Lionel Beffre, le Haut commissaire de Polynésie.
PAPEETE, le 27 novembre 2014. Dans un communiqué de presse envoyé aux rédactions ce jeudi soir, le Haut-commissaire de la République a pris connaissance, "avec un réel étonnement", de la résolution relative à la situation des atolls de Moruroa et Fangataufa. Une résolution "adoptée grâce à une alliance de circonstance" détaille le communiqué du Haut commissariat. Le communiqué insiste sur le fait que "aucun nouvel élément n’est, objectivement, intervenu sur ces atolls qui permettrait de comprendre la soudaineté de cette initiative".
Une initiative " inspirée par une approche contraire à des engagements antérieurs et une vision dépassée des relations de la Polynésie française avec l’Etat, au moment où celui-ci s’efforce, précisément, d’apporter son plein soutien à la relance de l’économie de la Polynésie française et au redressement des comptes sociaux, dans le cadre de la légitime solidarité nationale dont doivent bénéficier nos concitoyens polynésiens".
Enfin, selon le Haut commissariat, cette résolution est "contestable sur le plan juridique puisque les atolls de Moruroa et Fangataufa sont des dépendances classées dans le domaine public terrestre de l’Etat, par principe, inaliénable et imprescriptible. Affectés au ministère de la Défense, ces deux atolls relèvent, en outre, du statut d’ «installation nucléaire intéressant la défense» tel qu’encadré par le décret du 15 mai 1981 relatif à la protection et au contrôle des matières nucléaires dans le domaine de la défense, désormais codifié dans le code de la défense. A ce titre, l’Etat y assure le respect des conventions internationales qui lient la France, en matière de non-prolifération notamment".
En fin de communiqué, le Haut commissariat réaffirme son soutien au président polynésien en exercice. "Ce texte ne détournera pas l’Etat du travail partenarial qu’il conduit avec le président Edouard Fritch et son gouvernement, sur les dossiers de fond qui concernent l’avenir et les préoccupations quotidiennes de toutes les Polynésiennes et de tous les Polynésiens".
Une initiative " inspirée par une approche contraire à des engagements antérieurs et une vision dépassée des relations de la Polynésie française avec l’Etat, au moment où celui-ci s’efforce, précisément, d’apporter son plein soutien à la relance de l’économie de la Polynésie française et au redressement des comptes sociaux, dans le cadre de la légitime solidarité nationale dont doivent bénéficier nos concitoyens polynésiens".
Enfin, selon le Haut commissariat, cette résolution est "contestable sur le plan juridique puisque les atolls de Moruroa et Fangataufa sont des dépendances classées dans le domaine public terrestre de l’Etat, par principe, inaliénable et imprescriptible. Affectés au ministère de la Défense, ces deux atolls relèvent, en outre, du statut d’ «installation nucléaire intéressant la défense» tel qu’encadré par le décret du 15 mai 1981 relatif à la protection et au contrôle des matières nucléaires dans le domaine de la défense, désormais codifié dans le code de la défense. A ce titre, l’Etat y assure le respect des conventions internationales qui lient la France, en matière de non-prolifération notamment".
En fin de communiqué, le Haut commissariat réaffirme son soutien au président polynésien en exercice. "Ce texte ne détournera pas l’Etat du travail partenarial qu’il conduit avec le président Edouard Fritch et son gouvernement, sur les dossiers de fond qui concernent l’avenir et les préoccupations quotidiennes de toutes les Polynésiennes et de tous les Polynésiens".
Lionel Beffre : « Un geste inamical envers l'État »
Ce jeudi soir, le haut-commissaire a accordé une interview aux médias
Quelle est la réaction de l'État à la résolution qui a été votée ce jeudi ?
Cette résolution -en tout cas c'est comme ça qu'elle est perçue et le sera sans doute par nos interlocuteurs, peut être considérée comme un geste inamical vis-à-vis de l'État. Elle l'est car objectivement aucun élément intervenu ces derniers jours ne permet de comprendre la soudaineté de cette initiative.
Elle l'est aussi parce que j'ai cru comprendre qu'il était question qu'il y ait un rétablissement des bonnes relations avec l'État et que le dialogue soit renoué sur un certain nombre de sujets. C'est ce que le gouvernement et le président Fritch s'efforcent de faire. La façon dont s'y est pris l'assemblée n'est pas le meilleur chemin, en tout cas pas le chemin le plus court, pour rétablir un dialogue constructif.
Mais cela ne va pas nous détourner du travail que nous faisons avec le président Edouard Fritch pour le retour de l'Etat dans le financement du Régime de solidarité de Polynésie française pour signer un nouveau contrat de projets et préparer l'avenir des Polynésiens.
L'avenir des Polynésiens ne se construit pas en regardant dans sa voiture tout le temps le rétroviseur. Il faut regarder aussi la route devant soi. Nous allons redoubler de pédagogie vis-à-vis des décideurs. Nous allons réexpliquer les choses car évidemment cette résolution va nous compliquer un peu la tâche. Mais on va s'efforcer de le faire avec le président.
Comment allez-vous expliquer auprès de Paris cette résolution ?
Il faut expliquer à Paris qu'elle a été adoptée en contradiction avec les souhaits du président Edouard Fritch qui lui est dans une logique de dialogue constructif avec l'État. De plus, il s'agit quand même d'une alliance de circonstance puisque le parti majoritaire a voté à 25 voix et que pour obtenir la majorité des 36, il a fallu faire l'appoint, si j'ose dire, avec des voix de l'opposition. Je vais expliquer tout ça à Paris pour replacer cette résolution dans le contexte. Mais s'il fallait résumer les choses, je dirais qu'au fond, on a eu une journée assez simple avec six heures d'irrésolution pour une seconde de résolution.
Vu de la métropole, pour ceux qui ne connaissent pas dans le détail le contexte polynésien, expliquer que d'un côté on sollicite une aide de l'Etat, mais que d'un autre côté, on attaque l'État voire même, j'ai entendu dire, qu'on serait capable d'aller devant un tribunal international pour mettre l'État en difficulté, cela ne va pas de soi. À un moment, il faut choisir une ligne droite et s'y tenir.
Pour l'État, il n'y a pas de préjudice écologique à indemniser ?
Je n'ai pas dit cela. Mais j'observe tout de même sur ce point précis que ce matin (jeudi matin) nous partions avec un chiffre qui était de 90 milliards de Fcfp. Puis dans la résolution finale, c'est écrit qu'il faut qu'il y ait une expertise pour évaluer le préjudice. Alors je me dis ou bien ce matin (jeudi matin) le chiffre était faux et me demande pourquoi c'était inscrit dans une résolution puisque maintenant, il faut l'expertiser ou bien maintenant, on nous dit qu'il faut expertiser quelque chose dont on connaît d'avance le résultat.
Si vous voulez il y a quand même une absence de crédibilité de ce texte qu'il faut mettre en perspective et que je vais être aussi obligé d'expliquer.
Est-ce pour vous des représailles envers l'État après que l'inéligibilité de Gaston Flosse lui ait été notifiée ?
J'ose espérer quand même que chacun ait suffisamment le sens des responsabilités et de l'intérêt général pour ne pas placer les résolutions de l'assemblée, qui sont quand même des choses importantes, sur le terrain d'une quelconque rancœur de cette nature.
La résolution évoque la rétrocession des deux atolls « au cas de cessation des activités du centre d'expérimentation dans le Pacifique. Qu'en pensez-vous ?
Il est prévu par la délibération du 6 février 1964 qu'il y ait une rétrocession une fois les activités terminées. Aujourd'hui, l'État exerce une surveillance très précise de ces atolls à tel point d'ailleurs qu'il va financer un nouveau système géomécanique et qu'il va y investir 90 millions d'euros (10,7 milliards de Fcfp). 90 millions d'euros qui feront aussi travailler les entreprises polynésiennes. L'État ne se désintéresse pas de cela.
Mais aujourd'hui il ne faut pas considérer qu'il y ait cessation d 'activité parce qu'on continue à surveiller étroitement les conséquences qu'auraient pu avoir -j'utilise le conditionnel car rien n'est certain- les essais nucléaires sur la stabilité. Sur ce point très précis, on ne peut pas considérer non plus que la rétrocession doit se faire de cette manière là en tout cas pas avec les préjudices tels qu'il sont supposés.
La délibération du 6 février 1964 laissait entendre, et même disait clairement que ce serait une rétrocession gratuite et en l'état, le moment venu. Avec cette résolution, on est non seulement en contraction avec des engagements qui ont été pris assez récemment par un certain nombre d'acteurs, mais aussi en contradiction avec ce que l'assemblée avait voté en 1964. L'État est partenaire de la Polynésie évidemment, mais il attend aussi que ce partenariat se fasse sur des bases continues qu'il n'y ait pas tout le temps des changements de pied et surtout que les engagements qui aient été pris soit tenus.
Quelle est la réaction de l'État à la résolution qui a été votée ce jeudi ?
Cette résolution -en tout cas c'est comme ça qu'elle est perçue et le sera sans doute par nos interlocuteurs, peut être considérée comme un geste inamical vis-à-vis de l'État. Elle l'est car objectivement aucun élément intervenu ces derniers jours ne permet de comprendre la soudaineté de cette initiative.
Elle l'est aussi parce que j'ai cru comprendre qu'il était question qu'il y ait un rétablissement des bonnes relations avec l'État et que le dialogue soit renoué sur un certain nombre de sujets. C'est ce que le gouvernement et le président Fritch s'efforcent de faire. La façon dont s'y est pris l'assemblée n'est pas le meilleur chemin, en tout cas pas le chemin le plus court, pour rétablir un dialogue constructif.
Mais cela ne va pas nous détourner du travail que nous faisons avec le président Edouard Fritch pour le retour de l'Etat dans le financement du Régime de solidarité de Polynésie française pour signer un nouveau contrat de projets et préparer l'avenir des Polynésiens.
L'avenir des Polynésiens ne se construit pas en regardant dans sa voiture tout le temps le rétroviseur. Il faut regarder aussi la route devant soi. Nous allons redoubler de pédagogie vis-à-vis des décideurs. Nous allons réexpliquer les choses car évidemment cette résolution va nous compliquer un peu la tâche. Mais on va s'efforcer de le faire avec le président.
Comment allez-vous expliquer auprès de Paris cette résolution ?
Il faut expliquer à Paris qu'elle a été adoptée en contradiction avec les souhaits du président Edouard Fritch qui lui est dans une logique de dialogue constructif avec l'État. De plus, il s'agit quand même d'une alliance de circonstance puisque le parti majoritaire a voté à 25 voix et que pour obtenir la majorité des 36, il a fallu faire l'appoint, si j'ose dire, avec des voix de l'opposition. Je vais expliquer tout ça à Paris pour replacer cette résolution dans le contexte. Mais s'il fallait résumer les choses, je dirais qu'au fond, on a eu une journée assez simple avec six heures d'irrésolution pour une seconde de résolution.
Vu de la métropole, pour ceux qui ne connaissent pas dans le détail le contexte polynésien, expliquer que d'un côté on sollicite une aide de l'Etat, mais que d'un autre côté, on attaque l'État voire même, j'ai entendu dire, qu'on serait capable d'aller devant un tribunal international pour mettre l'État en difficulté, cela ne va pas de soi. À un moment, il faut choisir une ligne droite et s'y tenir.
Pour l'État, il n'y a pas de préjudice écologique à indemniser ?
Je n'ai pas dit cela. Mais j'observe tout de même sur ce point précis que ce matin (jeudi matin) nous partions avec un chiffre qui était de 90 milliards de Fcfp. Puis dans la résolution finale, c'est écrit qu'il faut qu'il y ait une expertise pour évaluer le préjudice. Alors je me dis ou bien ce matin (jeudi matin) le chiffre était faux et me demande pourquoi c'était inscrit dans une résolution puisque maintenant, il faut l'expertiser ou bien maintenant, on nous dit qu'il faut expertiser quelque chose dont on connaît d'avance le résultat.
Si vous voulez il y a quand même une absence de crédibilité de ce texte qu'il faut mettre en perspective et que je vais être aussi obligé d'expliquer.
Est-ce pour vous des représailles envers l'État après que l'inéligibilité de Gaston Flosse lui ait été notifiée ?
J'ose espérer quand même que chacun ait suffisamment le sens des responsabilités et de l'intérêt général pour ne pas placer les résolutions de l'assemblée, qui sont quand même des choses importantes, sur le terrain d'une quelconque rancœur de cette nature.
La résolution évoque la rétrocession des deux atolls « au cas de cessation des activités du centre d'expérimentation dans le Pacifique. Qu'en pensez-vous ?
Il est prévu par la délibération du 6 février 1964 qu'il y ait une rétrocession une fois les activités terminées. Aujourd'hui, l'État exerce une surveillance très précise de ces atolls à tel point d'ailleurs qu'il va financer un nouveau système géomécanique et qu'il va y investir 90 millions d'euros (10,7 milliards de Fcfp). 90 millions d'euros qui feront aussi travailler les entreprises polynésiennes. L'État ne se désintéresse pas de cela.
Mais aujourd'hui il ne faut pas considérer qu'il y ait cessation d 'activité parce qu'on continue à surveiller étroitement les conséquences qu'auraient pu avoir -j'utilise le conditionnel car rien n'est certain- les essais nucléaires sur la stabilité. Sur ce point très précis, on ne peut pas considérer non plus que la rétrocession doit se faire de cette manière là en tout cas pas avec les préjudices tels qu'il sont supposés.
La délibération du 6 février 1964 laissait entendre, et même disait clairement que ce serait une rétrocession gratuite et en l'état, le moment venu. Avec cette résolution, on est non seulement en contraction avec des engagements qui ont été pris assez récemment par un certain nombre d'acteurs, mais aussi en contradiction avec ce que l'assemblée avait voté en 1964. L'État est partenaire de la Polynésie évidemment, mais il attend aussi que ce partenariat se fasse sur des bases continues qu'il n'y ait pas tout le temps des changements de pied et surtout que les engagements qui aient été pris soit tenus.