Protection du Monarque : Tahiti et Raroto'a, même combat


Suite au récent succès de l’opération de dératisation et de sécurisation des nids de Monarque de Tahiti, La S.O.P MANU (Société d’Ornithologie de Polynésie Manu) va poursuivre ce programme via des rencontres aux îles Cook. Objectif : s’inspirer des actions menées par la TCA (Takitumu Conservation Area).

Le 'Ōmāma'o ou Monarque de Tahiti est un des 30 oiseaux les plus menacés au monde. Présent uniquement à Tahiti, il disparaît à cause des rats noirs qui dévastent ses nids, des oiseaux introduits qui perturbent sa reproduction, mangent ses poussins voire même ses adultes. Des plantes invasives modifient son habitat tandis que les chèvres prolifèrent dans une des 3 dernières vallées où il persiste.

La protection du 'Ōmāma'o est désormais devenue une cause nationale qui implique les riverains de Pa’ea et de Punaauia, ces deux communes, les enfants de 4 écoles situées près des trois dernières vallées où il persiste, et trois associations : la SOP Manu bien sûr mais également l’association Tamari’i pointe des pêcheurs et l’association 2D attitude.

Ce programme est également un vecteur éco-touristique, une économie pourra naître à partir de l’implication de personnes ayant un terrain qui serait mis à disposition des Monarques. Comment et avec quels moyens ? Les réponses se trouveront pendant des rencontres et échanges avec les îles Cook sont programmés. Leurs actions pourraient inspirer leurs cousins de Tahiti.


Le planning démarre à la 3ème semaine de mars prochain. Quatre propriétaires de terrains de Tahiti se rendront à Rarotonga pour visiter le TCA. Cela leur permettra de comprendre le potentiel économique de leurs oiseaux en termes d'écotourisme. Avec cela, les modes d'organisation possibles pour gérer et tirer des bénéfices d'une aire protégée de façon communautaire.

A la fin de l’année, en décembre, ce sera au tour des rarotongiens de venir à la rencontre de leurs cousins du triangle polynésien. Deux d’entre eux présenteront leur projet de création d’une aire protégée, à l'ensemble des propriétaires de Tahiti. Cela pourrait voir le jour rapidement si le projet est approuvé.


Le TCA, un modèle pour Tahiti

L’histoire de la création d’aires protégés aux îles Cook remonte à 1987. Le Service de l'Environnement avait débuté un plan de sauvegarde pour le Monarque de Rarotonga (Pomareadimidiata). Ils n’étaient alors que 38 puis 29, deux ans plus tard. Les études menées ont fait découvrir le coupable : le rat noir.
En 1995, le Service de l’environnement a entamé des discussions avec les leaders traditionnels et les propriétaires terriens du secteur avec l'idée de créer une aire protégée sur leur terre. D'abord, les propriétaires terriens se sont montrés réticents car ils avaient peur que s'ils consentaient à désigner leur terre comme une aire protégée, un statut juridique spécifique menacerait leur propriété.

Pendant les consultations, il a été promis que la désignation comme « aire protégée » n'impliquerait pas de procédures règlementaires mais seulement un engagement verbal et que les propriétaires garderaient le contrôle de leurs terres. A l’issue d’un consensus général, l'aire protégée du Takitumu Conservation Area fut créée avec les trois familles majoritaires de cette zone.

En 1998 une marche de 4 heures dans une des trois vallées a été proposée aux touristes pour découvrir les oiseaux dans leur milieu naturel. 298 touristes ont visité ce site, leur nombre avait doublé en 2000 et généré 1 356 000 XPF.

Deux ans plus tard, grâce au programme de sauvegarde et à tous les efforts consentis, l’espoir était au rendez-vous. Le nombre d’oiseaux avait dépassé les 200. L’argent récolté pendant la campagne a servi à soutenir le programme de sauvegarde du Monarque de Rarotonga et fut reversé sous la forme d'un pourcentage (35 % aux propriétaires afin d'alimenter un fond qu'ils gèrent indépendamment (et répartissent eux même au sein des trois familles)).

Cet argent ne représente pas grand-chose de significatif par rapport au grand nombre de propriétaires mais ils ont décidé de créer un fond commun. Il sert à financer des actions communautaires ou des bourses d'études pour leurs enfants.

Un potentiel économique non négligeable

Le potentiel de développement éco-touristique de Tahiti est important : le nombre de touristes ayant visité Tahiti était de 160 000 en 2010 (contre 60 000 aux îles Cook en l'an 2000).

Une solution alternative pour apporter des dividendes aux propriétaires des vallées de Tahiti s'ils refusent la visite de leur vallée est la plantation de santal, Santaluminsulare, un arbre précieux qui ne se reproduit pas en présence du rat noir. Ainsi des dératisations sur le long terme pourraient bénéficier aux monarques et aux propriétaires. D'autres arbres représentent sur le long terme une valeur agro-forestière à condition que leur exploitation soit durable. Un inventaire sera alors établi.

Les visites ou les plantations d'arbres pourraient créer du travail pour des personnes patentées. L'activité économique pourrait prendre progressivement le relais des organismes caritatifs et de l'environnement pour la rémunération des patentés en charge du site.



Sources : Lettre de la société d’ornithologie

Rédigé par TP le Jeudi 17 Janvier 2013 à 14:19 | Lu 33590 fois