"Peut-on traiter son collègue de +biloute+ ?" Des avocats 2.0 vous répondent


PARIS, 12 sept 2012 (AFP) - Peut-on traiter son collègue de "biloute" ou son patron de "chochotte" ? Peut-on montrer ses fesses au travail ? Entre deux fondamentaux du droit du travail, des avocats répondent à ces questions fort pointues sur la toile.

"La justice répond à toutes les demandes. Que l'affaire paraisse absurde ou pas", explique à l'AFP Me Eric Rocheblave, l'un des experts en droit du travail les plus prolifiques sur internet.

"Il y a quand même un salarié qui a fait un procès en conseil des prud'hommes, en cours d'appel et jusqu'en Cour de cassation" pour "se faire rembourser ses frais de préservatifs et de prostituée", raconte l'avocat. Cette demande liée à une mission en Thaïlande s'est révélée infructueuse...

Le Code du travail (accessible sur le site legifrance) compte plus de 3.000 pages et on n'y trouve pas forcément la réponse à ce type de situations quelque peu particulières.

Aussi, entre deux billets expliquant ce qu'est le harcèlement sexuel, quels sont les droits d'un salarié en arrêt de travail ou encore s'il est possible de rompre un CDD, des avocats s'appuient sur la jurisprudence pour présenter des cas atypiques.

"La détresse humaine peut reposer sur quelqu'un qui se fait traiter de +biloute+ toute la journée (...) des choses qui peuvent nous paraître anodines", explique Me Rocheblave, qui relate sur son blog (rocheblave.com), le cas de ce salarié licencié pour avoir abusé du terme ch'ti à l'encontre d'un collègue.

Sur son blog (avocatalk.fr), Yves Nicol, avocat lyonnais, raconte de son côté le cas d'une salariée qui avait traité son chef de "chochotte" et contestait son licenciement. Le dossier était allé jusqu'en cassation et la Cour avait considéré que c'était "excusable", car "l'incident s'était déroulé dans un contexte de tension".

Boucher les toilettes est une faute grave

Le droit du travail est "une matière très difficile, très technique, très juridique, mais on touche à l'humain" et "il n'y a pas de sujet tabou", explique Me Rocheblave, avocat à Montpellier.

Ce quadragénaire passionné de droit du travail tient son blog depuis 2009, possède une page Facebook et est suivi par près de 8.000 personnes sur Twitter (@EricRocheblave).

Il dit publier "en moyenne, deux ou trois articles par semaine" et envoie environ un tweet toutes les trois heures (avec l'aide d'un logiciel toutefois...).

"J'y pense tout le temps. Le but du jeu c'est de se dire: est-ce qu'il y a eu une décision de justice sur une idée aussi farfelue ?", raconte l'avocat.

Selon Patrick Brabant, avocat au barreau de Paris, une dizaine de ses confrères ont des blogs "assez costauds", comme celui de Me Rocheblave.

Du coup, Me Brabant, qui a un blog depuis 2007 (avocatravail.blogspot.fr) et un compte Twitter (avocatravail) dit même utiliser le réseau social comme un outil de "veille juridique".

"J'arrive à suivre le droit du travail quotidiennement. (...), on voit les nouvelles jurisprudences qui arrivent", dit-il.

Antoine Bon, avocat à Strasbourg, (antoine-bon-avocat.fr), a de son côté ouvert son blog en 2009 et s'intéresse particulièrement aux contrats précaires pour informer dans "un domaine où typiquement les gens ne vont pas voir un avocat".

Sur son blog, Me Rocheblave relève entre autres que "boucher les toilettes de son employeur est une faute grave", qu'"avoir des éructations et des flatulences au travail est une cause de licenciement" ou encore qu'"un salarié ne peut pas en étrangler un autre"...

Quant à montrer ses fesses ou d'autres parties intimes au travail, c'est déconseillé à en croire la jurisprudence, sauf si, comme cette enseignante de centre équestre, vous montrez votre postérieur pour présenter vos blessures à vos élèves...

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Rédigé par AFP le Mardi 11 Septembre 2012 à 22:09 | Lu 945 fois