Paris, France | AFP | mercredi 30/03/2022 - L'égalité du temps de parole entre prétendants à l'Elysée dans la dernière ligne droite fait pester médias et gros candidats contraints de déployer des trésors tactiques pour se conformer à la réglementation.
Et si la campagne pour l'Elysée 2022 longtemps éclipsée par le Covid puis l'Ukraine, s'achevait par encore moins de politique dans les médias?
Les strictes règles de l'égalité du temps de parole, c'est-à-dire un temps d'antenne égal pour tous les candidats avec un décompte précis des minutes, ont comme conséquence paradoxale de réduire l'exposition médiatique de la politique.
La règle "a tendance à invisibiliser la campagne sur les chaînes d'information en continu", constate-t-on dans l'entourage de la candidate LR Valérie Pécresse.
"L'égalité du temps de parole est quand même avantageuse pour nous mais effectivement, les +primes+ sont moins nombreux", souligne-t-on chez le communiste Fabien Roussel.
"Cette égalité totale à respecter parmi les 12 candidats nécessite techniquement une approche de fourmis et éditorialement, pour ne pas se laisser déborder par des rattrapages de temps de parole ou d'antenne", explique Catherine Nayl, directrice de l'information de France Inter.
"On fait moins du journalisme que de l'épicerie pour être clair", se désole, également auprès de l'AFP, Marc-Olivier Fogiel, directeur général de BFMTV qui juge la règle "contreproductive".
Débutée lundi, cette période de 15 jours jusqu'au week-end du 1er tour, est "tellement contraignante qu'elle oblige à cantonner la politique dans des endroits précis et qui permettent d'équilibrer à la seconde près", expose-t-il.
"Avec l'Ukraine qui a un peu confisqué une partie de la campagne, tout se joue vraiment dans la dernière ligne droite, or c'est le moment où on n'en parlera quasiment pas", regrette M. Fogiel.
"Ca ne change pas beaucoup pour nous" car "nous avions décidé de donner la parole à tout le monde", nuance Michel Dumoret, directeur des rédactions nationales de Francetélévisions qui concède toutefois "un casse-tête hallucinant".
Pour Emiliano Grossman, professeur associé à Sciences Po, "ça part d'une hypothèse théorique à savoir que le temps de parole est un déterminant direct de la popularité et de l'attention qu'un candidat peut soulever. Or c'est plutôt la question des enjeux qui va favoriser les uns et les autres".
"Ce n'est pas très efficace et il y a des effets pervers puisqu'au final le citoyen risque d'avoir moins accès au débat politique", complète le chercheur.
"La règle permet de corriger tous les effets de surmédiatisation de l'exécutif", commente Alexis Lévrier, historien des médias.
Le temps médiatique, un "trésor"
"Elle est démocratique et saine, dans l'esprit de la Constitution, même s'il est évident qu’elle pose énormément de problèmes aux chaînes avec la tentation de faire disparaitre la campagne par évaporation", complète-t-il.
Les candidats sont en tout cas en ordre de marche. Chaque camp aligne ces matinales et ses "20 heures" comme autant de divisions. Avec des cases plus stratégiques que d'autres, celles de la deuxième et dernière semaine que les gros candidats préemptent.
"C'est tactique", commente une cadre macroniste qui souhaite garder l'anonymat. Emmanuel Macron ne fait ainsi "pas de médias cette semaine pour avoir un déficit de temps de parole".
"Le trésor d'une campagne électorale c'est le temps médiatique. Ne pas savoir le gérer c'est de l'amateurisme", résume Jean-Philippe Tanguy, directeur adjoint de campagne de Marine Le Pen.
Dans l'entourage du président-candidat qui, rentré tardivement en campagne, avait jusqu'ici pu bénéficier d'une représentativité plus forte dans les médias, on sait que le grand meeting samedi à la Défense Arena de Nanterre aura une exposition loin des standards habituels.
"Les chaînes d'info vont peut être diffuser 20 minutes. Il faut donc parier sur les audiences digitales, multiplier les canaux de diffusion pour toucher le plus de monde possible" car les règles de l'autorité régulatrice des médias ne s'appliquent pas aux réseaux sociaux et plateformes, explique son entourage.
La stratégie n'est pas sans risque. Surtout en cas de bévue.
"Emmanuel Macron est rattrapé par sa volonté de retarder le plus longtemps possible son entrée. Il est piégé par sa propre tactique", juge Alexis Lévrier
Et si la campagne pour l'Elysée 2022 longtemps éclipsée par le Covid puis l'Ukraine, s'achevait par encore moins de politique dans les médias?
Les strictes règles de l'égalité du temps de parole, c'est-à-dire un temps d'antenne égal pour tous les candidats avec un décompte précis des minutes, ont comme conséquence paradoxale de réduire l'exposition médiatique de la politique.
La règle "a tendance à invisibiliser la campagne sur les chaînes d'information en continu", constate-t-on dans l'entourage de la candidate LR Valérie Pécresse.
"L'égalité du temps de parole est quand même avantageuse pour nous mais effectivement, les +primes+ sont moins nombreux", souligne-t-on chez le communiste Fabien Roussel.
"Cette égalité totale à respecter parmi les 12 candidats nécessite techniquement une approche de fourmis et éditorialement, pour ne pas se laisser déborder par des rattrapages de temps de parole ou d'antenne", explique Catherine Nayl, directrice de l'information de France Inter.
"On fait moins du journalisme que de l'épicerie pour être clair", se désole, également auprès de l'AFP, Marc-Olivier Fogiel, directeur général de BFMTV qui juge la règle "contreproductive".
Débutée lundi, cette période de 15 jours jusqu'au week-end du 1er tour, est "tellement contraignante qu'elle oblige à cantonner la politique dans des endroits précis et qui permettent d'équilibrer à la seconde près", expose-t-il.
"Avec l'Ukraine qui a un peu confisqué une partie de la campagne, tout se joue vraiment dans la dernière ligne droite, or c'est le moment où on n'en parlera quasiment pas", regrette M. Fogiel.
"Ca ne change pas beaucoup pour nous" car "nous avions décidé de donner la parole à tout le monde", nuance Michel Dumoret, directeur des rédactions nationales de Francetélévisions qui concède toutefois "un casse-tête hallucinant".
Pour Emiliano Grossman, professeur associé à Sciences Po, "ça part d'une hypothèse théorique à savoir que le temps de parole est un déterminant direct de la popularité et de l'attention qu'un candidat peut soulever. Or c'est plutôt la question des enjeux qui va favoriser les uns et les autres".
"Ce n'est pas très efficace et il y a des effets pervers puisqu'au final le citoyen risque d'avoir moins accès au débat politique", complète le chercheur.
"La règle permet de corriger tous les effets de surmédiatisation de l'exécutif", commente Alexis Lévrier, historien des médias.
Le temps médiatique, un "trésor"
"Elle est démocratique et saine, dans l'esprit de la Constitution, même s'il est évident qu’elle pose énormément de problèmes aux chaînes avec la tentation de faire disparaitre la campagne par évaporation", complète-t-il.
Les candidats sont en tout cas en ordre de marche. Chaque camp aligne ces matinales et ses "20 heures" comme autant de divisions. Avec des cases plus stratégiques que d'autres, celles de la deuxième et dernière semaine que les gros candidats préemptent.
"C'est tactique", commente une cadre macroniste qui souhaite garder l'anonymat. Emmanuel Macron ne fait ainsi "pas de médias cette semaine pour avoir un déficit de temps de parole".
"Le trésor d'une campagne électorale c'est le temps médiatique. Ne pas savoir le gérer c'est de l'amateurisme", résume Jean-Philippe Tanguy, directeur adjoint de campagne de Marine Le Pen.
Dans l'entourage du président-candidat qui, rentré tardivement en campagne, avait jusqu'ici pu bénéficier d'une représentativité plus forte dans les médias, on sait que le grand meeting samedi à la Défense Arena de Nanterre aura une exposition loin des standards habituels.
"Les chaînes d'info vont peut être diffuser 20 minutes. Il faut donc parier sur les audiences digitales, multiplier les canaux de diffusion pour toucher le plus de monde possible" car les règles de l'autorité régulatrice des médias ne s'appliquent pas aux réseaux sociaux et plateformes, explique son entourage.
La stratégie n'est pas sans risque. Surtout en cas de bévue.
"Emmanuel Macron est rattrapé par sa volonté de retarder le plus longtemps possible son entrée. Il est piégé par sa propre tactique", juge Alexis Lévrier