Plainte contre Tapati et Teriipaia


Tahiti, le 4 janvier 2024 - Le président du Tapura a saisi la procureure de la République le 22 décembre dernier. Dans son viseur, l'élu Tavini Mitema Tapati et le ministre de l'Éducation Ronny Teriipaia. Leurs propos respectifs sur le “blanchissement” de la société polynésienne sont constitutifs, selon Édouard Fritch, “du délit de provocation à la discrimination raciale”.
 
“C'est à la justice de trancher”, avait déclaré Antony Géros, le 18 décembre dernier, alors qu'il était une nouvelle fois interpellé par le Tapura qui lui avait demandé de sanctionner Mitema Tapati suite aux propos qu’il avait tenus lors d'une séance à l’assemblée le 26 octobre dernier. Ce qu'avait refusé de faire le président de l'assemblée arguant que les propos du représentant du Tavini ne visaient pas un élu. Ce n'était donc pas l'affaire de l'institution mais de la justice. Soit. Ni une ni deux, Édouard Fritch l'a pris au mot quatre jours plus tard en faisant un signalement auprès de la procureure de la République.
 
C'est ainsi que dans la plainte qu'il a déposée le 22 décembre, le président du Tapura rappelle d'abord ce qu'a dit l'élu Tavini lors de cette séance : “Notre Pays a considérablement blanchi aujourd'hui. On le voit tous ! (...) Un de mes amis s'est rendu en France (...) à son retour, il m'a dit : ‘Dis donc, la France a noirci. Elle est remplie d'Africains !’ Je lui ai dit : ‘Si la France a noirci, notre Fenua, lui, a blanchi’”. Des propos tenus en tahitien qui “peuvent se traduire de la manière suivante”.
 
Problèmes de traduction...

Le reo Tahiti étant une langue très imagée, les interprétations divergent. C'est ainsi que pour Antony Géros, Mitema Tapati “faisait juste une comparaison sur le fait qu'en France, il y a plus de Noirs que de Blancs, et qu'en Polynésie, maintenant, il y a plus de Blancs que de Noirs, c'est tout. Vous voyez des propos xénophobes ? Peut-être en français, mais en tahitien, la façon dont il l'a dit, ce n'est pas du tout le cas”. C'est là toute la difficulté à laquelle la justice va être confrontée pour déterminer si oui ou non ces propos sont constitutifs “du délit de provocation à la discrimination raciale”.
 
Pas de problème de traduction en revanche concernant le ministre de l'Éducation qui s'est exprimé en français le 2 novembre dernier dans une interview accordée à Tahiti Infos.
 
Interrogé sur l'éventuel caractère raciste des propos relatifs “au blanchissement de la société”, Ronny Teriipaia répondait : “Ce n'est pas du racisme... C'est la réalité. On parle d'invasion quand la population autochtone n'est plus visible sur son territoire. Le problème, c'est de ne plus pouvoir maîtriser son destin, notamment en matière de foncier. Si on laisse tout le monde venir ici, où les Polynésiens vont aller s'installer ? Ce n'est pas du racisme, c'est légitime. En France, on dit bien qu'il y a l'invasion de toutes les communautés arabes. C'est exactement pareil.”
 
“En conséquence, je souhaite porter plainte contre messieurs Tafai Mitema Tapati et Ronny Teriipaia”, écrit ainsi Édouard Fritch pour conclure son courrier qu'il demande à la procureure de la République de “considérer comme un dépôt de plainte”.
 
Comme l'a dit le patron de Tarahoi, c'est donc maintenant à la justice de trancher.

Rédigé par Stéphanie Delorme le Jeudi 4 Janvier 2024 à 15:22 | Lu 6310 fois