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Polynésie : une prévention sur la mort subite du nourrisson envisagée


PIRAE, vendredi 7 février 2014. La publication, il y a une dizaine de jours, de l’étude démographique de l’année 2012 de l’ISPF (Institut de la statistique de Polynésie française) a provoqué un peu d’émotion au sujet du taux de mortalité infantile en Polynésie française. Ce taux est évalué par l’ISPF à 7,5 décès pour 1000 naissances en 2012, est deux fois supérieur à celui de la France métropolitaine (3,5/1000). Autre préoccupation, cet indicateur de mortalité infantile qui était descendu au taux de 5 pour 1000 naissances depuis quelques années, similaire aux grands pays du Pacifique (Nouvelle Zélande et Australie), remontait brutalement en 2012 à 7,5 pour la Polynésie française.

Cette aggravation de la mortalité infantile en Polynésie française en 2012 n’a pas échappé aux spécialistes des services de néo-natalité et de pédiatrie du Centre hospitalier de Polynésie française. Dans les équipes soignantes, on suit de près -et sur plusieurs années- cet indicateur pour en comprendre les causes et améliorer la prévention et les réponses médicales. Seuls deux tiers des décès de la trentaine d’enfants de moins de un an recensés en Polynésie française en 2012 (sur 4300 naissance) se sont produits à l’hôpital : pour ceux-là seulement les équipes soignantes connaissent exactement les causes du décès. Pour les autres décès, répartis sur l’ensemble du territoire polynésien, il est très difficile a posteriori d’obtenir des informations sur les causes de la mort de l’enfant. D’autant que les données de l’état civil quittent rapidement le territoire pour être comptabilisées et analysées en France.

Pour les médecins spécialistes, ce chiffre alarmant de la mortalité infantile en 2012 reste un point d’interrogation. «Nous avions déjà repéré un accroissement de la mortalité infantile pour cette année-là, mais on se demande si c’est un épiphénomène qui disparaitra dès l’année suivante ou non. Il est plus intéressant sur ces données, très fines, de travailler sur une longue période plutôt qu’année après année. Le résultat d’une seule année ne peut pas refléter le travail de toute une équipe» explique le docteur Françoise Pawlotsky du service de néonatologie du CHPF. D’autant qu’en raison de la petitesse des chiffres en Polynésie française, il n’existe pas de pondération numérique des statistiques.

Pour ces médecins spécialistes, la comparaison de la mortalité infantile entre la Polynésie française et la France métropolitaine, seulement par les chiffres, oublie de prendre en considération les différences notables des deux territoires. Il n’existe en Polynésie française sur un territoire vaste comme l’Europe que sept maternités : quatre sites à Tahiti (CHPF, hôpital de Taravao et les cliniques), et enfin les hôpitaux de Moorea, Uturoa et Nuku Hiva. Même si depuis 30 ans les pionniers de la néonatologie en Polynésie (notamment le docteur Micheline Papouin) ont créé un réseau de suivi des grossesses maillé sur tous les archipels, les conditions restent nettement moins favorables qu’en métropole.

Ainsi, il y a en France un gynécologue pour 3700 femmes alors qu’il n’y en a plus qu’un pour 5700 femmes en Polynésie française. Par ailleurs, la population polynésienne souffre de pathologies qui compliquent les grossesses : l’obésité notamment ou peut être atteinte par des maladies infectieuses (dengue par exemple) qui peuvent affaiblir les nourrissons et les conditions socio-économiques de la population locale se sont fortement détériorées ces dernières années. «Au sujet de la mortalité infantile, nous effectuons collectivement un travail de recherche pour savoir ce qui s’est passé sur les cas que nous connaissons et savoir s’il faut agir sur la prise en charge à l’hôpital ou à l’extérieur» détaille encore le docteur Pawlotsky.

C'est ainsi, qu'une étude plus fine des causes de la mortalité infantile sur plusieurs années, vient de mettre en évidence une proportion nettement plus élevée de cas de mort subite du nourrisson en Polynésie française qu’en métropole (plus de deux fois plus). «C’est quelque chose qui nous interpelle. Il faut améliorer ces résultats sur les morts subites du nourrisson et sur les maladies infectieuses», le service de néonatologie envisage ainsi de suggérer à la direction de la santé du Pays de faire une campagne de prévention ciblée sur cette mort subite.

Rédigé par Mireille Loubet le Vendredi 7 Février 2014 à 17:13 | Lu 2009 fois