Un panneau d'information a été installé à Punaauia au PK 12, un peu avant les dernières vallées à Monarque de Tahiti. Il informe le public de la zone de protection du Monarque entre le PK 12 et le PK 23, où la population doit éviter d'introduire la Petite fourmi de feu et de nourrir les oiseaux invasifs que sont le Merle des Moluques et le Bulbul à ventre rouge.
PAPEETE, le 14 novembre 2018 - Les mairies de Punaauia et de Paea, qui hébergent les tous derniers Monarques de Tahiti survivants, ont décidé de renforcer leur collaboration avec l'association en charge de les protéger, la SOP manu. Une convention a été signée pour accentuer la lutte contre la Petite fourmi de feu, le Martin triste et le Bulbul. Ces espèces invasives attaquent notre 'Ōmāma'o et tuent leurs petits, une grave menace qui pèse sur cette espèce en danger critique d'extinction.
Il y a 70 Monarques de Tahiti connus, et ce sont les derniers survivants au monde de leur espèce. Ils vivent dans trois vallées de la côte est de Tahiti : Maruapo, Papehue et Hopa. Depuis 2015, les communes de Punaauia et Paea, qui hébergent cette rare espèce, se sont mobilisées pour sa protection. Elles apportent des subventions au programme de sauvegarde, mais elles font aussi le travail d'interface, de sensibilisation et d'information auprès de leurs administrés.
Cette collaboration a permis de lancer un programme avec les habitants voisins des vallées. 50 familles se sont ainsi impliquées dans un programme de piégeage de deux espèces invasives : le Martin triste (ou Merle des Moluques) et le Bulbul à ventre rouge. Ces deux oiseaux semblent bien innocents, mais ils ne viennent pas de nos îles. Introduits par l'Homme, ils se sont révélés redoutables pour les Monarques.
Caroline Blanvillain, chargée de programmes pour la protection des oiseaux terrestres à l'association SOP Manu, nous explique comment, en 20 ans de travail, Manu a réussi à faire passer la population de monarques de 20 oiseaux à 70 oiseaux. Selon elle, les merles et les bulbuls "sont très agressifs. On s'est aperçus qu'ils attaquent les nids des monarques, ils y vont plusieurs fois par jour jusqu'à réussir à détruire les nids. C'était en 2012, on commençait à contrôler les rats, mais dans la vallée ça se passait toujours très mal. On perdait énormément de poussins, les femelles qui défendaient leurs petits se retrouvaient mourantes avec les ailes cassées par terre, c'était horrible... C'est pour ça qu'en 2012 on a lancé ce programme de piégeage avec Suzana Saavedra, qui nous a appris les techniques développées ailleurs dans le Pacifique. Depuis trois ans, les habitants des deux communes se sont impliquées encore plus fortement dans ce projet et maintenant nous avons 50 piégeurs qui se relaient toute l'année. Grâce à ça, les Monarques se portent bien mieux."
LE MONARQUE NE SURVIVRA PAS SEUL
Il faut dire que sauver le monarque n'est pas aidé par la biologie. Après des millions d'années à vivre à Tahiti sans aucun prédateur, le 'ōmāma'o a appris à faire très peu d'enfants : les couples ne font un nid qu'un an sur deux, puis ils ne feront un poussin que dans un nid sur deux... Un comportement adapté pour éviter la surpopulation en temps de paix, mais très dangereux quand les rats noirs, les busards, les merles, les bulbuls et la petite fourmi de feu ravagent chaque nouvelle génération... "Au lancement du programme de sauvegarde en 1998, quand nous avions commencé avec 20 individus, nous avions une croissance de leur population de 1% par an en contrôlant principalement les rats. Depuis 2012 on protège les nids contre les oiseaux introduits, et nous avons une croissance de 14 % par an ! Il y a même 8 bébés en ce moment. Ce projet a vraiment été un tournant dans le programme, d'où l'importance de le pérenniser avec cette convention."
Il y a 70 Monarques de Tahiti connus, et ce sont les derniers survivants au monde de leur espèce. Ils vivent dans trois vallées de la côte est de Tahiti : Maruapo, Papehue et Hopa. Depuis 2015, les communes de Punaauia et Paea, qui hébergent cette rare espèce, se sont mobilisées pour sa protection. Elles apportent des subventions au programme de sauvegarde, mais elles font aussi le travail d'interface, de sensibilisation et d'information auprès de leurs administrés.
Cette collaboration a permis de lancer un programme avec les habitants voisins des vallées. 50 familles se sont ainsi impliquées dans un programme de piégeage de deux espèces invasives : le Martin triste (ou Merle des Moluques) et le Bulbul à ventre rouge. Ces deux oiseaux semblent bien innocents, mais ils ne viennent pas de nos îles. Introduits par l'Homme, ils se sont révélés redoutables pour les Monarques.
Caroline Blanvillain, chargée de programmes pour la protection des oiseaux terrestres à l'association SOP Manu, nous explique comment, en 20 ans de travail, Manu a réussi à faire passer la population de monarques de 20 oiseaux à 70 oiseaux. Selon elle, les merles et les bulbuls "sont très agressifs. On s'est aperçus qu'ils attaquent les nids des monarques, ils y vont plusieurs fois par jour jusqu'à réussir à détruire les nids. C'était en 2012, on commençait à contrôler les rats, mais dans la vallée ça se passait toujours très mal. On perdait énormément de poussins, les femelles qui défendaient leurs petits se retrouvaient mourantes avec les ailes cassées par terre, c'était horrible... C'est pour ça qu'en 2012 on a lancé ce programme de piégeage avec Suzana Saavedra, qui nous a appris les techniques développées ailleurs dans le Pacifique. Depuis trois ans, les habitants des deux communes se sont impliquées encore plus fortement dans ce projet et maintenant nous avons 50 piégeurs qui se relaient toute l'année. Grâce à ça, les Monarques se portent bien mieux."
LE MONARQUE NE SURVIVRA PAS SEUL
Il faut dire que sauver le monarque n'est pas aidé par la biologie. Après des millions d'années à vivre à Tahiti sans aucun prédateur, le 'ōmāma'o a appris à faire très peu d'enfants : les couples ne font un nid qu'un an sur deux, puis ils ne feront un poussin que dans un nid sur deux... Un comportement adapté pour éviter la surpopulation en temps de paix, mais très dangereux quand les rats noirs, les busards, les merles, les bulbuls et la petite fourmi de feu ravagent chaque nouvelle génération... "Au lancement du programme de sauvegarde en 1998, quand nous avions commencé avec 20 individus, nous avions une croissance de leur population de 1% par an en contrôlant principalement les rats. Depuis 2012 on protège les nids contre les oiseaux introduits, et nous avons une croissance de 14 % par an ! Il y a même 8 bébés en ce moment. Ce projet a vraiment été un tournant dans le programme, d'où l'importance de le pérenniser avec cette convention."
Les communes de Punaauia et de Paea ont signé une convention avec la SOP Manu pour aider à la protection du Monarque de Tahiti contre les espèces invasives. (à gauche Roberto Luta, président de la SOP manu, au milieu Simplicio Lissant, maire de Punaauia, et à droite Bertho Roomataaroa, du conseil municipal de Paea)
Car pour préserver ces progrès, un "pacte" a été signé ce mercredi 14 novembre entre les deux communes et l'association. Elles travailleront ensemble à la poursuite du programme de piégeage des oiseaux introduits et au contrôle de la Petite fourmi de feu (voir encadré). Tout pour que les générations futures puissent connaitre elles aussi le Monarque, un oiseau curieux qui cherche la compagnie de l'homme, et n'a aucun moyen de se défendre seul contre les changements très rapides que subit l'environnement de notre île.
70 hectares traités contre la Petite fourmi de feu
Le cas de Te Maru Ata, dont une falaise donne directement sur une vallée protégée. Chaque point rouge était une zone contaminée par la PFF, on voit qu'elle est désormais presque éradiquée.
La Petite fourmi de feu (PFF) est une vraie plaie. Dans les zones où ses mégacolonies s'installent, les insectes et les petits animaux disparaissent, les habitants et agriculteurs souffrent des piqures très douloureuses de la fourmi, et même les animaux de compagnie se font attaquer et risquent de devenir aveugles. Pour le monarque, le danger est encore plus grand : la disparition des insectes les laissent sans nourriture, et leurs nids se font envahir par cette peste qui s'en prend à leurs petits...
L'association SOP Manu a donc commencé un grand programme d'extermination dans les vallées protégées. Josquin Michoud, qui travaille sur place avec Laurent Yan pour protéger les monarques, nous explique que "sur le terrain, la menace numéro un est le rat noir, c'est notre plus vieil ennemi. Il y en a trop pour l'éradiquer, donc on essaye de maintenir la population très bas. Mais la nouvelle menace, c'est la Petite fourmi de feu. Il y a déjà eu des programmes dans le reste du Pacifique, en Australie et à Hawaii, mais à Tahiti c'est Manu avec quelques autres associations qui la combat. Nous avons commencé en 2012, et nous avons traité 70 hectares. 6 hectares situés sur les falaises ont été traités par drone, ça semble très efficace. Le reste est fait à pied. On trace des chemins parallèles tous les 20 mètres et avec un pulvérisateur qui a une portée de 10 mètres on arrive à tout couvrir." La population, au moins ceux qui se sont déjà fait piquer est réceptive à ces efforts... L'association a donc pu aider les résidences voisines des vallées protégées à traiter leurs terrains contre la PFF et éviter que les colonies "débordent" sur l'habitat des monarques. C'est le cas de la résidence Te Maru Ata, qui a presque exterminé l'invasion. Les mairies, avec leurs efforts de prévention et de sensibilisation, ont là encore beaucoup aidé.
L'association SOP Manu a donc commencé un grand programme d'extermination dans les vallées protégées. Josquin Michoud, qui travaille sur place avec Laurent Yan pour protéger les monarques, nous explique que "sur le terrain, la menace numéro un est le rat noir, c'est notre plus vieil ennemi. Il y en a trop pour l'éradiquer, donc on essaye de maintenir la population très bas. Mais la nouvelle menace, c'est la Petite fourmi de feu. Il y a déjà eu des programmes dans le reste du Pacifique, en Australie et à Hawaii, mais à Tahiti c'est Manu avec quelques autres associations qui la combat. Nous avons commencé en 2012, et nous avons traité 70 hectares. 6 hectares situés sur les falaises ont été traités par drone, ça semble très efficace. Le reste est fait à pied. On trace des chemins parallèles tous les 20 mètres et avec un pulvérisateur qui a une portée de 10 mètres on arrive à tout couvrir." La population, au moins ceux qui se sont déjà fait piquer est réceptive à ces efforts... L'association a donc pu aider les résidences voisines des vallées protégées à traiter leurs terrains contre la PFF et éviter que les colonies "débordent" sur l'habitat des monarques. C'est le cas de la résidence Te Maru Ata, qui a presque exterminé l'invasion. Les mairies, avec leurs efforts de prévention et de sensibilisation, ont là encore beaucoup aidé.
Les maires veulent protéger leur patrimoine naturel
Simplicio Lissant, maire de Punaauia, et Bertho Roomataaroa, du conseil municipal de Paea, ont inauguré le panneau d'information du PK 12 et ont signé une convention avec l'association SOP Manu pour accentuer les efforts pour protéger le Monarque de Tahiti. Simplicio Lissant nous explique que "c'est important de sauver ces espèces pour préserver le patrimoine naturel de la commune. Pour les générations futures, mais aussi pour le développement touristique. C'est un moyen de développer le tourisme vert, le tourisme écologique dans la commune." Il reconnait que beaucoup d'efforts restent à faire : "Nos deux communes se sont engagées financièrement aux côté de l'association SOP Manu, mais il faut aussi sensibiliser toute la population, même avec une action très simple comme limiter les espèces nuisibles. Et ça donne de bons résultats puisque la population du Monarque est en train de remonter. Et si d'aventure les autres communes se joignent à nous, on pourra monter encore plus. Aux îles Cook, où je suis allé, ils ont un Monarque protégé. Avec leur programme ils sont passés de 20 oiseaux à plus de 8000, on les voit partout ! Si les Cook peuvent le faire, nous aussi."
À Paea, Bertho Roomataaroa est lui-même très impliqué dans la préservation du 'ōmāma'o, puisqu'il est un des piégeurs volontaires de la commune. "Lorsque l'on parle de la protection du monarque à la population, on est étonnés du fait qu'ils ne connaissent plus cette espèce. Ça nous attriste un peu, on aurait voulu que toute la population soit mobilisée pour ça" regrette-t-il.
Les deux élus espèrent aussi que les actions de Manu continueront de recevoir le soutien du Pays, de la France et de l'Europe. L'association va en effet subir une baisse de ses financements en 2019 à cause d'une pause du programme de financement européen BEST. Manu a besoin de 20 millions de francs pour continuer son œuvre d'éradication de la Petite fourmi de feu dans les vallées protégées l'année prochaine... Si elle ne les trouve pas, la PFF reprendra son inéluctable marche en avant, toujours plus profond dans ces vallées préservées.
Les deux élus espèrent aussi que les actions de Manu continueront de recevoir le soutien du Pays, de la France et de l'Europe. L'association va en effet subir une baisse de ses financements en 2019 à cause d'une pause du programme de financement européen BEST. Manu a besoin de 20 millions de francs pour continuer son œuvre d'éradication de la Petite fourmi de feu dans les vallées protégées l'année prochaine... Si elle ne les trouve pas, la PFF reprendra son inéluctable marche en avant, toujours plus profond dans ces vallées préservées.