Pour Macron, une course d'obstacles jusqu'à la présidentielle


Paris, France | AFP | jeudi 29/04/2021 - Il n'en dit pas un mot publiquement, mais peu en doutent: Emmanuel Macron sera candidat à sa succession en 2022, avec le double défi de défendre un bilan cabossé par les crises et de convaincre les Français de son projet.

Lorsqu'il est interrogé sur le sujet, le chef de l'Etat entretient le mystère, en laissant entendre qu'il ne pourrait "peut-être" "pas être candidat".

"Peut-être que je devrai faire, dans la dernière année, des choses dures parce que les circonstances l’exigeront et qui rendront impossible" cette candidature, avait-il dit fin 2020 au média Brut.

Emmanuel Macron n'est pas le premier président à entretenir le flou et à retarder ainsi une éventuelle entrée en campagne alors que plusieurs de ses adversaires potentiels - Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon ou Xavier Bertrand - se sont déjà lancés dans la course.

Mais rarement un président s'est engagé dans la dernière ligne droite de son quinquennat dans un tel climat nébuleux: la crise sanitaire du Covid-19 va-t-elle s'apaiser ? Dans quel état économique, social et psychologique en sortira la France ? Sera-t-il en mesure de lancer de nouvelles réformes pour enrichir son bilan ? 

Pour le chef de l'Etat, "l'imprévisible est devenu la norme, l'incertitude la règle", constate-t-il dans une tribune publiée jeudi par le quotidien L'Opinion.

Il s'y présente comme "un optimiste de la volonté", après avoir affirmé, dans un récent entretien au Figaro, que "quoi qu'il arrive", il "présiderait jusqu'au dernier quart d'heure". "Sur la sécurité, sur l'économie et l’industrie, sur les réformes, sur le social, sur l’éducation, sur l’environnement, j'agirai" jusqu'à la fin du quinquennat, a-t-il insisté.

"Il va vouloir montrer qu'il est président jusqu'au bout", affirme également un proche, qui ne voit aucun avantage à endosser trop rapidement l'habit de "président-candidat", car "le second prendrait inévitablement le dessus sur le premier".

Avant lui, Nicolas Sarkozy avait attendu le 15 février 2012 pour officialiser sa candidature à sa réélection même si, dans les faits, tout le monde le considérait déjà en campagne. Quant à François Hollande, il a préféré jeter l'éponge cinq mois avant le scrutin d'avril 2017, devenant ainsi le premier président de la Ve République allant au terme de son mandat à renoncer à briguer sa propre succession.

"Président de l'Europe"

Selon son entourage, Emmanuel Macron a un rendez-vous en ligne de mire: la présidence de l'Union européenne que la France prendra le 1er janvier 2022. "C'est idéal pour lui permettre de se présenter à la fois comme président de la France et de l'Europe", souligne un responsable de la majorité.

Ce pro-Européen pourra défendre son bilan, mais aussi détailler sa vision pour l'UE en prononçant un discours suivi d'un débat devant le Parlement européen vers le 10 janvier. 

Il s'agit de promouvoir "une Europe puissance, qui se sera pensée comme un +nous+ plutôt qu’une addition de +je+", explique-t-il dans L'Opinion. Avec deux impératifs qu'il a mis en avant depuis le début de la crise du Covid-19: "l'Europe qui protège" et "l'Europe souveraine".

Pour Emmanuel Macron, le défi va être de démontrer que la France sera "plus forte" grâce à l'Europe, mettant ainsi au centre du débat électoral son opposition avec les idées défendues notamment par Marine Le Pen.

Dans les prochains mois, il devrait ainsi donner la priorité à la "refondation" des accords de libre circulation de Schengen afin de "mieux contrôler" les frontières de l'UE contre l'immigration et le terrorisme.

L'objectif, au passage, est aussi de combler son déficit de crédibilité sur les questions régaliennes, et de prouver qu'il est le mieux placé pour offrir "le droit à la vie paisible", comme il l'a récemment affirmé au Figaro.

Sur ce point, les Français sont aujourd'hui 68% à considérer son action comme "plutôt un échec" en matière d'immigration et 66% dans le domaine de la sécurité, selon un sondage BVA pour RTL et Orange.

Il compte s'appuyer aussi sur d'autres thèmes, comme l'égalité des chances et l'environnement, que la crise du Covid a occultés, estime son entourage. 

"Avec la crise, le collectif est devenu la priorité. Emmanuel Macron doit donc réussir sa mue de +candidat de l'émancipation+ en 2017 en +président-candidat protecteur+ s'il veut l'emporter l'an prochain", résume un responsable de la majorité.

le Jeudi 29 Avril 2021 à 05:14 | Lu 1663 fois