Russes et Ukrainiens unis à Tahiti


Tahiti, le 23 février 2022 – À l'initiative de la communauté russe de Tahiti, une quinzaine de personnes, parmi lesquelles Russes et Ukrainiens, se sont réunies dimanche matin place Tarahoi contre la guerre déclenchée la semaine dernière par Vladimir Poutine en Ukraine.
 
Une quinzaine de personnes se sont rassemblées dimanche matin place Tarahoi à Papeete en opposition à la guerre en Ukraine déclenchée jeudi dernier par le Président russe, Vladimir Poutine. Une initiative née de la petite communauté russe de Tahiti, qui a échangé ces derniers jours via le réseau social Facebook et qui a surtout également tenté de contacter les quelques ressortissants ukrainiens du fenua pour leur témoigner tout leur soutien. “Ce ne sont pas les Russes qui ont demandé cette guerre. Il y en a certains, bien sûr, qui sont d'accord parce qu'ils regardent trop la télévision russe avec toute sa désinformation. Mais nous, on est contre”, témoigne Natalia, ressortissante russe installée au fenua.
 
Des Russes, des Ukrainiens et leurs proches Polynésiens qui se sont joints aux manifestants dimanche matin. “Arrêtez de tuer”, “Non à la guerre”, “Gardez chez vous vos chars et vos missiles”, “Je suis Russe et je suis pour la paix”, “Soutien au peuple ukrainien”, pouvait-on lire dimanche matin sur les panneaux brandis par les manifestants, jeunes et moins jeunes. “C'était la moindre des choses qu'on puisse faire. De sortir un peu, avec nos petits drapeaux qu'on a faits hier”, explique Kateryna, une Ukrainienne installée à Tahiti qui raconte le “stress” et la “peur” qu'elle ressent aujourd'hui pour ses proches et plus largement pour ses compatriotes.
 

Natalia, Russe en Polynésie : “Poutine ce n'est pas toute la Russie”

L'initiative de ce rassemblement vient de la communauté russe de Polynésie, c'était important comme message de montrer que des Russes sont opposés à cette guerre et que cette décision avait été prise avant tout par les dirigeants russes ?

“Ce sont les dirigeants qui ne nous ont rien demandé. Nous, on est contre cette guerre. Et notre but, c'est de montrer à tout le monde qu'on ne veut pas qu'on associe les Russes à cette guerre. Ce ne sont pas les Russes qui ont demandé cette guerre. Il y en a certains, bien sûr, qui sont d'accord parce qu'ils regardent trop la télévision russe avec toute sa désinformation. Mais nous, on est contre. Et on ne veut pas être stigmatisés. On veut montrer que la Russie, ce n'est pas Poutine et que Poutine ce n'est pas toute la Russie. Les opinions sont différentes et c'est pour cela qu'on est là, qu'on a pris cette initiative, qu'on a contacté nos amis Ukrainiens, qu'on leur a expliqué… Malgré le fait que certains d'entre eux étaient fâchés. Comme si c'était nous qui attaquions l'Ukraine. Mais on essaie d'expliquer, on essaie de leur dire que tout notre soutien est avec eux.”
 
En parlant du pouvoir de la désinformation, on a lu ces derniers jours sur les réseaux sociaux polynésiens beaucoup de remises en question des informations rapportées par les médias occidentaux sur la réalité de ce conflit. Certains annonçant même que le déclenchement de la guerre était une “fake news”… Ça peut s'expliquer par une désinformation du pouvoir russe selon vous ?

“Normalement, je suis plutôt une personne qui remet en cause et qui doute beaucoup de ce qui est diffusé par les médias officiels. Je fais partie, souvent, de ceux qui sont dans les plus profonds doutes. Mais là, je confirme que c'est la Russie qui a déclenché la guerre. C'est maintenant une évidence. De ce que j'ai lu sur les réseaux sociaux, le problème c'est qu'il n'y a parfois qu'une partie de la réalité qui est montrée. Pour moi, il n'y a pas les bons et les méchants, les anges et les diables. Et je pense que ce que les médias font, c'est qu'ils montrent la situation d'une façon trop binaire ou simpliste. (…) Lorsqu'on parle de fausses informations, c'est plutôt ça pour moi. C'est de présenter les choses de façon trop simplifiées. Mais sur l'attaque qui a eu lieu, sur le fait que la Russie a attaqué, sur le fait qu'il y a eu une invasion en Ukraine… Là, pour moi, c'est hors de question parce qu'on suit les informations sur des dizaines de chaînes, de fils d'information, qu'ils soient ukrainiens, russes, de Crimée, de Gdańsk… Et on voit tout ça.”
 

​Kateryna, Ukrainienne en Polynésie : “J'ai peur pour mon Pays”

Quel était le message porté par ce rassemblement ce matin ?

“Le but, c'était d'apporter un petit soutien aux Ukrainiens qui sont en train de protéger l'Ukraine et aux gens qui ont peur. C'était la moindre des choses qu'on puisse faire. De sortir un peu, avec nos petits drapeaux qu'on a faits hier.”
 
Comment est-ce que l'on ressent cette actualité lorsque l'on est Ukrainienne et que l'on vit en Polynésie à plusieurs milliers de kilomètres ?

“On est très loin. C'est quand même plus facile ici que là-bas. Mais c'est quand même très stressant. Et je suis ça avec tout mon cœur. J'ai peur pour mon Pays. J'ai peur pour les gens. Et ça me fait stresser, lorsque je regarde ce que mes amis m'envoient.”
 
Vous avez des contacts avec des gens qui vivent en Ukraine et qui vous racontent ce qu'ils vivent là-bas ?

“Oui, plusieurs de mes amis ont quitté leur ville avec leurs enfants. Parce que c'est dangereux de rester là-bas. Ils risquent de se trouver sous une rocket qui explose leur maison. Ce n'est pas sécurisé là-bas. Ils essaient d'aller se cacher dans les montagnes en Ukraine. Certains dorment dans les stations de métro, parce qu'il y a des bombes qui tombent. Il y a même un bébé qui est né dans une station de métro il y a quelques jours… Parce que les hôpitaux ne fonctionnent pas. Parce qu'il y a des attaques par le ciel. Les gens se cachent.”
 

Rédigé par Antoine Samoyeau le Dimanche 27 Février 2022 à 13:26 | Lu 3872 fois