
Crédit photo : Thibault Segalard.
Tahiti, le 10 avril 2025 - Après plus d’un an de travaux, la première moitié du quai au long cours, axe stratégique du commerce international à Papeete, est désormais opérationnelle. Une étape majeure d’un chantier à 2,5 milliards de francs. Mais tandis que les grues ont repris pour la première fois leur ballet du côté gauche du quai, Quito Braun-Ortega, P-dg de la société d’aconage Cowan, est toujours dubitatif vis-à-vis des propositions issues du colloque contre la vie chère, organisé le mois dernier à Tarahoi et appelle les décideurs “à venir sur le terrain”.
C’est un détail presque banal, qui aurait pu passer inaperçu mais ce jeudi matin, un porte-conteneurs a été déchargé pour la première fois depuis la partie rénovée du quai au long cours, à Papeete, destiné au commerce international. “Le quai est parfait, pas de poussière, pas de trou”, salue, satisfait, Quito Braun-Ortega, P-dg de la société d’aconage Cowan, en observant la manœuvre. Le ballet millimétré des camions, les grues rutilantes et les conteneurs posés au sol à cadence régulière est impressionnant. Le tempo est rodé et réglé comme du papier à musique.
Il aura fallu un peu plus d’un an pour livrer cette première tranche des travaux. Le chantier, entamé début 2023, se poursuit désormais sur l’autre moitié du quai, fermée depuis lundi pour un an de réfection. L’objectif, d’ici 2026 : un quai intégralement remis à neuf, capable d’absorber plus efficacement les flux de marchandises des trois sociétés d’aconage – Cowan, Cotada et Sat Nui.
Une fluidité espérée… et des méthodes distinctes entre acconiers
Depuis le début des travaux, les acconiers doivent composer avec un espace parfois limité, contraints d’empiler et de déplacer leurs conteneurs sur un site pas toujours adapté. D'ici douze mois, avec une surface de travail mieux agencée et un quai modernisé, chacun peut espérer voir ses opérations gagner en fluidité. Et ces opérations de manutention varient selon les acconiers, chacun appliquant ses propres méthodes en fonction des compagnies maritimes avec lesquelles il travaille.
Car à Papeete, chaque société de manutention a sa stratégie, ses habitudes, ses compagnies maritimes partenaires. Pour Cowan, par exemple, les opérations se concentrent sur les navires de CMA-CGM, présents une fois par semaine, entre 6 heures et 22 heures. “C’est le port qui nous informe des jours exacts d'arrivées et départs, même si parfois, il y a des retards”, précise Quito Braun-Ortega. Lorsqu’un porte-conteneurs accoste, la société en charge de sa manutention positionne ses grues au plus près du navire, puis les retire une fois l’opération terminée afin de laisser la place à ses concurrents. En moyenne, Cowan assure environ 45% du volume total de fret traité au port, contre 30% pour Cotada et 25% pour Sat Nui.
Un équilibre fragile, difficilement comparable. “Les navires sont différents, les lignes commerciales aussi, et chaque société a sa méthode de déchargement. Chacun fait au mieux avec ses moyens”, résume le patron de la SA Cowan.
Colloque contre la vie chère : la pilule ne passe pas
Mais derrière les manœuvres bien huilées, la tension monte. Depuis le colloque contre la vie chère organisé à l’assemblée de la Polynésie française les 18 et 19 mars derniers, les professionnels du port scrutent les orientations du gouvernement. Parmi les pistes avancées par l’Autorité polynésienne de la concurrence (APC), co-organisatrice de l’événement, figure en bonne place la mutualisation des moyens portuaires, notamment des grues. Objectif affiché : faire baisser les prix à la consommation.
C’est un détail presque banal, qui aurait pu passer inaperçu mais ce jeudi matin, un porte-conteneurs a été déchargé pour la première fois depuis la partie rénovée du quai au long cours, à Papeete, destiné au commerce international. “Le quai est parfait, pas de poussière, pas de trou”, salue, satisfait, Quito Braun-Ortega, P-dg de la société d’aconage Cowan, en observant la manœuvre. Le ballet millimétré des camions, les grues rutilantes et les conteneurs posés au sol à cadence régulière est impressionnant. Le tempo est rodé et réglé comme du papier à musique.
Il aura fallu un peu plus d’un an pour livrer cette première tranche des travaux. Le chantier, entamé début 2023, se poursuit désormais sur l’autre moitié du quai, fermée depuis lundi pour un an de réfection. L’objectif, d’ici 2026 : un quai intégralement remis à neuf, capable d’absorber plus efficacement les flux de marchandises des trois sociétés d’aconage – Cowan, Cotada et Sat Nui.
Une fluidité espérée… et des méthodes distinctes entre acconiers
Depuis le début des travaux, les acconiers doivent composer avec un espace parfois limité, contraints d’empiler et de déplacer leurs conteneurs sur un site pas toujours adapté. D'ici douze mois, avec une surface de travail mieux agencée et un quai modernisé, chacun peut espérer voir ses opérations gagner en fluidité. Et ces opérations de manutention varient selon les acconiers, chacun appliquant ses propres méthodes en fonction des compagnies maritimes avec lesquelles il travaille.
Car à Papeete, chaque société de manutention a sa stratégie, ses habitudes, ses compagnies maritimes partenaires. Pour Cowan, par exemple, les opérations se concentrent sur les navires de CMA-CGM, présents une fois par semaine, entre 6 heures et 22 heures. “C’est le port qui nous informe des jours exacts d'arrivées et départs, même si parfois, il y a des retards”, précise Quito Braun-Ortega. Lorsqu’un porte-conteneurs accoste, la société en charge de sa manutention positionne ses grues au plus près du navire, puis les retire une fois l’opération terminée afin de laisser la place à ses concurrents. En moyenne, Cowan assure environ 45% du volume total de fret traité au port, contre 30% pour Cotada et 25% pour Sat Nui.
Un équilibre fragile, difficilement comparable. “Les navires sont différents, les lignes commerciales aussi, et chaque société a sa méthode de déchargement. Chacun fait au mieux avec ses moyens”, résume le patron de la SA Cowan.
Colloque contre la vie chère : la pilule ne passe pas
Mais derrière les manœuvres bien huilées, la tension monte. Depuis le colloque contre la vie chère organisé à l’assemblée de la Polynésie française les 18 et 19 mars derniers, les professionnels du port scrutent les orientations du gouvernement. Parmi les pistes avancées par l’Autorité polynésienne de la concurrence (APC), co-organisatrice de l’événement, figure en bonne place la mutualisation des moyens portuaires, notamment des grues. Objectif affiché : faire baisser les prix à la consommation.

Crédit photo: Thibault Segalard.
La proposition a fait bondir Quito Braun-Ortega : “Qu’ils viennent voir comment ça se passe ici, sur le terrain. Personne ne vient jamais [...]. Les gens ont une fausse idée de ce qu'est la manutention portuaire”, regrette-t-il. Selon lui, mutualiser les grues reviendrait à méconnaître la réalité économique et organisationnelle du secteur. “Chacun des acconiers à ses intérêts. On avait tenté de [mutualiser les grues] en 2012, mais ça n'a pas marché”, rappelle-t-il.
Il insiste : l’exploitation des trois grues de Cowan – dont la troisième a été acquise sans défiscalisation – n’est opérée que par à peine 20% de sa masse salariale. “Si on veut vraiment baisser les coûts, il faudrait plutôt mutualiser le personnel !” lâche-t-il, non sans une certaine ironie. “Mais ça reviendrait à réactiver le Bureau Central de la Main d’Œuvre Portuaire (BCMOP), ainsi les futurs dockers seraient payés par navire uniquement alors qu’aujourd’hui nos salariés sont mensualisés avec notamment un 13e mois… On reviendrait à la belle époque de la manutention portuaire manuelle, cartons par cartons ou palettisés.”
Des tarifs déjà encadrés
Mais derrière le débat technique, le fait est que les tarifs de manutention portuaire sont conventionnels. C’est le conseil des ministres qui les fixe, et non par les entreprises elles-mêmes. “Ils ont été révisés en 2023, avec une augmentation de 10%, dont la quasi-totalité a été répercutée sur les salaires de nos travailleurs”, souligne Quito Braun-Ortega. Aujourd’hui, la manutention d’un conteneur plein de 20 pieds est facturée 64 000 francs. Le tarif est identique quel que soit l’opérateur. En clair pour le P-dg de la SA Cowan, mutualiser les grues ne changerait rien aux prix pratiqués.
Il insiste : l’exploitation des trois grues de Cowan – dont la troisième a été acquise sans défiscalisation – n’est opérée que par à peine 20% de sa masse salariale. “Si on veut vraiment baisser les coûts, il faudrait plutôt mutualiser le personnel !” lâche-t-il, non sans une certaine ironie. “Mais ça reviendrait à réactiver le Bureau Central de la Main d’Œuvre Portuaire (BCMOP), ainsi les futurs dockers seraient payés par navire uniquement alors qu’aujourd’hui nos salariés sont mensualisés avec notamment un 13e mois… On reviendrait à la belle époque de la manutention portuaire manuelle, cartons par cartons ou palettisés.”
Des tarifs déjà encadrés
Mais derrière le débat technique, le fait est que les tarifs de manutention portuaire sont conventionnels. C’est le conseil des ministres qui les fixe, et non par les entreprises elles-mêmes. “Ils ont été révisés en 2023, avec une augmentation de 10%, dont la quasi-totalité a été répercutée sur les salaires de nos travailleurs”, souligne Quito Braun-Ortega. Aujourd’hui, la manutention d’un conteneur plein de 20 pieds est facturée 64 000 francs. Le tarif est identique quel que soit l’opérateur. En clair pour le P-dg de la SA Cowan, mutualiser les grues ne changerait rien aux prix pratiqués.