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Professeurs stagiaires : l’Etat va attaquer les arrêtés d’affectation de Tauhiti Nena


Richard Didier
Richard Didier
C’est un coup de massue pour les 15 professeurs stagiaires qui pensaient avoir obtenu gain de cause au tribunal administratif vendredi dernier. Le Haut-commissaire leur a annoncé mercredi qu’il avait reçu l’ordre d’attaquer les arrêtés d’affectation du ministre polynésien de l’éducation, Tauhiti Nena. La consigne a été donnée à Richard Didier par le directeur de cabinet de Luc Chatel, preuve que l'Etat prend très au sérieux cette affaire.

« Le ministère de l’éducation nationale, au vu de cette ordonnance qui ne tranche pas, -puisqu’elle s’accompagne d’un rejet de la demande - , souhaite ouvrir un contentieux afin de savoir qui a raison et qui a tort dans ce dossier » a expliqué Richard Didier devant la presse mercredi après-midi. Saisi par 15 professeurs stagiaires sur les 22 mutés en métropole, le tribunal administratif ne s’était en effet pas prononcé sur le fond vendredi dernier.

Dans son ordonnance, le juge des référés expliquait que les arrêtés du ministre polynésien de l'éducation étaient ceux qui devaient s'appliquer, puisqu’ils étaient postérieurs aux arrêtés d'affectation pris par le ministère de l'éducation nationale. Mais s'il allait, en apparence, dans le sens des professeurs stagiaires, le juge des référés avait en réalité rejeté leurs requêtes comme "dépourvues d'objet". « Vous restez en Polynésie tant que le Haut-commissaire n’attaque pas les arrêtés de Tauhiti Nena », avait résumé le juge.

Pour les professeurs stagiaires, cette ordonnance revenait à une victoire. D’autant que le Haut-commissaire avait affirmé qu’il n’attaquerait pas les arrêtés d’affectation.

Voici ce qu'il disait le 9 août :
richard_didier_.mp3 Richard Didier .mp3  (846.02 Ko)


Risque de jurisprudence

Les représentants du collectif des professeurs stagiaires sortent abattus de leur rendez-vous avec le Haut-commissaire, mercredi après-midi.
Les représentants du collectif des professeurs stagiaires sortent abattus de leur rendez-vous avec le Haut-commissaire, mercredi après-midi.
Aujourd'hui l’Etat décide finalement d'attaquer, pour clarifier une situation ingérable. En effet, une partie des professeurs stagiaires (7) a finalement accepté l’affectation du ministère de l’éducation nationale. Ces stagiaires ont quitté la Polynésie samedi dernier pour rejoindre leur académie en métropole. Les 15 autres ont de leur côté pris leur poste en Polynésie française. Qui est coupable d’abandon de poste ? Qui doit payer ces professeurs stagiaires ? Des questions qui n’auront pas de réponse tant qu’un juge n’aura pas tranché sur le fond.

Par ailleurs, l’Etat redoute que leur situation ne fasse jurisprudence. « N’importe quel stagiaire de France métropolitaine pourrait désormais refuser son lieu d’affectation en s’appuyant sur cette jurisprudence » explique Richard Didier. Les arrêtés de Tauhiti Nena seront donc attaqués, mais l’Etat ignore encore devant quelle juridiction. Cour de cassation, Conseil d’Etat ou tribunal administratif : trois options existent. Des juristes travaillent sur la question.

Pour les 15 professeurs stagiaires, la nouvelle est un choc. Ils ont tous fait leur rentrée dans des établissements polynésiens, et croyaient que l’Etat ne porterait pas l’affaire en justice. Ce recours pourrait prendre plusieurs mois, pendant lesquels ils resteront dans le flou sur leur affectation. Quant au Pays, il réagit mal à la nouvelle. « Le Haut-commissaire avait bien dit qu’il ne ferait pas faire de recours si la décision de justice était en notre faveur » rappelle le ministre polynésien de l’éducation. « J’attend de voir ce que Richard Didier va faire pour réagir derrière » affirme Tauhiti Nena, tout en s’alarmant « qu’on ne puisse pas tenir compte de ses engagements ».

Le Haut-commissaire estime de son côté que se pose la question des « relations globales » entre le Pays et l’Etat en matière d’éducation. Richard Didier souhaite revoir la convention de 2007 « qui n’est pas très claire et mérite d’être rediscutée ». L’Etat pourrait concéder un transfert « beaucoup plus important" de compétences à la Polynésie en matière d’éducation.

Le Haut-commissaire doit se rendre la semaine prochaine à Paris où il rencontrera le directeur de cabinet de Luc Chatel.

Il a également rendez-vous avec le ministre des affaires étrangères Alain Juppé pour "préparer" le Forum des Iles du Pacifique, où Oscar Temaru a l'intention de demander le soutien des Etats membres dans sa démarche de réinscription de la Polynésie sur la liste des pays à décoloniser.

le Mercredi 24 Août 2011 à 12:24 | Lu 6780 fois