Regain d'intérêt pour l'exploitation minière des grands fonds marins


Boston, Etats-Unis | AFP | dimanche 19/02/2017 - Le risque d'épuisement de métaux essentiels à la croissance économique dans les prochaines décennies suscite un intérêt grandissant pour l'exploitation minière des grands fonds marins, potentiellement riches en minerais. 
Mais cette perspective suscite aussi des craintes quant à l'impact environnemental de ces activités sur ces vastes espaces vierges, ont expliqué ce weekend des experts à une conférence scientifique.
La croissance démographique et l'accélération des innovations technologiques ont fait doubler en 40 ans la quantité de minerais extraits dans le monde, ce qui conduira à des pénuries de certains métaux stratégiques, pointe un récent rapport du Programme des Nations-Unies pour l’environnement.
  - Essentielle -  
"L'extraction minière est essentielle pour la société moderne et peu de personnes en sont conscientes", a relevé Thomas Graedel, professeur émérite d'écologie industrielle à l'Université de Yale (Connecticut) lors d'une présentation à la conférence de l'American association pour l'avancement de la science (AAAS), qui se tient ce weekend à Boston.
"Si le développement économique dans le monde se poursuit au rythme actuel, les réserves minières actuelles pourraient ne pas suffire pour faire face à la demande" même avec le recyclage, a-t-il estimé citant un modèle mis au point avec d'autres chercheurs.
Concernant le cuivre, essentiel dans les équipements électriques et nombre de secteurs industriels, une pénurie pourrait se produire vers les années 2050, a aussi pointé le professeur. 
Face à ces incertitudes et ces craintes, il a souligné l'importance potentielle des ressources minières des fonds marins tout en soulignant les risque environnementaux. 
Outre le cuivre il s'agit du cobalt, du fer, du manganèse, du platine, du nickel, de l'or ou des terres rares, qui se situent généralement à des profondeurs variant de quelques centaines à plusieurs milliers de mètres.
Mais "les estimations actuelles des réserves sous marines de ces minerais sont encore incertaines", a souligné le professeur Mark Hannington, directeur du Groupe pour les ressources marines au Centre GEOMAR-Helmmholtz à Kiel en Allemagne.
Il estime à partir des observations faites jusqu'à présent que les cheminée hydrothermales résultant de l'activité volcanique pourraient contenir de 600 à mille millions de tonnes de minerais dont 30 millions de tonnes de cuivre et de zinc, des ressources susceptibles de répondre à la demande croissante de l'économie mondiale.
Il cite également "la probable grande abondance des nodules" - des concrétions rocheuses qui reposent sur le lit océanique - de différents métaux (manganèse, fer, nickel...).
      - Trop tard dans 30 ans -    
Toutefois on ignore encore toute l'étendue de ce potentiel puisque ces trente dernières années l'exploration s'est concentrée surtout sur les zones à proximité des cheminées hydrothermales.
"Nous n'y avons pas encore découvert de vastes gisements et nous devons trouver un moyen de les détecter et de les évaluer pour vraiment comprendre le vrai potentiel de ces ressources" encore inexploitées, a dit le professeur Hannington.
"Il n'y a pas d'autres options pour la communauté scientifique que de poursuivre l'exploration qu'il faut accélérer fortement ... car dans trente ans il sera trop tard", a-t-il ajouté.
Il a noté que les permis d'exploration déjà attribués dans le monde ne représentaient que 0,5% de la superficie totale de tous ces fonds marins, ce qui est très insuffisant pour se faire une idée du potentiel minier total.
A ce jour 27 pays dont la Chine et l'Inde ont conclu des contrats pour explorer ces ressources avec l'Autorité internationale des fonds marins, l'organisation onusienne qui contrôle l'exploration et l'exploitation de cette espace situé au-delà des juridictions nationales.
Mais vu l'ampleur des risques pour ces écosystèmes fragiles, une nouvelle approche internationale pour gérer ces richesses minières devrait être mise en place, ont fait valoir récemment un groupe international de scientifiques dans un rapport publié dans la revue américaine Science.
Les eaux à plus de 200 mètres de profondeur représentent jusqu'à 65% des océans du globe et sont vulnérables aux activités humaines qui pourraient altérer "le cycle de la vie...comme le recyclage des nutriments”.
Stace Beaulieu, une biologiste à la  Woods Hole Oceanographic Institution, a mis en garde contre le risque que "les écosystèmes actifs des cheminées hydrothermales subissent un impact catastrophique avec une perte d'habitat et des organismes qui en dépendent".

le Lundi 20 Février 2017 à 03:21 | Lu 486 fois