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Rescapée de l'Himalaya, l'alpiniste Elisabeth Revol de retour en France


Sallanches, FRANCE | AFP | mardi 30/01/2018 - L'alpiniste Élisabeth Revol a regagné la France mardi soir après avoir été secourue in extremis en redescendant du Nanga Parbat, 9e plus haut sommet du monde au Pakistan, où est mort son compagnon de cordée polonais Tomasz Mackiewicz.

Partie du Pakistan le matin même, la jeune femme de 37 ans a atterri en fin de journée en Suisse, d'où elle devait être acheminée à Sallanches (Haute-Savoie), à l'hôpital des Pays du Mont-Blanc, pôle d'excellence en pathologie de la montagne et du froid.
La rescapée de "la montagne tueuse" (8.126 m) souffre de gelures aux mains et au pied gauche, qui doivent faire l'objet d'un protocole particulier pour tenter d'éviter l'amputation, après de premiers soins prodigués à Islamabad, en lien avec un spécialiste français.
"Elle va rester une huitaine de jours", a déclaré à la presse le Dr Frédéric Champly. Quotidiennement, elle recevra des injections intraveineuses de vasodilatateurs puissants et suivra une séance d'oxygénation en caisson hyperbare - dans un hôpital partenaire à Genève - afin de récupérer les tissus. Nettoyages et pansements permettront d'enlever les chairs nécrosées et de protéger les membres abîmés.
Une scintigraphie à son arrivée et après 7 jours de traitement permettra de faire une première estimation de l'atteinte osseuse des gelures, qui pourrait nécessiter une amputation. "Ça ne se décidera vraiment pas tout de suite, on a jusqu'à 45 jours devant nous", a expliqué le chef de pôle urgences-médecine de montagne.
Un accompagnement psychologique lui sera aussi proposé car "elle a subi un stress qui dépasse les gelures", même si les alpinistes chevronnés ont généralement des "profils psychologiques solides", a souligné le Dr Champly.

- 'En hiver, c'est fou!' -

"Solide ? Ah oui, on peut le dire !", a confié à l'AFP Ludovic Giambiasi, un ami de longue date de la Drômoise. Il assurait depuis Gap le suivi météo de cette expédition qui avait débuté le 15 décembre, dans l'anonymat.
Élisabeth Revol, une des rares femmes "himalayistes", y tentait pour la seconde fois en hiver l'ascension extrêmement engagée du Nanga Parbat, dont le nom signifie "la montagne nue". Son compagnon de cordée, "Tomek", 43 ans, y revenait lui pour sa 7e tentative hivernale.
"Ils ont voulu la faire en hiver. Déjà en été c'est compliqué, mais en hiver, c'est fou ! Et en style alpin, c'est-à-dire sans oxygène et sans sherpa...", a souligné Catherine Destivelle, figure mondiale de l'alpinisme, venue prêter main forte pour ce retour sous le feu des projecteurs.
Cette première pour une femme - le Nanga Parbat a déjà été gravi en hiver par une cordée d'hommes - a été terni par le drame de la descente. Le Polonais semble avoir été atteint d'une ophtalmie des neiges, de gelures sérieuses qui saignaient et d'œdèmes pulmonaire et cérébral, l'empêchant de marcher.
L'appel de détresse lancé le 25 janvier au soir par Élisabeth Revol a déclenché une opération de secours inédite, avec un financement participatif qui a recueilli en un temps record l'argent nécessaire pour payer l'hélicoptère de l'armée pakistanaise.

- Elle ne retentera pas le Nanga Parbat -

Quatre alpinistes polonais acclimatés au camp de base d'un autre géant situé non loin, le K2 (8.611 m), en vue d'une autre première hivernale, ont pu tenter le secours. L'opération a été lancée samedi et Élisabeth Revol a été évacuée dimanche.
Les sauveteurs n'ont pas été en mesure d'atteindre Tomek, resté bloqué plus haut sur la montagne, et ont dû prendre la "décision terrible et douloureuse" de le laisser là. La liste de quelque 70 morts de cette montagne s'est encore allongée.
Tomasz Mackiewicz laisse derrière lui plusieurs enfants auxquels reviendront le solde des 160.000 euros collectés à 80% via des dons polonais, selon Masha Gordon, une amie alpiniste qui a lancé l'opération en ligne.
En quittant le Pakistan, Élisabeth Revol, qui enseigne le sport parallèlement à l'alpinisme, a assuré qu'elle "reviendrait grimper des montagnes mais pas le Nanga Parbat".
Pour son mari Jean-Christophe, un brocanteur-antiquaire qui "craint à chaque fois qu'elle ne rentre pas", l'heure est pour l'instant au "soulagement".

le Mercredi 31 Janvier 2018 à 02:49 | Lu 747 fois