Recours à la prostitution de mineures : « ils sont allés chercher des enfants de la rue »


PAPEETE, le 19 juillet 2019 - Quatre hommes, âgés de 55 à 73 ans, ont été présentés en comparution immédiate ce jeudi pour répondre de « recours à la prostitution » de deux mineures et de deux majeures. Ils ont été condamnés à des peines comprises entre 10 et 18 mois de prison ferme.

Avant que l'audience ne débute, l'avocate de l'unique partie civile de ce dossier, la mineure qui était la plus jeune à l'époque des faits, a demandé le huis clos total. En l'absence de cette victime, le procureur de la République a estimé qu'il était peut-être « intéressant » que tels faits soient connus. Après en avoir délibéré, le tribunal correctionnel a ordonné un huis clos partiel autorisant la présence de la presse.

Les quatre individus avaient été déférés au tribunal le 28 juin dernier au terme de 48 heures de garde à vue au sein des locaux de la Brigade de recherches de Faa'a qui était en charge de l'enquête. Ils avaient ensuite été placés sous contrôle judiciaire.

L’affaire avait débuté en août 2018 suite à une dénonciation anonyme. Dénonciation anonyme qui avait en fait été effectuée par la femme de l'un des prévenus. L’enquête préliminaire avait permis d'établir que les quatre mis en cause avaient recours à des prostituées dont deux d'entre elles étaient des mineures. La plus jeune des prostituées n'avait que 12 ans à l'époque des premiers rapports tarifés. Sans domicile fixe, la jeune fille vivait sur une plage avec son copain de l'époque. Face aux enquêteurs, cette victime avait indiqué qu'elle avait commencé à se prostituer afin de « manger ». Lorsque son compagnon était au foot ou au surf, elle s'asseyait « au bord de la route » et des « hommes s'arrêtaient ».

Les quatre hommes ont été présentés en comparution immédiate ce jeudi. A la barre, ils ont tous adopté la même défense en expliquant qu'ils n'avaient pas connaissance de la minorité des deux prostituées mineures. Le tribunal a ensuite évoqué leurs personnalités. Parmi les prévenus : un chef d'entreprise déjà condamné à 8 reprises dont une fois pour des faits d'atteinte sexuelle sur mineure de 15 ans, un pharmacien à la retraite actionnaire majoritaire d'une pension à Moorea, un chargé de service de la mairie qui recevait les prostituées mineures dans son bureau et un retraité en instance de divorce. Tous avaient fréquenté les deux prostituées mineures en échange d'argent mais aussi de nourriture ou du paiement de factures EDT.

Préjudice moral

Lors de sa plaidoirie, l'avocate de l'unique partie civile dans ce dossier, la mineure la plus jeune, a rappelé qu'à l'époque des faits, sa cliente était une « enfant de 12 ans » qui s'était retrouvée « à la rue ». « On ne se prostitue pas volontairement à cet âge! Il faudra un travail énorme pour récupérer cette jeune fille dont tout le monde a profité » a t-elle conclu avant de demander 1, 5 million au titre du préjudice moral subi par la victime.

« Ces quatre hommes ont pour certains amassé des fortunes considérables, pour d'autres, ils avaient des vies de bons pères de famille. Ils sont allés chercher des gamines et pas n'importe quels enfants :des enfants de la rue. Ces mêmes enfants qui sont obligés de s'adonner à une prostitution de nécessité car ils vivent dans une grande précarité», a fermement conclu le procureur de la République avant de requérir des peines comprises entre 12 et 18 mois de prison ferme.

Pour la défense du retraité, Me Eftimie a dénoncé une vision « machiste et archaïque » du dossier dans lequel une jeune fille décide « sciemment d'avoir les relations sexuelles qu'elle veut » . Me Bennouar, l'avocat de l'employé de la mairie de Papeete a, quant à lui, évoqué l' « erreur d'une vie » commise par un homme qui n'avait jamais eu aucun problème auparavant.

Après en avoir délibéré, le tribunal a condamné les quatre prévenus à des peines comprises entre 10 et 18 mois de prison ferme.








Rédigé par Garance Colbert le Vendredi 19 Juillet 2019 à 08:45 | Lu 9933 fois