignes de communication et de dialogue.
Face à la posture « dure » des grands voisins de la région, et à l’intensification des relations, ces dernières années, entre Fidji et des pays comme la Chine ou plus récemment encore la Russie, les États-Unis ont aussi fortement marqué un retour aux affaires dans le Pacifique, avec une politique de « réengagement » vis-à-vis de Fidji.
Outre l’inauguration mi-2011 d’une de ses plus grandes ambassades dans la région, la nouvelle ambassadrice américaine, Frankie Reed, entretiens des contacts réguliers, voire ostensibles, avec le Contre-amiral, renforçant ainsi au passage le message selon lequel la politique d’ostracisme vis-à-vis de Fidji ne fonctionne pas.
M. Bainimarama, au cours d’une rare interview diffusée le week-end dernier via Internet
http://www.youtube.com/watch?v=qFSrcb-IX-c&feature=youtu.be
et sur plusieurs chaînes de télévision australiennes et néo-zélandaises, allait même jusqu’à se demander publiquement pourquoi Canberra ne jugeait pas utile de s’inquiéter au sujet de sa perte d’influence dans sa proche région.
Mises en garde de toutes parts
Au plan intérieur aussi, en Australie, les deux principaux groupe de réflexion (think-tanks), l’ASPI (Australian Strategic Policy Institute) et le Lowy Institute for International Policy, ont également publié ces derniers mois des rapports alarmistes faisant le bilan des relations de l’Australie avec sa proche région.
Ces rapports soulignaient notamment l’impact du dossier fidjien sur les affaires régionales.
Mercredi, aussi, l’opposition parlementaire australienne, via sa porte-parole pour les affaires étrangères, la conservatrice Julie Bishop, a lancé un appel public à M. Carr, nouveau chef de la diplomatie, pour qu’il « renouvelle sa stratégie » et rouvre le dialogue avec Suva et son homme fort.
Mission du Commonwealth à Fidji
Ces évolutions interviennent aussi alors que le Commonwealth envoie à Fidji une délégation de haut niveau qui a commencé à évaluer la situation sur e terrain, du 7 au 9 mars 2012.
Cette mission de quatre membres, conduite par la Secrétaire Générale adjointe du Commonwealth, Mme Mmasekgoa Masire-Mwamba (du Botswana), a pour but de s’entretenir directement avec les autorités fidjiennes actuelles, « mais aussi d’autres acteurs », précise le Commonwealth.
Mme Masire-Mwamba se spécialise dans les affaires politiques, juridiques, constitutionnelles et de droits humains.
Objectif, selon la responsable : déterminer de quelle manière le Commonwealth peut poursuivre sa politique d’encouragement et de soutien en vue du rétablissement de la démocratie, pour que Fidji puisse redevenir membre plein de la famille du Commonwealth », a-t-elle déclaré.
Une telle décision devrait être prise d’abord par le Groupe Ministériel d’Action du Commonwealth (CMAG) lors de sa prochaine réunion.
Lors de son interview du week-end dernier, M. Bainimarama, interrogé au sujet du Commonwealth, et la Reine d’Angleterre (qui le préside), soutenait qu’à ses yeux et à ceux de tous les Fidjiens, Elizabeth II était toujours la « Reine de Fidji ».
Le 10 février 2012, le nouvel ambassadeur (Haut-commissaire selon la terminologie du Commonwealth) de Fidji au Royaume-Uni, Solo Mara, en présentant ses lettres de créances à la monarque, avait pris le temps « d’informer la Reine au sujet des évolutions politiques et socio-économiques, y compris les réformes en cours de mise en œuvre », ainsi que sur la volonté de « construire un Fidji meilleur pour tous ses citoyens », insistait le ministère fidjien de l’information.
Au cours de cette entrevue le nouvel émissaire de Suva avait une nouvelle fois rappelé que le calendrier annoncé de retour à la démocratie prévoyait des élections générales au cours du dernier trimestre 2014.
Avant cela, un processus de consultation et d’élaboration d’une nouvelle Constitution (la précédente ayant été abrogée en avril 2009) est sur el point d’être lancé.
Date annoncée de fin des travaux : septembre 2013.
Il devrait aussi être assorti de réformes électorales visant à supprimer l’ancien système de « sièges réservés » à l’une ou l’autre des deux principales ethnies de l’archipel, le Fidjiens indigènes et ceux d’origine indienne (venus à la fin du dix-neuvième siècle pour cultiver et récolter la canne à sucre).
« Sa Majesté a répondu en exprimant le souhait que notre pays réalise les réformes politiques qu’il a choisies et retrouve prochainement sa place au sein de la famille des nations du Commonwealth », avait rapporté le ministère fidjien de l’information.
Préparation des élections 2014 : une mission onusienne ouvre le chantier
Une autre mission est attendue début mars 2012 à Fidji : elle viendra du siège new-yorkais des Nations-Unies et sa mission sera d’évaluer l’étendue des besoins en vue de préparer et d’organiser des élections législatives toujours annoncées localement pour le dernier trimestre 2014.
Cette mission avait été proposée par l’ONU, mais avant que d’accepter cette offre, le gouvernement local avait stipulé que ses travaux et surtout sa composition devaient être essentiellement « techniques », « neutres » et « sans préjugés », avait insisté l’Attorney-General (chef des services juridiques du gouvernement), Aiyaz Sayed-Khaiyum.
Ce dernier a insisté sur la nécessité de « fournir une évaluation objective pour que Fidji conduise des élections libres et justes ».
M. Sayed-Khaiyum, ces derniers mois, a régulièrement fustigé les dernières législatives, conduites en mai 2006, pour lesquelles, malgré la présence de nombreuses missions internationales d’observateurs, de nombreuses irrégularités ont été constatées.
La venue de cette équipe onusienne (du département d’aides aux élections au siège de New York) a été annoncée pour début mars 2012, avec plusieurs champs d’investigation et d’évaluation, dans les domaines des besoins en matériel (urnes) ou encore de personnel.
Depuis plusieurs mois, le gouvernement fidjien annonce par ailleurs son intention e conduire ces élections via un système électronique, pour lequel il a aussi annoncé ces derniers jours le choix d’une société canadienne, CODE Inc., basée à Ottawa, en tant que prestataire de services,
Onze sociétés (quatre locales et sept étrangères) étaient sur les rangs, a précisé le gouvernement dans le cadre de cet appel d’offres.
« Fidji continue à suivre les recommandations du rapport de l’Union Européenne relatif aux élections de 2006, rapport dans lequel des irrégularités ont été citées, concernant les listes électorales, les pratiques de vote, comme par exemple ce chiffre de 101 pour cent affiché comme taux de participation dans une circonscription, ou le fait que certains groupes d’électeurs se soient vus refusés le droit de voter », souligne l’influent Attorney General.
« Fidji avait envoyé des invitations à la communauté internationale afin qu’elle participe financièrement au processus d’enregistrement électronique des électeurs. Toutefois, jusqu’ici, aucun pays ou agence multilatérale n’a choisi de participer », ajoute-t-il dans un communiqué en date du 7 février 2012.
Le gouvernement fidjien, pour sa part, a annoncé lors de la présentation de son budget 2012 une provision de l’ordre de quatre millions de ses dollars (1,7 million d’euros) pour ces opérations de reconstitution des listes électorales.
L’âge minimum des électeurs a été rabaissé de 21 à 18 ans « pour faire en sorte que la population des jeunes adultes ait son mot à dire » au cours de ce scrutin.
Avant ces élections, 2012 devrait aussi voir l’ouverture d’un autre chantier annoncé : celui de la rédaction d’une nouvelle Constitution (la précédente a été abrogée en avril 2009).
Ce processus a été présenté comme nécessaire afin de toiletter l’ancien texte qui, selon le Contre-amiral, institutionnalisait des facteurs clivants au sein de la société fidjienne, en réservant notamment certaines circonscriptions à l’un ou l’autre des deux principaux groupes ethniques de l’archipel (les Fidjiens indigènes et ceux d’origine indienne).
« Immunité » des médias : un décret controversé
Toujours dans le cadre d’un processus annoncé de retour à la démocratie, mardi 7 février 2012, le gouvernement fidjien a relancé la controverse en annonçant par ailleurs l’entrée en vigueur d’une mesure présentée comme offrant une « immunité » aux médias locaux contre toute poursuite pouvant résulter de la publication de déclarations « verbales ou écrites » du pouvoir actuel et pouvant faire l’objet d’éventuelles poursuites en diffamation.
Cette disposition, prise sous forme d’amendement à un décret, a été comparée à l’immunité dont bénéficient les parlementaires dans le cadre des débats à l’Assemblée.
Objectif, selon le gouvernement : « faciliter un débat franc et ouvert » entre le gouvernement, le public et les divers acteurs politiques, à l’approche de ces élections annoncées.
Cette mesure deviendrait caduque à l’avènement d’un nouveau Parlement issu du scrutin, ajoute le gouvernement.
Cette nouvelle disposition a fait l’objet de vives critiques, à la fois au plan local et international.
Le Forum Constitutionnel Citoyen (Citizens’ Constitutional Forum, CCF) a notamment souligné, en réaction, ses « graves préoccupations » au sujet de cette immunité, qu’il qualifie d’ « injuste », car « elle favorise et met en place des protections à des membres sélectionnés au sein de la société (fidjienne) », a déclaré le Révérend Akuila Yabaki, directeur de cette ONG.
« Avec ce nouveau décret, les citoyens seront vulnérables aux attaques personnelles et à toutes sortes d’allégations non vérifiées. À un moment où des consultations nationales sont attendues concernant les réformes constitutionnelles et électorales, ce nouveau décret jette l’ombre d’un doute sur la confiance du gouvernement Bainimarama à faire face à des points de vue opposés ou divergents, auxquels il doit s’attendre pendant ce processus. Ce décret peut être perçu comme un moyen de protéger un camp alors que l’autre est laissé à la merci des médias », ajoute-t-il.
L’ancien Premier ministre Mahendra Chaudhry (parti travailliste), lui-même renversé par un précédent putsch en mai 2000, s’est lui aussi montré particulièrement critique vis-à-vis de cette mesure, dont il estime que l’objet est d’avantager injustement une fraction de l’éventail politique.
Les médias locaux, pour leur part, ont été pris à parti par les détracteurs de ce décret, qui leur ont rappelé qu’en vertu de leur déontologie, immunité ou pas, il leur appartenait toujours de ne pas publier des propos qu’ils ne reproduiraient dans des circonstances normales.
Une possible candidature du Contre-amiral ?
Tout récemment, le Contre-amiral Bainimarama a indiqué dans une interview que dans la perspective d’élections législatives censées marquer le retour de l’archipel à la démocratie au cours du dernier trimestre 2014, il « pourrait » se présenter au suffrage populaire.
Les élections de 2014 ont été annoncées de manière persistante à Fidji depuis juillet 2009.
Toutefois, le Contre-amiral, dans le cadre de cette feuille e route, préconditionne ce scrutin à l’élaboration d’une nouvel Constitution et à une réforme électorale.
Dans une longue interview accordée à un journaliste d’origine australienne et relayée par des chaînes de télévisions australienne et néo-zélandaise (dont SkyNews),
http://www.youtube.com/watch?v=qFSrcb-IX-c&feature=youtu.be
l’homme fort de Suva, interrogé quant à la possibilité pour i de se présenter à ces élections, a répondu que pour le moment il n’avait « pas décidé, parce que je veux achever le processus de (réformes) de la Constitution et des élections. »
Mais, dans la foulée, il a aussi ajouté qu’en tout état de cause, il « n’exclut pas » cette possibilité et qu’au contraire, il l’ « inclut ».
« Je pourrais me présenter. Je vais l’envisager », a-t-il glissé en ajoutant qu’il était persuadé que dans ce cas de figure, il n’avait « aucun doute » concernant sa victoire.
Le seul sondage d’opinion menée ces derniers mois par l’institut de sondage Tebbutt, fin 2011, avait notamment fait ressortir que 66 pour cent des personnes interrogées se déclaraient satisfaite du Contre-amiral depuis sa prise de pouvoir.
« Alors pourquoi ne pas l’annoncer maintenant ? », reprend le journaliste.
« Parce que je veux me concentrer sur ce que je fais maintenant. Et si je dis aux gens que je me présente, cette concentration sera détournée vers des histoires de politique et d’élections, au lieu de poursuivre ce que j’ai besoin de faire maintenant, c’est-à-dire mettre en place une Constitution et bien sûr des élections crédibles », a-t-il élaboré.
Un processus de consultations publiques, à l’origine annoncé pour fin février 2014, devrait être lancé à Fidji dans les prochains jours, a-t-il par ailleurs confirmé.
L’objectif sera de collationner des opinions et points de vue concernant la future nouvelle Constitution (la précédente a été abrogée en avril 2009).
Toutefois, sur certains points, comme la suppression de toute disposition censée favoriser l’une ou l’autre des deux principales ethnies de Fidji (les Fidjiens indigènes et ceux d’origine indienne) le Contre-amiral a insisté sur l’aspect non négociable.
La précédente Constitution, mise en place en 1997, avait introduit la notion de circonscriptions « réservées » à l’une ou l’autre des ethnies de Fidji.
« Ce sera un suffrage universel pour tous, une personne, une voix. Et ça, c’est définitif, que tout le monde accepte ça, parce que c’est comme ça que les choses se passeront », a-t-il insisté, tout en estimant que dans ces conditions, « tout le monde » est libre de se présenter, quelle que soit sa race ou sa religion.
L’ancien Premier ministre Laisenia Qarase, renversé par le putsch de décembre 2006, et l’Indo-Fidjien Mahendra Chaudhry, qui dirigea un gouvernement travailliste lui aussi renversé par le précédent putsch de mai 2000, ne se sont pas encore prononcés définitivement sur leur éventuelle candidature.
Toutefois, M. Qarase affirmait jeudi 8 mars 2012 qu’il souhaitait pouvoir participer aux consultations en vue de rédiger une nouvelle Constitution.
M. Chaudhry, pour sa part, estimait quelques jours plus tôt qu’un tel processus de remplacement complet de la Constitution n’était pas nécessaire et que de simples amendement au texte existant auraient suffi.
Les détails de ces réunions de consultation devraient être annoncés vendredi 9 mars 2012, a fait savoir en milieu de semaine le gouvernement local.
Vendredi 2 mars 2012, le Contre-amiral conduisait un très médiatique défilé à la tête de quelque six cent cinquante de ses hommes, en mode marche forcée d’une quinzaine de kilomètres dans la banlieue de Suva.
Cet exercice avait pour but de « permettre aux hommes et aux femmes de l’armée de discuter et de marcher avec leur leader », a précisé ensuite l’armée dans un communiqué qui décrit cet exercice comme une épreuve visant à « jauger et améliorer la forme physique » des membres des forces armées fidjiennes.
« D’ordinaire, ça se passe tous les trimestres, mais le Contre-amiral a pensé qu’il serait bon pour nous de marcher (vendredi) », a ajouté le Lieutenant Colonel Amani Suliano qui insiste sur la notion de « camaraderie » au sein des troupes.
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Bob Carr, tout récemment nommé chef de la diplomatie australienne, en remplacement de Kevin Rudd (qui avait démissionné fin février 2012 sur fond de rivalités et de velléités de retour à la tête du gouvernement), serait sur le point de rencontrer son homologue néo-zélandais Murray McCully lors d’un déplacement à Wellington, vendredi 9 mars 2012, annonce par avance la presse australienne.
Au menu de ces entretiens réguliers entre les deux diplomaties : un infléchissement de leur position commune (également adoptée par le Commonwealth et le Forum des Îles du Pacifique) vis-à-vis de Fidji, qui subit des sanctions notamment concernant les visas aux individus (et à leurs proches parents) participant au régime actuel mené par le Contre-amiral Franck Bainimarama.
Le Premier ministre néo-zélandais John Key pourrait aussi participer à ces pourparlers, qui pourraient aussi avoir des répercussions sur la suspension du statut de membre plein de Fidji au sein du Forum des Îles du Pacifique (FIP), début mai 2009, selon les mêmes sources.
Le Commonwealth s’était ensuite aligné sur cette position en frappant Fidji des mêmes sanctions, en septembre 2009.
Dans ces conditions, la coopération entre Fidji et l’Australie, la Nouvelle-Zélande, mais aussi le FIP, le Commonwealth et l’union Européenne, se limitait depuis à des domaines strictement humanitaires, comme l’aide à la suite de catastrophes naturelles.
Les entretiens de Wellington, en fin de semaine, devraient aussi aborder, de manière plus générale, les dossiers « d’intérêt commun » entre la Nouvelle-Zélande et l’Australie, comme par exemple la Mission Régionale d’Assistance aux Îles Salomon (RAMSI, force de stabilisation installée dans cet archipel depuis juillet 2003), le FIP et des dossiers de sécurité régionale.
Depuis fin 2009, le gouvernement néo-zélandais entretient toutefois des contacts réguliers avec le gouvernement fidjien, dans le but affiché de ne pas rompre les lignes de communication et de dialogue.
Face à la posture « dure » des grands voisins de la région, et à l’intensification des relations, ces dernières années, entre Fidji et des pays comme la Chine ou plus récemment encore la Russie, les États-Unis ont aussi fortement marqué un retour aux affaires dans le Pacifique, avec une politique de « réengagement » vis-à-vis de Fidji.
Outre l’inauguration mi-2011 d’une de ses plus grandes ambassades dans la région, la nouvelle ambassadrice américaine, Frankie Reed, entretiens des contacts réguliers, voire ostensibles, avec le Contre-amiral, renforçant ainsi au passage le message selon lequel la politique d’ostracisme vis-à-vis de Fidji ne fonctionne pas.
M. Bainimarama, au cours d’une rare interview diffusée le week-end dernier via Internet
http://www.youtube.com/watch?v=qFSrcb-IX-c&feature=youtu.be
et sur plusieurs chaînes de télévision australiennes et néo-zélandaises, allait même jusqu’à se demander publiquement pourquoi Canberra ne jugeait pas utile de s’inquiéter au sujet de sa perte d’influence dans sa proche région.
Mises en garde de toutes parts
Au plan intérieur aussi, en Australie, les deux principaux groupe de réflexion (think-tanks), l’ASPI (Australian Strategic Policy Institute) et le Lowy Institute for International Policy, ont également publié ces derniers mois des rapports alarmistes faisant le bilan des relations de l’Australie avec sa proche région.
Ces rapports soulignaient notamment l’impact du dossier fidjien sur les affaires régionales.
Mercredi, aussi, l’opposition parlementaire australienne, via sa porte-parole pour les affaires étrangères, la conservatrice Julie Bishop, a lancé un appel public à M. Carr, nouveau chef de la diplomatie, pour qu’il « renouvelle sa stratégie » et rouvre le dialogue avec Suva et son homme fort.
Mission du Commonwealth à Fidji
Ces évolutions interviennent aussi alors que le Commonwealth envoie à Fidji une délégation de haut niveau qui a commencé à évaluer la situation sur e terrain, du 7 au 9 mars 2012.
Cette mission de quatre membres, conduite par la Secrétaire Générale adjointe du Commonwealth, Mme Mmasekgoa Masire-Mwamba (du Botswana), a pour but de s’entretenir directement avec les autorités fidjiennes actuelles, « mais aussi d’autres acteurs », précise le Commonwealth.
Mme Masire-Mwamba se spécialise dans les affaires politiques, juridiques, constitutionnelles et de droits humains.
Objectif, selon la responsable : déterminer de quelle manière le Commonwealth peut poursuivre sa politique d’encouragement et de soutien en vue du rétablissement de la démocratie, pour que Fidji puisse redevenir membre plein de la famille du Commonwealth », a-t-elle déclaré.
Une telle décision devrait être prise d’abord par le Groupe Ministériel d’Action du Commonwealth (CMAG) lors de sa prochaine réunion.
Lors de son interview du week-end dernier, M. Bainimarama, interrogé au sujet du Commonwealth, et la Reine d’Angleterre (qui le préside), soutenait qu’à ses yeux et à ceux de tous les Fidjiens, Elizabeth II était toujours la « Reine de Fidji ».
Le 10 février 2012, le nouvel ambassadeur (Haut-commissaire selon la terminologie du Commonwealth) de Fidji au Royaume-Uni, Solo Mara, en présentant ses lettres de créances à la monarque, avait pris le temps « d’informer la Reine au sujet des évolutions politiques et socio-économiques, y compris les réformes en cours de mise en œuvre », ainsi que sur la volonté de « construire un Fidji meilleur pour tous ses citoyens », insistait le ministère fidjien de l’information.
Au cours de cette entrevue le nouvel émissaire de Suva avait une nouvelle fois rappelé que le calendrier annoncé de retour à la démocratie prévoyait des élections générales au cours du dernier trimestre 2014.
Avant cela, un processus de consultation et d’élaboration d’une nouvelle Constitution (la précédente ayant été abrogée en avril 2009) est sur el point d’être lancé.
Date annoncée de fin des travaux : septembre 2013.
Il devrait aussi être assorti de réformes électorales visant à supprimer l’ancien système de « sièges réservés » à l’une ou l’autre des deux principales ethnies de l’archipel, le Fidjiens indigènes et ceux d’origine indienne (venus à la fin du dix-neuvième siècle pour cultiver et récolter la canne à sucre).
« Sa Majesté a répondu en exprimant le souhait que notre pays réalise les réformes politiques qu’il a choisies et retrouve prochainement sa place au sein de la famille des nations du Commonwealth », avait rapporté le ministère fidjien de l’information.
Préparation des élections 2014 : une mission onusienne ouvre le chantier
Une autre mission est attendue début mars 2012 à Fidji : elle viendra du siège new-yorkais des Nations-Unies et sa mission sera d’évaluer l’étendue des besoins en vue de préparer et d’organiser des élections législatives toujours annoncées localement pour le dernier trimestre 2014.
Cette mission avait été proposée par l’ONU, mais avant que d’accepter cette offre, le gouvernement local avait stipulé que ses travaux et surtout sa composition devaient être essentiellement « techniques », « neutres » et « sans préjugés », avait insisté l’Attorney-General (chef des services juridiques du gouvernement), Aiyaz Sayed-Khaiyum.
Ce dernier a insisté sur la nécessité de « fournir une évaluation objective pour que Fidji conduise des élections libres et justes ».
M. Sayed-Khaiyum, ces derniers mois, a régulièrement fustigé les dernières législatives, conduites en mai 2006, pour lesquelles, malgré la présence de nombreuses missions internationales d’observateurs, de nombreuses irrégularités ont été constatées.
La venue de cette équipe onusienne (du département d’aides aux élections au siège de New York) a été annoncée pour début mars 2012, avec plusieurs champs d’investigation et d’évaluation, dans les domaines des besoins en matériel (urnes) ou encore de personnel.
Depuis plusieurs mois, le gouvernement fidjien annonce par ailleurs son intention e conduire ces élections via un système électronique, pour lequel il a aussi annoncé ces derniers jours le choix d’une société canadienne, CODE Inc., basée à Ottawa, en tant que prestataire de services,
Onze sociétés (quatre locales et sept étrangères) étaient sur les rangs, a précisé le gouvernement dans le cadre de cet appel d’offres.
« Fidji continue à suivre les recommandations du rapport de l’Union Européenne relatif aux élections de 2006, rapport dans lequel des irrégularités ont été citées, concernant les listes électorales, les pratiques de vote, comme par exemple ce chiffre de 101 pour cent affiché comme taux de participation dans une circonscription, ou le fait que certains groupes d’électeurs se soient vus refusés le droit de voter », souligne l’influent Attorney General.
« Fidji avait envoyé des invitations à la communauté internationale afin qu’elle participe financièrement au processus d’enregistrement électronique des électeurs. Toutefois, jusqu’ici, aucun pays ou agence multilatérale n’a choisi de participer », ajoute-t-il dans un communiqué en date du 7 février 2012.
Le gouvernement fidjien, pour sa part, a annoncé lors de la présentation de son budget 2012 une provision de l’ordre de quatre millions de ses dollars (1,7 million d’euros) pour ces opérations de reconstitution des listes électorales.
L’âge minimum des électeurs a été rabaissé de 21 à 18 ans « pour faire en sorte que la population des jeunes adultes ait son mot à dire » au cours de ce scrutin.
Avant ces élections, 2012 devrait aussi voir l’ouverture d’un autre chantier annoncé : celui de la rédaction d’une nouvelle Constitution (la précédente a été abrogée en avril 2009).
Ce processus a été présenté comme nécessaire afin de toiletter l’ancien texte qui, selon le Contre-amiral, institutionnalisait des facteurs clivants au sein de la société fidjienne, en réservant notamment certaines circonscriptions à l’un ou l’autre des deux principaux groupes ethniques de l’archipel (les Fidjiens indigènes et ceux d’origine indienne).
« Immunité » des médias : un décret controversé
Toujours dans le cadre d’un processus annoncé de retour à la démocratie, mardi 7 février 2012, le gouvernement fidjien a relancé la controverse en annonçant par ailleurs l’entrée en vigueur d’une mesure présentée comme offrant une « immunité » aux médias locaux contre toute poursuite pouvant résulter de la publication de déclarations « verbales ou écrites » du pouvoir actuel et pouvant faire l’objet d’éventuelles poursuites en diffamation.
Cette disposition, prise sous forme d’amendement à un décret, a été comparée à l’immunité dont bénéficient les parlementaires dans le cadre des débats à l’Assemblée.
Objectif, selon le gouvernement : « faciliter un débat franc et ouvert » entre le gouvernement, le public et les divers acteurs politiques, à l’approche de ces élections annoncées.
Cette mesure deviendrait caduque à l’avènement d’un nouveau Parlement issu du scrutin, ajoute le gouvernement.
Cette nouvelle disposition a fait l’objet de vives critiques, à la fois au plan local et international.
Le Forum Constitutionnel Citoyen (Citizens’ Constitutional Forum, CCF) a notamment souligné, en réaction, ses « graves préoccupations » au sujet de cette immunité, qu’il qualifie d’ « injuste », car « elle favorise et met en place des protections à des membres sélectionnés au sein de la société (fidjienne) », a déclaré le Révérend Akuila Yabaki, directeur de cette ONG.
« Avec ce nouveau décret, les citoyens seront vulnérables aux attaques personnelles et à toutes sortes d’allégations non vérifiées. À un moment où des consultations nationales sont attendues concernant les réformes constitutionnelles et électorales, ce nouveau décret jette l’ombre d’un doute sur la confiance du gouvernement Bainimarama à faire face à des points de vue opposés ou divergents, auxquels il doit s’attendre pendant ce processus. Ce décret peut être perçu comme un moyen de protéger un camp alors que l’autre est laissé à la merci des médias », ajoute-t-il.
L’ancien Premier ministre Mahendra Chaudhry (parti travailliste), lui-même renversé par un précédent putsch en mai 2000, s’est lui aussi montré particulièrement critique vis-à-vis de cette mesure, dont il estime que l’objet est d’avantager injustement une fraction de l’éventail politique.
Les médias locaux, pour leur part, ont été pris à parti par les détracteurs de ce décret, qui leur ont rappelé qu’en vertu de leur déontologie, immunité ou pas, il leur appartenait toujours de ne pas publier des propos qu’ils ne reproduiraient dans des circonstances normales.
Une possible candidature du Contre-amiral ?
Tout récemment, le Contre-amiral Bainimarama a indiqué dans une interview que dans la perspective d’élections législatives censées marquer le retour de l’archipel à la démocratie au cours du dernier trimestre 2014, il « pourrait » se présenter au suffrage populaire.
Les élections de 2014 ont été annoncées de manière persistante à Fidji depuis juillet 2009.
Toutefois, le Contre-amiral, dans le cadre de cette feuille e route, préconditionne ce scrutin à l’élaboration d’une nouvel Constitution et à une réforme électorale.
Dans une longue interview accordée à un journaliste d’origine australienne et relayée par des chaînes de télévisions australienne et néo-zélandaise (dont SkyNews),
http://www.youtube.com/watch?v=qFSrcb-IX-c&feature=youtu.be
l’homme fort de Suva, interrogé quant à la possibilité pour i de se présenter à ces élections, a répondu que pour le moment il n’avait « pas décidé, parce que je veux achever le processus de (réformes) de la Constitution et des élections. »
Mais, dans la foulée, il a aussi ajouté qu’en tout état de cause, il « n’exclut pas » cette possibilité et qu’au contraire, il l’ « inclut ».
« Je pourrais me présenter. Je vais l’envisager », a-t-il glissé en ajoutant qu’il était persuadé que dans ce cas de figure, il n’avait « aucun doute » concernant sa victoire.
Le seul sondage d’opinion menée ces derniers mois par l’institut de sondage Tebbutt, fin 2011, avait notamment fait ressortir que 66 pour cent des personnes interrogées se déclaraient satisfaite du Contre-amiral depuis sa prise de pouvoir.
« Alors pourquoi ne pas l’annoncer maintenant ? », reprend le journaliste.
« Parce que je veux me concentrer sur ce que je fais maintenant. Et si je dis aux gens que je me présente, cette concentration sera détournée vers des histoires de politique et d’élections, au lieu de poursuivre ce que j’ai besoin de faire maintenant, c’est-à-dire mettre en place une Constitution et bien sûr des élections crédibles », a-t-il élaboré.
Un processus de consultations publiques, à l’origine annoncé pour fin février 2014, devrait être lancé à Fidji dans les prochains jours, a-t-il par ailleurs confirmé.
L’objectif sera de collationner des opinions et points de vue concernant la future nouvelle Constitution (la précédente a été abrogée en avril 2009).
Toutefois, sur certains points, comme la suppression de toute disposition censée favoriser l’une ou l’autre des deux principales ethnies de Fidji (les Fidjiens indigènes et ceux d’origine indienne) le Contre-amiral a insisté sur l’aspect non négociable.
La précédente Constitution, mise en place en 1997, avait introduit la notion de circonscriptions « réservées » à l’une ou l’autre des ethnies de Fidji.
« Ce sera un suffrage universel pour tous, une personne, une voix. Et ça, c’est définitif, que tout le monde accepte ça, parce que c’est comme ça que les choses se passeront », a-t-il insisté, tout en estimant que dans ces conditions, « tout le monde » est libre de se présenter, quelle que soit sa race ou sa religion.
L’ancien Premier ministre Laisenia Qarase, renversé par le putsch de décembre 2006, et l’Indo-Fidjien Mahendra Chaudhry, qui dirigea un gouvernement travailliste lui aussi renversé par le précédent putsch de mai 2000, ne se sont pas encore prononcés définitivement sur leur éventuelle candidature.
Toutefois, M. Qarase affirmait jeudi 8 mars 2012 qu’il souhaitait pouvoir participer aux consultations en vue de rédiger une nouvelle Constitution.
M. Chaudhry, pour sa part, estimait quelques jours plus tôt qu’un tel processus de remplacement complet de la Constitution n’était pas nécessaire et que de simples amendement au texte existant auraient suffi.
Les détails de ces réunions de consultation devraient être annoncés vendredi 9 mars 2012, a fait savoir en milieu de semaine le gouvernement local.
Vendredi 2 mars 2012, le Contre-amiral conduisait un très médiatique défilé à la tête de quelque six cent cinquante de ses hommes, en mode marche forcée d’une quinzaine de kilomètres dans la banlieue de Suva.
Cet exercice avait pour but de « permettre aux hommes et aux femmes de l’armée de discuter et de marcher avec leur leader », a précisé ensuite l’armée dans un communiqué qui décrit cet exercice comme une épreuve visant à « jauger et améliorer la forme physique » des membres des forces armées fidjiennes.
« D’ordinaire, ça se passe tous les trimestres, mais le Contre-amiral a pensé qu’il serait bon pour nous de marcher (vendredi) », a ajouté le Lieutenant Colonel Amani Suliano qui insiste sur la notion de « camaraderie » au sein des troupes.
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