Relaxe générale dans l'affaire du marché du câble Honotua


Le parquet, qui avait requis la condamnation des prévenus à l'exception de Jean-Paul Barral, peut encore faire appel de cette décision.
PAPEETE, le 22 mars 2016 - Le tribunal correctionnel de Papeete a rendu son délibéré, ce mardi, dans cette longue et tortueuse affaire de favoritisme et de recel de favoritisme présumés, jugée en février dernier après huit ans de procédure.


Dix prévenus, une semaine d'audience et huit ans de procédure plus tard, le tribunal correctionnel de Papeete a prononcé, ce mardi, une relaxe générale dans l'affaire de favoritisme présumé portant sur les conditions d'attribution du marché du câble internet Honotua par l'OPT à Alcatel Submarine Networks (ASN). Un marché à 8,9 milliards de francs remporté en 2008 par le géant français des télécoms, sur la base d'un cahier des charges élaboré par deux anciens de la maison, deux techniciens métropolitains opportunément recrutés à l'époque par l'OPT et qui n'étaient pas non plus des inconnus des dirigeants de la maison mère. Deux autres candidats à l'attribution du marché, l'américain Tyco et le japonais Nec, avaient jeté l'éponge avant la fin de la procédure estimant la partie jouée d'avance.

Dans ce dossier, l'accusation reprochait localement aux dirigeants successifs de l'OPT à l'époque (Alphonse Teriieroriterai, Jean-Paul Barral, et Jean-Alain Frébault) et à son autorité de tutelle (Emile Vernaudon, alors ministre des Télécommunications) d'avoir fermé les yeux sur ce mélange des genres, "des petits arrangements entre amis" avait estimé le parquet à l'audience, en s'affranchissant des principes d'égalité d'accès des candidats à l'attribution des marchés publics. Georges Puchon, en qualité de conseiller spécial sur ce dossier, avait lui aussi été renvoyé devant le tribunal.

Tous ont donc été relaxés, au même titre que les deux anciens d'Alcatel chargés de construire le projet, dans sa partie technique comme dans sa partie exploitation, la société Alcatel Submarine Networks et ses dirigeants.

Le parquet peut encore décider de faire appel

"C'était une décision attendue, nous sommes heureux que la justice ait enfin ouvert les yeux sur ce dossier", s'est réjoui Me Thibault Millet, avocat de Georges Puchon. "Cela fait plusieurs années que tous les avocats et même le ministère public -l'avocat général à l'époque devant le chambre de l'instruction- considèrent qu'il n'y a aucune irrégularité dans ce dossier, que l'intérêt général a été préservé dans cette affaire, que la meilleure chose qui pouvait arriver pour la Polynésie française était justement de conclure ce marché avec Alcatel qui était la société la plus compétente pour faire ce câble, et la moins chère. On a passé des années en chambre de l'instruction, on a dépensé des millions de francs pacifiques en déplacements, en recherches et en investigations diverses qui finalement n'ont menés à rien. Le parquet général avait demandé qu'on en termine, il avait sifflé la fin de la récréation et par extraordinaire le juge d'instruction avait décidé de renvoyer l'affaire devant le tribunal. Le ministère public avait changé son fusil d'épaule en maintenant l'accusation. Aujourd'hui c'est terminé, j'espère que le ministère public ne fera appel".

Le parquet avait requis 1 milliard de francs d'amende contre la société française le 4 mars dernier, et des peines de un an à 18 mois de prison avec sursis assorties d'amendes contre les divers protagonistes du dossier, à l'exception de Jean-Paul Barral.

Si le tribunal n'a pas développé oralement les attendus de son jugement, les avocats ont donc estimé que les juges n'avaient constaté aucune violation dans ce dossier aux règlements de l'OPT en matière de passation de marchés publics. L'étroitesse du marché, la technicité du secteur, la volonté d'une mise en œuvre rapide et l'importance des sommes engagées auraient naturellement poussé l'OPT dans les bras du "partenaire" français et leader mondial Alcatel.


Rédigé par Raphaël Pierre le Mardi 22 Mars 2016 à 14:31 | Lu 1155 fois