Prescription de l'affaire Haddad-Flosse : la décision connue le 1er mars (Màj)


Me François Quinquis et le ténor du barreau parisien Me Szpiner, grand spécialiste des affaires politico-financières, mardi matin à l'issue de l'audience de plaidoirie.
PAPEETE, le 26 janvier 2016 - La chambre de l'instruction de la cour d'appel de Papeete a étudié comme prévu, ce mardi matin, la requête de l'avocat de Gaston Flosse, Me Quinquis, tendant à faire constater la prescription de l'action en justice contre son client dans le dossier à rebondissement Haddad-Flosse, dit des annuaires de l'OPT. La décision, qui pourrait signifier la mise en bière pure et simple de cette affaire, a été mise en délibéré au mardi 1er mars.


Le conseil de l'ancien président du Pays se repose sur la confirmation de l'annulation de la procédure -et donc de la condamnation de Gaston Flosse et consorts- par la cour d'appel en avril 2015, au motif que l'ordonnance de renvoi du juge d'instruction devant le tribunal correctionnel était insuffisamment documentée, notamment au chapitre des infractions reprochées. En juin 2014, la cour d'appel avait déjà annulé les condamnations prononcées en première instance pour ce motif, avant d'être irrégulièrement ressaisie par le parquet et de confirmer sa position en avril 2015. Pour Me Quinquis, il découle de ce premier arrêt de la cour d'appel l'annulation de tous les actes de procédure pris entre la date à laquelle il a été rendu, et le réquisitoire initial du parquet, en septembre 2011. Soit plus de trois ans, le délai légal de prescription en matière délictuelle.

"Le parquet aurait du relancer le dossier avant septembre 2014" ajoute Me Quinquis. "Il a attendu pour des raisons qui lui sont personnelles et qui sont pour moi totalement incompréhensibles le mois de juin 2015 pour le faire en déposant ce que l'on appelle un réquisitoire de régularisation", ajoute Me Quinquis. "Nous sommes très loin des délais qui lui sont impartis et nous demandons de le faire constater".

Pour le parquet général, la décision en elle-même de la cour d'appel d'annuler la procédure serait un acte interruptif de prescription. La défense des prévenus dans ce dossier des annuaires estime de son côté que seuls les actes d'instruction ou du procès le sont, et non pas un arrêt qui ne ferait que constater une situation.

La chambre de l'instruction a mis sa décision en délibéré au mardi 1er mars. Si les magistrats venaient à suivre la démonstration de Me Quinquis, l'affaire serait purement et simplement terminée sans que personne n'ait été condamné.

Gaston Flosse avait été condamné à 5 ans de prison, 10 millions de francs d'amende et 5 ans d'inéligibilité pour corruption et trafic d'influence en première instance dans ce dossier, en janvier 2013. Le vieux Lion avait été renvoyé devant le tribunal correctionnel, soupçonné par le juge d'instruction d'avoir perçu près de 190 millions de Fcfp de l'homme d'affaires Hubert Haddad sous forme d'enveloppes d'argent liquide, entre 1993 et 2006, favorisant en contrepartie l'activité des entreprises de ce dernier, également condamné. A venir, les réactions des avocats.

"Cela peut paraître étonnant pour l'opinion publique" concède Me Quinquis, "ce n'est pas la faute de la défense" insiste Me Szpiner

"Cela peut paraître étonnant pour l'opinion publique qu'un dossier soit ainsi annulé", a tenu à préciser Me Quinquis, confiant au point d'anticiper sur la décision de la chambre de l'instruction, qui ne sera rendue que dans un peu plus d'un mois. "Il faut bien voir que l'institution judiciaire ne peut que sortir grandie de reconnaître ses erreurs. Ce dossier est une succession d'erreurs de débutants. Vous avez une ordonnance de renvoi qui est annulée car le juge l'a mal écrite, un jugement de correctionnel qui est annulé car le tribunal n'a pas respecté la règle de droit, un parquet général qui ne vient pas exécuter une décision de justice alors même que c'est sa raison d'être, et qui vient ressaisir en toute illégalité une cour d'appel qui a rendu un arrêt qui lui est contraire, tout ceci n'a pas beaucoup de sens. Il faut que les juridictions, autrement composées, constatent leurs erreurs et en tirent les conséquences : la prescription de l'action publique".

"Ce n'est pas la faute de la défense"

"Il faut que les choses soient très claires", embraye Me Szpiner. "Quand la cour d'appel a annulé l'ordonnance de renvoi, elle a très précisément fait injonction au procureur de la République de reprendre les poursuites. A l'époque il était dans les temps. Il disposait de trois mois pour saisir le juge d'instruction. S'il avait agi dans ces trois mois nous n'en serions pas là. Donc si ce dossier est prescrit, ce n'est pas la faute de la défense, ce n'est pas dû à des manœuvres dilatoires des avocats. C'est parce qu'il y a eu carence du ministère public et elle lui est seule imputable".


Rédigé par Raphaël Pierre le Mardi 26 Janvier 2016 à 11:55 | Lu 1735 fois