Protection sociale généralisée : un système « à bout de souffle » selon la CTC


C’est un constat sévère que dresse la Chambre territoriale des comptes (CTC) sur le système de solidarité et le fonctionnement des affaires sociales polynésiennes. Dans son rapport qui recouvre les années 2000 à 2009, la Chambre explique que le système de la protection sociale généralisée (PSG) instauré en 1994 est devenu «difficile à maîtriser et instable ». Les chiffres résument à eux seuls l’ampleur du problème : les dépenses de la PSG sont passées de 40,8 milliards en 1995 à près de 103 milliards en 2009 « et leur financement n’est plus totalement assuré par des ressources définitives ».

Au 31 décembre 2010, le déficit cumulé de la seule branche maladie du RGS avait atteint près de 15 milliards. « Le système requiert donc une réforme profonde concernant son financement, ses prestations et ses modalités de gestion » appelle de ses vœux la CTC.

En voici quelques extraits.


Le Régime de Solidarité de Polynésie Française (RSPF), un régime « trop complexe à maîtriser »

« Ce régime non contributif a permis de réussir la généralisation de la couverture maladie et de l’accès à divers droits sociaux, succès auquel l’Etat a contribué dans le cadre de conventions partenariales de 1994 à 2007. Toutefois, le système s’est avéré trop complexe à maîtriser.

Le système est devenu instable sous l’effet d’une crise mal anticipée. Plusieurs facteurs ont été à l’origine de l’instabilité croissante du système. D’abord, les incertitudes qui pèsent actuellement sur les fondamentaux de la PSG, notamment la fin des garanties juridiques d’équilibre du RSPF et l’arrêt de la participation financière de l’Etat à son financement en 2007, ont remis en cause ce qui était considéré comme acquis.

Par ailleurs, la rapidité de la croissance des besoins sociaux, liée à la montée des précarités engendrées par la crise économique, mais aussi à l’accès gratuit ou socialisé aux soins les plus sophistiqués, dans le cadre de la diversification de l’offre de soins et de la modernisation de la société, ont également contribué à fragiliser les bases sur lesquelles reposait la PSG créée en 1994.

Cette instabilité a révélé, au fur et à mesure de son aggravation, une profonde crise de gouvernance du système. L’effacement relatif de la collectivité de la Polynésie française dans son action régulatrice, la faiblesse du contrôle qu’elle a exercé sur ses paramètres fondamentaux ont contribué à déstabiliser le système. Le manque de moyens et de cadres au niveau requis n’a, par ailleurs, pas permis à la PSG de progresser.

Pour répondre à la hausse continue des dépenses sociales, la collectivité de la Polynésie française a privilégié un recours accru à la fiscalité affectée. Mais celle-ci, connaît les mêmes limites que le subventionnement budgétaire, en raison des effets de la crise économique. Une grave crise financière menace donc désormais la survie du système de la PSG.
A ce jour, le système semble « à bout de souffle ». Il mérite, de l’avis de tous les experts consultés, mais aussi des partenaires sociaux, une profonde réforme imaginant d’autres modes d’organisation et faisant appel à d’autres règles de financement.

En 2011, la protection sociale et la solidarité ont besoin d’être refondées pour que les principaux acquis de la PSG puissent être préservés.»

Les recommandations de la Chambre territoriale des comptes

« La Chambre a considéré que la préservation du niveau de protection sociale et de solidarité, dans des conditions financières soutenables, nécessitait une réforme profonde la PSG et de la solidarité. Dans cette perspective, la Chambre formule les recommandations suivantes :

Réforme du régime des prestations :
- le régime des prestations devrait être simplifié et modernisé grâce à l’uniformisation de prestations universelles, sous conditions de ressources ;

- la gestion des prestations uniformisées devrait conduire à leur gestion au sein d’un régime unique, cette mutation devant être effectuée par étapes, négociées avec les partenaires sociaux, sous l’arbitrage de la collectivité de la Polynésie française ;

Révision des règles de gestion et de financement :

- les moyens de contrôle du système de protection sociale par la collectivité de la Polynésie française devraient être améliorés ;

- les modalités de gestion devraient être rendues plus fluides et plus simples, soit dans le cadre de l’actuelle autonomie des régimes, soit dans le cadre d’un régime unifié ;

- les modalités actuelles de financement mériteraient d’être reconsidérées, en fonction des risques à couvrir, sous réserve de conserver le caractère mixte du financement par l’impôt et par les cotisations.

Ainsi :

- le risque maladie pourrait être majoritairement couvert par des cotisations, tout en protégeant le coût du travail par une fiscalité adaptée et en garantissant l’accès des plus démunis au système de santé ;

- le risque famille pourrait être fiscalisé, dans le cadre d’un impôt à assiette large, les prestations pouvant être versées sous conditions de ressources ;

- le risque retraite pourrait être couvert majoritairement par des cotisations, l’impôt contribuant au paiement des retraites minimales.

- la résorption des déficits antérieurs devrait être rapidement mise en œuvre.»

RAPPORT DISPONIBLE DANS SON INTEGRALITE CI-DESSOUS :

CTC rapport système solidarité PF.pdf  (573.55 Ko)


Rédigé par F K le Mercredi 26 Octobre 2011 à 09:26 | Lu 1242 fois